Hier le parlement libanais a voté une loi sous le hourra général abolissant les agences exclusives, un exploit à en croire certains, mais une chose qui était pourtant attendue depuis de nombreuses années, depuis que le Liban en réalité souhaitait intégrer l’OMC à la fin des années 1990. Si exploit il y a, c’est d’avoir mis autant de temps au final mais rendu d’autant plus nécessaire par la crise économique actuelle et les monopoles établis sur le marché, monopoles qui ont couté beaucoup en terme de pouvoir d’achat à la population. Non, le Liban n’était pas une économie libérale mais une économie faite de cartels économiques qui souvent rackettaient ainsi de manière très officielle une population obligée de s’achalender tant bien que mal.

Nous avons pu voir, ces dernières années, de nombreux abus des agences exclusives, comme des aides bloquées au Port de Beyrouth, comme ce qu’on a pu découvrir après l’explosion du port de Beyrouth avec les ordinateurs offerts par les Nations-Unis depuis de nombreuses années jusqu’à devenir aujourd’hui obsolètes, ou des produits de première nécessité envoyés au Liban suite au drame et périmés, celles-ci réclamant des commissions pour permettre la sortie simplement de biens et de marchandises pourtant gratuitement données à la population libanaise en proie aux difficultés économiques ou encore des stocks de lait maternisés bloqués dans les dépôts de certains dans l’attente de la levée des subventions jusque là accordées à leur importation. Nombreux étaient les produits existants au Liban mais inexistants sur le marché local. Il était cruel de constater que même dans des secteurs qui officiellement étaient exempts d’agents exclusifs, ces derniers s’entendaient tout de même pour créer ces pénuries.

Parmi les avancées tout de même à reconnaitre, l’obligation est désormais faite au représentant exclusif au Liban de fournir aux consommateurs tous les services, garanties et garanties après-vente spécifiés par le fabricant. Le texte précise également que les agences exclusives ne s’appliquent pas aux produits alimentaires et pharmaceutiques, compléments alimentaires et fournitures médicales sans exception. 

À y voir de plus près cependant, grosse déception, ce texte ne pourra en effet rien changer dans la réalité puisqu’un acteur économique pourra contrôler jusqu’à 35% d’un segment de marché, comme le dénoncent à juste titre les associations de consommateurs locaux. Cette loi ne fait donc que protéger les acteurs déjà existants, puisqu’on est dans une situation d’oligopole avec essentiellement 3 grosses entreprises ou agences exclusives qui contrôlent de larges segments du marché, les autres étant des acteurs mineurs; une situation d’autant plus grave que le Liban importe 70% de ses besoins de l’étranger et qui préserve les intérêts des gros acteurs justement à l’origine de la situation d’abus des droits des consommateurs.

En pratique, ce taux de 35% permet la mise en place de barrière d’entrée sur les marchés, une politique déjà couramment mise en place sur certains segments par les agences exclusives actuelles, vidant ainsi de substance le texte et évitant la mise en place d’un marché libéral ou la libre-concurrence serait reine.

De plus, rien dans la loi n’est précisé concernant les ententes illicites concernant les prix des marchandises et services, ce qui amène à la situation de cartels comme on le constate déjà sur le marché local.

Et au final, rien ne changera, ce texte semblant ainsi maquiller avec des mesures cosmétiques des pratiques déjà courantes au Liban, comme s’il s’agissait simplement d’induire à la fois les libanais par une mesure populiste à la veille des élections législatives de mai 2022 mais aussi la communauté internationale puisqu’il s’agit d’une des exigences de réformes… dans l’erreur.

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