Une histoire, un destin, une leçon à tirer …

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L’histoire que je vais vous raconter est une histoire certes vraie, cependant méconnue de la majorité. Le visage que vous voyez ci-dessous vous ne serez pas prêts de l’oublier. Son destin est une leçon pour tous, qui vient s’ajouter aux innombrables leçons que nous étions censés apprendre depuis des dizaines d’années.

Si je vous dis qu’il s’appelle Mohammad al Houjayri, de Arsal, dans le caza de Baalbeck. Vous me direz qu’il doit être un sunnite de Arsal, de la même famille que le chef de municipalité provocateur responsable (directement ou indirectement) du martyr prémédité des très regrettés Capitaine Pierre Bachaalani et Sergent Zahraman. Il peut également évoquer un de ces trafiquants de la région, ou bien un de ces agents qui collaborent avec l’opposition syrienne. Son nom n’inspire que ces éventualités. Mais le Mohammad al Houjayri dont je voudrais vous parler est tout autre que tout cela …

Aujourd’hui, j’ai décidé de rendre hommage au Mohamad al Houjayri, caporal de l’Armée Libanaise. « Bof » diraient certains, « c’est bien » diraient d’autres. Point final. Mais non, je viens vous parler d’un caporal, pas n’importe lequel. Vous allez mieux comprendre si vous continuez la lecture …

Lors des affronts sanglants de l’Armée libanaise en 2007 contre les terroristes du Fatah al Islam dans le camp des réfugiés palestiniens de Nahr el Bared à Tripoli, Mohammad faisait partie de l’unité qui combattait ce fléau de takfiristes. Le 13 juillet, il mourut en martyr au champ d’honneur, par des tirs des ennemis de l’humanité. Jusque-là, rien qui sorte de l’ordinaire, son sort ressemble à celui des 169 martyrs de l’Armée.

Lorsqu’il fût touché par les extrémistes, ces derniers n’ont pas raté l’occasion, conscients que les soldats n’abandonnaient jamais les corps de leurs camarades au champ de bataille en dépit de tous les dangers auxquels ils s’exposeraient. Ils ont métamorphosé ce caporal en guet-apens pour massacrer davantage de militaires. Trois heures durant, ces sauvages ont mitraillé pratiquement sans arrêt sa dépouille, aux yeux de ses compagnons soldats et officiers enragés, en manque d’armes lourdes pour exterminer ces vermines. Mais leur exaspération et leur colère finirent par liquider ces barbares… Il mourut sous les mains de ceux qui aujourd’hui, font légion dans son village natal, qui ont tué quelques années plus tard, deux de ces compagnons…

Du corps de Mohammad Houjayri, il ne restait malheureusement plus rien … même pas un bout de tissu à remettre aux siens … Jusqu’au jour où, en 2008, lors des travaux de déblaiements du camp, un fusil de type M16, singulièrement transpercé de balles, a été retrouvé. Sa matricule, toujours lisible, a permis qu’on le reconnaisse : ce fut le fusil du Houjayri.

Aujourd’hui, nous le retrouvons dans le musée dédié aux martyrs de l’Armée dans la caserne du régiment héliporté à Ghosta. C’est ainsi que j’ai appris cette histoire touchante, de la bouche d’un militaire qui la relatait avec une religieuse fierté mais non sans rage ni larmes aux yeux. Une douleur immense a envahi alors tout mon être, inapte à imaginer ô combien tragique fût le destin de ce Libanais, qui a choisi de s’immoler sur l’autel du Liban en s’enrôlant dans les rangs de l’Armée, mais qui ne s’attendait aucunement à mourir de la sorte. Ceci n’a fait qu’enraciner d’avantage mon amour et mon respect à l’Armée libanaise qui demeure, malgré tout, et envers et contre tout, le seul espoir pour une réelle renaissance du Liban…

Je m’arrête là, laissant le soin aux lectrices et lecteurs de cet article, d’en tirer les leçons qu’il faut …

Par Marie-Josée Rizkallah 

 
Marie Josée Rizkallah
Marie-Josée Rizkallah est une artiste libanaise originaire de Deir-el-Qamar. Versée dans le domaine de l’écriture depuis l’enfance, elle est l’auteur de trois recueils de poèmes et possède des écrits dans plusieurs ouvrages collectifs ainsi que dans la presse nationale et internationale. Écrivain bénévole sur le média citoyen Libnanews depuis 2006, dont elle est également cofondatrice, profondément engagée dans la sauvegarde du patrimoine libanais et dans la promotion de l'identité et de l’héritage culturel du Liban, elle a fondé l'association I.C.H.T.A.R. (Identité.Culture.Histoire.Traditions.Arts.Racines) pour le Patrimoine Libanais dont elle est actuellement présidente. Elle défend également des causes nationales qui lui touchent au cœur, loin des équations politiques étriquées. Marie-Josée est également artiste peintre et iconographe de profession, et donne des cours et des conférences sur l'Histoire et la Théologie de l'Icône ainsi que l'Expression artistique. Pour plus de détails, visitez son site: mariejoseerizkallah.com son blog: mjliban.wordpress.com et la page FB d'ICHTAR : https://www.facebook.com/I.C.H.T.A.R.lb/

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