Des insurrections à veste, il y en a déjà eu. Les Gilets Jaunes n’ont rien inventé, bien au contraire.

La Grande Jacquerie qui s’est déroulée en 1358, durant donc la Guerre de 100 ans, désignait ainsi des paysans portant une veste courte, dites Jacques. Cette période était déjà celle de crises politiques, du fait du conflit avec les Anglais et aussi par conséquente économiques puisqu’il fallait financer ces guerres et la Rançon du Roi Jean le Bon, emprisonné par les Anglais en plus des problèmes socio-économiques qui avaient été provoqué par la pandémie de la Peste Noire qui s’était déroulée 10 ans auparavant. On n’évoquait pas encore de pression fiscale mais cette dimension était tout de même présente.

Jean Le Bon mourra d’ailleurs à Londres le 8 avril 1364, tentant de renégocier le traité de Brétigny qui avait échangé sa place contre celle de son fils Louis.

La défaite de Poitier ou justement le Roi Jean le Bon avait été fait prisonnier, avait aussi décrédibilisé le pouvoir et ses tenants, à savoir la Noblesse de France.

Des épisodes de violences ont été très nombreux vis-à-vis des classes considérées comme privilégiées. Selon un chroniqueur de l’époque, Jean Froissart,
« Ils déclarèrent que tous les nobles du royaume de France, chevaliers et écuyers, haïssaient et trahissaient le royaume, et que cela serait grands biens que tous les détruisent. […] Lors se recueillirent et s’en allèrent sans autre conseil et sans nulle armure, seulement armés des bâtons ferrés et de couteaux, en premier à la maison d’un chevalier qui près de là demeurait. Si brisèrent la maison et tuèrent le chevalier, la dame et les enfants, petits et grands, et brûlèrent la maison. […] Ils tuèrent un chevalier et boutèrent en un hâtier et le tournèrent au feu, et le rôtirent devant la dame et ses enfants. »

Gaston Phébus et Jean de Grailli chargent les Jacques et les parisiens qui tentent de prendre la forteresse du marché de Meaux où est retranchée la famille du Dauphin. (9 Juin 1358). Source Photo: Wikipedia.org

La contre-jacquerie a été également d’une rare violence.
Elle sera écrasée par Charles le Mauvais, Roi de Navarre les 9 et 10 juin de 1358. Le principal meneur, Guillaume Carle, ayant reçu l’assurance d’une trêve, fut entraîné par traîtrise dans le camp des nobles où il fut supplicié et décapité.

Des couvre-chefs et sans-culottes

Sans-culottes en armes, gouache de Jean-Baptiste Lesueur, 1793-1794, musée Carnavalet. Source Photo: Wikipedia.org

En France toujours durant la Révolution Française, des symboles vestimentaires sont également apparus avec le bonnet Phrygien rouge, en souvenir des esclaves romains affranchis accompagné d’une cocarde et les sans-culottes – pantalons longs à rayures – appelés ainsi par mépris de cette classe sociale et qui s’oppose à l’Aristocratie. Ces derniers portaient alors des culottes désignant à l’époque les pantalons courts complétés par l’usage de bas.

Contrairement aux sans-culottes, le bonnet phrygien intègrera les symboles de la République Française, à savoir en devenant la coiffe de Marianne suite à l’adoption de ce symbole par de riches patriotes de la révolution en opposition aux classes populaires qui ne disposaient que des pantalons dits « sans-culottes » et qui demandaient l’adoption d’une démocratie directe, c’est à dire sans intermédiaires et donc sans députés. Ces sans-culottes seront instrumentalisés et deviendront l’un des principaux instruments de la Terreur puisque représentant la faction radicale – avec Robespierre – de la Révolution Française.

Des Gilets, héritiers des Sans-Culottes ?

Les Gilets jaunes, ou Gilets de Haute Visibilité sont issus d’un mouvement protestataire sans structure tout comme les sans-culottes et qui protestent contre l’augmentation des taxations.

L’adoption de ce symbole est expliquée par certains au fait de souhaiter être visible par les autorités politiques qui tendaient à ne pas prendre au sérieux au début la gravité de la situation.

La Marianne défigurée de l'Arc de Triomphe, une photographie largement partagée sur les réseaux sociaux. Crédit Photo DR.
La Marianne défigurée de l’Arc de Triomphe, une photographie largement partagée sur les réseaux sociaux. Crédit Photo DR.

Tout comme les Sans-Culottes, certains membres de ce mouvement de la mouvance d’extrême gauche revendiquent – outre la baisse de la fiscalité – l’adoption d’une démocratie directe. C’est peut-être la dimension symbolique en opposition au bonnet phrygien qui a amené à l’attaque du moulage de Marianne à l’Arc de Triomphe par des casseurs, qui s’en prenaient ainsi à la République Française et à son système de démocratie par représentation, c’est-à-dire par des députés représentant le Peuple.

Selon certains comme François-Valentin Mulot « La sociologie du sans-culotte est intentionnellement imprécise : élastique, elle permet l’identification des plus grands nombres…. », chose qu’on retrouve aujourd’hui de manière similaires auprès du mouvement des Gilets Jaunes qui se réclament être apolitiques mais dont les propositions sont plutôt proches idéologiquement de l’extrême gauche pour la majorité et de l’extrême droite sur certaines questions comme celles de l’émigration.

Cette absence de structure, tout comme celle des Sans-Culottes, permet l’instrumentation des Gilets Jaunes par certains mouvements extrémistes, comme en témoigne aujourd’hui le fait que les leaders des Gilets Jaunes favorables à l’ouverture d’un dialogue avec les autorités font état de menaces de mort à leur encontre et ce qui les a amenés à annuler les rencontres prévues avec le Premier Ministre pour discuter d’une sortie de crise.

Et le Liban dans tout cela ?

Au Liban certains raillaient la Révolution des Cèdres en 2005, l’appelant révolution Gucci, du nom des lunettes arborées par certaines manifestants ou encore Louis Vuitton, démentant ainsi également le fait qu’il s’agissait de manifestants issus de toutes les classes sociales, ce qui était pourtant le cas.

Il s’agissait donc de décrédibiliser un mouvement plutôt général, sans limite de classe sociale. Cependant, il s’agissait plus d’une rébellion contre l’occupation syrienne du Liban au final qu’une Révolution puisqu’elle ne s’est pas achevée avec des changements radicaux au niveau de la scène politique libanaise, comme l’illustrent les actuels blocages au niveau des administrations politiques où figurent de nombreux héritiers de dynasties politiques.

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