Les banques libanaises confrontées à d’importantes pertes financières en raison d’investissements défaillants dans la dette publique locale ont instauré des mesures de contrôle des capitaux. Ces mesures, pour un pays dépendant très largement des importations tant pour le commerce mais également pour l’industrie, sont en train d’empoisonner le reste de l’économie libanaise.

Il est indéniable aujourd’hui que le Liban fait face à d’importants problèmes socio-économiques et qu’il est nécessaire de réamorcer l’outillage de notre économie.

Quelques faits: on ne peut pas prétendre les dépôts bancaires être assurés. Le montant total des dépôts diminue pratiquement de 5 milliards de dollars par mois. Ils sont ainsi passés de 175 milliards de dollars environ en août 2019 à 145 milliards de dollars en avril dernier. Cette perte de fonds n’est pas induite seulement par des transferts à l’étranger mais surtout par l’arrêt par les banques des activités de prêts. L’argent ne circule plus. Il n’y a plus de vélocité monétaire et même le gouverneur de la Banque du Liban a convenu hier que l’économie libanaise est devenue une économie cash, comme si on faisait déjà l’impasse sur les dépôts de la population ou des entreprises dans les établissements bancaires.

Faute de pouvoir en disposer librement, c’est tout comme s’ils n’existaient plus. Il faut donc s’en faire une raison.

50% des entreprises risquent de faire faillite en 2020 de l’aveu même du président de la chambre de commerce de Beyrouth Nicolas Chammas et une grande partie de ces faillites sont induites non pas seulement par le fait que les clients ne peuvent pas acheter des marchandises mais aussi que les commerçants ne le peuvent également pas tout comme les industries ne peuvent pas librement commander des matières premières pour produire.

Aujourd’hui, l’économie libanaise ressemble à un système qui s’empoisonne lui-même et qui s’emballe comme un réacteur nucléaire devenu incontrôlable. Le Liban est un Tchernobyl financier et économique.

Cependant, plus que le capital gelé des banques, le plus inquiétant aujourd’hui est l’effet de la crise sur le capital humain qui est nécessaire pour relancer l’économie. Ce n’est pas tout d’avoir des produits ou de produire mais il faut aussi un marché. Il faut éviter la famine, les gens commencent à avoir faim. Notre principale perte n’est pas la dette libanaise mais celle du savoir-faire, l’exode de notre capital humain.

Certes, certains défendent le modèle économique libanais actuel et aiment le décrire comme un modèle libéral. Cela est bien loin de la réalité. Un modèle libéral interdit les monopoles, ici les agences exclusives. Un modèle libéral instaure un ascenseur social permettant la réussite mais aussi l’échec. Seule la compétence compte pour réussir.

Face à la crise qui continue à s’aggraver aujourd’hui, il est temps de faire des sacrifices, une mesure en fin de compte très libérale face un échec. Nous ne sommes pas un pays communiste avec des intérêts privés plus importants que celui de la population. Il faut que les banques sacrifient leurs mesures de contrôle des capitaux au moins pour les entreprises, afin de réactiver une partie de l’économie libanaise. il faut que les banques prêtent de l’argent afin de fournir des emplois et à travers ces emplois de quoi vivre et faire vivre sa famille de son travail, quitte à ce que certains établissements financiers fassent faillites ou soient liquidés.

Ces faillites et ces liquidations sont attendues depuis fort longtemps de toute manière. Le système bancaire libanais est défectueux et nos chers amis banquiers sont des incapables et des incompétents au mieux puisque cette crise était inéluctable ou au pire des menteurs qui ne prenaient pas la peine de lire les rapports économiques qui prévoyaient la gravité de la crise à venir.

Il s’agit aujourd’hui de faire ce qui est juste pour la population et dans son intérêt et les banques sont responsables de la situation dans laquelle elles sont mises et non le reste de l’économie. Il faut qu’elles en assument les conséquences

Dans le cas contraire, il est à craindre, comme à Tchernobyl, une explosion généralisée du Liban, avec les conséquence sociales et économiques sous-jacentes.

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