60%, c’est le chiffre du taux de participation des expatriés libanais participant au processus électoral dans les pays arabes. Certains considèrent ce chiffre comme bon, mais il convient de replacer les choses telles qu’elles le sont: ce chiffre est décevant, d’autant plus décevant que l’inscription aux registres électoraux était volontaire.

La question est de connaitre l’origine d’une telle déception. S’agit-il de nos ressortissants qui n’étaient pas libres d’appliquer leur volonté électorale dans les pays? Et pour quelles raisons?

Est-ce par lassitude? Beaucoup peuvent avoir été amené à penser que voter de toute façon, cela ne sert à rien en raison d’estimations qui indiquent que 77 députés sur 128 sont d’ors et déjà assurés d’une place au prochain parlement.
Aussi on peut comprendre que beaucoup se soient abstenus en raison de la loi électorale elle-même qui oblige à choisir une seule liste entière. Toutes les listes possèdent au moins une personne qui ne fait l’unanimité et par conséquent, ce taux de participation qui est bas est l’expression du rejet populaire de ce mode de scrutin. Les électeurs souhaitent voter par conviction et non par défaut.

Plus grave, le fonctionnement du dépouillement des urnes pourrait être mis en cause. En lieu et place d’un dépouillement sur place en raison de la complexité du système de la loi électorale, les urnes seront acheminées au Liban, stockées dans les coffres de la Banque du Liban et dépouillées le jour des élections au Liban, c’est-à-dire le 6 mai prochain, dans les cazas d’origine.
À ce moment-là, un simple regroupement de différentes informations pourrait induire à comprendre qui a probablement voté pour quel parti et notamment pour le Hezbollah ou pour ses alliés. Cela peut intervenir dans un certain contexte de tensions politiques régionales entre Iran d’un côté et Arabie Saoudite. On se souviendra de l’épisode du kidnapping-démission du Premier Ministre Saad Hariri en novembre 2017 et des menaces d’expulsions de ressortissants libanais sur des bases religieuses ou d’appartenance politique.

Cette question peut s’avérer cruciale et amène à se poser une autre question, celle de l’absence parmi les 6 pays ou le scrutin a eu lieu – Égypte, Sultanat d’Oman, Koweït, Qatar, Arabie Saoudite et enfin Émirats Arabes Unis – de Bahreïn également dans un contexte de tension entre une minorité sunnite au pouvoir et une majorité chiite défavorisée. On se souvient des accusations de Bahreïn à l’encontre du mouvement chiite accusé de soutenir l’opposition au régime.
Est-ce que les autorités locales ont refusé l’organisation de ce scrutin, est-ce par convenance diplomatique que des votes n’ont pas été aménagés sur place, ou encore un “simple” oublie de nos autorités politiques?

On peut aussi craindre que des employeurs exercent certaines formes de pressions sur leurs employés libanais notamment quand le Grand Patron est lui-même candidat.
Cela intervient alors qu’effectivement, certains de nos ressortissants ont craint d’exprimer leurs opinions, non pas seulement au sein des pays arabes mais également aux USA où le Hezbollah est considéré comme un mouvement terroriste.

Voter par conviction aussi quand on est devant les urnes… Quelques soient les opinions des uns et des autres, la démocratie est d’accepter le résultat des urnes à condition que les électeurs puissent librement s’exprimer. Et c’est justement sur ce point que l’expérience démocratique au Moyen-Orient s’avère un échec.
Ces élections législatives libanaises doivent être un exemple d’autant plus important dans notre région du Moyen-Orient qu’on ne peut prétendre honnêtement que d’autres pays puissent dire autant. Entre élections aux résultats staliniens de 98% à 99% pour un dictateur jusqu’à des régimes théologiques de droits divins ou des dictateurs en fin de compte pas si éclairés qu’ils soient rois, émirs ou prince.
Il fallait que chaque expatrié libanais puisse démontrer qu’on est capable d’un comportement démocratique dans cette région aussi troublée par des mouvements divers qu’ils soient religieux, terroristes ou simplement pour survivre. Cette violence n’est pas la solution. Beaucoup de victimes pourraient être simplement épargnées par un peu de démocratie dans notre région et le modèle libanais peut être cette solution.

Espérons que les taux de participations des expatriés libanais des 33 autres pays participants demain seront plus élevés et pourront faire mentir cette malheureuse tendance.

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