Samy Gemayel a troqué son costume de député pour le jeans et pull-over sport. Comble de l’élégance, il porte le drapeau libanais en écharpe autour du cou. Que fait-il devant le quartier général des Kataebs, à Saifi, au centre-ville de Beyrouth ?

Diligemment interviewé, entouré de sympathiques jeunes hommes, il explique que son quartier général est devenu un refuge pour manifestants pacifiques. Ils pourront même bénéficier de soins médicaux si nécessaires, insiste-t-il. Ces manifestants refluaient devant les charges de la police antiémeute depuis le Parlement. Regroupés à l’entrée du quartier général des Kataebs, ils sont pris à parti par les forces de police. Samy, Monsieur Bons offices, essaye de calmer le jeu.

Le quartier général des Kataebs devenu un refuge pour manifestants pacifiques est un scoop digne des meilleures agences de presse !

Pour mémoire, ce bâtiment est un sinistre vestige de la guerre civile et, sans doute, celui d’une tractation avec Rafik Hariri et la direction Kataeb. Il s’évita ainsi une destruction au bulldozer et à la dynamite comme tant d’immeubles d’un centre-ville revu et corrigé à la sauce Hariri. Le manque d’élégance du bâtiment cloisonné tranche avec la grâce de l’arbre qu’on voit en face avec sa corolle verte et son tronc noueux.

Samy n’est pas un bénévole parmi les manifestants. Certains d’entre eux évoquent le Liban comme Suisse du Moyen-Orient en objectif à leur engagement.

Un autre membre éminent du parti, le ministre du travail, Kamil Abu Sleiman, repris par la chaîne Al Jazeera, s’inquiète pour les salariés libanais licenciés massivement depuis quelques mois par les entreprises. Il a même prévu une commission pour ce faire. S’agit-il d’appliquer le Code du travail ? Le ministre n’évoque aucune mesure coercitive. Il est vrai que désigné comme l’un des meilleurs avocats d’affaires du monde, il possède toutes les vertus d’un dirigeant syndicaliste. À moins qu’il ne s’agisse, sous la pression des événements, d’une reconversion en faveur du droit du travail ?

Quelques heures plus tôt, d’autres partis politiques firent la démonstration de leur soutien au mouvement. Masqués, armés de bâtons, à pied ou à moto, ils s’invitent au centre-ville et s’en prennent aux structures érigées par les manifestants. Par chance, peu de personnes pour les accueillir, si ce n’est la police anti-émeute qui les repousse vers leurs quartiers. Il s’agissait des nervis d’Amal et du Hezbollah, dont une vidéo malveillante sur Internet avait réveillé le sens du civisme.

Ces batailles, montées en épingle, ne sont pas le fait des manifestants, plutôt attentifs à éviter les affrontements et à trouver des revendications et objectifs communs aux protestataires. Les femmes souvent en première ligne pour en défendre l’orientation.

Ces affrontements indiquent les tendances au sein de la classe politique libanaise, avec sa cohorte de clans et partis. Leur souhait à tous est de mettre fin à ce mouvement qui leur échappe.

Les méthodes s’adaptent à la dynamique de la situation : infiltration, soutien, empathie, critique, visite menaçante à domicile ou envoi de nervis en attendant pire.

Empêtrés dans leur crise politique et économique, ils essayent de trouver un Premier ministre et un cabinet pas trop mouillés dans les affaires et la corruption. Mission impossible au Liban. La combinaison est d’autant plus hasardeuse que les uns subissent la pression des Etats-Unis et de l’Europe, d’autres s’en remettent aux conseils et soutiens de l’Iran et des forces régionales. Les uns et les autres n’étant que là pour perpétuer le système. « Tout changer pour ne rien changer ». 

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