L’amant de Lady Gadot

391

Lorsque j’ai crié devant mes amis au scandale quand Ziad Itani a été arrêté, tous les copains m’ont regardé de travers. C’est vrai que je ne m’extasie pas devant les succès répétés de notre gouvernement depuis le cake de Meerab et l’anniversaire de Hariri, ni de son retour d’exil de son pays natal.

Rappelons-le, selon les informations divulguées un peu partout, Gal Gadot aurait payé 500$ par mois pour avoir des informations sur un député tellement notoire que j’en ai oublié le nom. D’après les rumeurs, Lady Gadot couchait avec Ziad qui, avec son physique attirant de prince du désert qui vient de terminer une traversée de trois mois sur dos de chameau et avec sa calvitie naissante et ses abdos cachés par cinq kilos de graisse, est un sacré coureur de jupons (va comprendre les femmes!). A ce prix-là, tu imagines, Ziad est un peu cher comme espion et la Gadot elle est vraiment cheap. Donc, économiquement, il y a maldonne.

Il faut comprendre les enquêteurs : le film Wonder Woman ayant été censuré, ils ne pouvaient pas reconnaître Lady Gadot dans les photos qui l’ont représentée comme l’espionne lascive qui a donné son corps à Ziad Itani en contrepartie d’informations hautement confidentielles qu’elle aurait pu tout simplement chercher sur Google ou Facebook. Oui, à l’ère des drones, du hacking informatique, du Big Data et des réseaux sociaux, la Lady Gadot a voulu faire dans le classique en couchant avec notre agent Malko local au teint basané, l’agent Zéro-Zéro-Sexe.

Quoi qu’il en soit, et pour le bonheur de la populace, Ziad Itani a tout avoué en décrivant en détail le tatouage secret de Lady Gadot et les positions du Kamasutra qu’elle préférait. Justice était faite, ou comme disent les américains « fucked up » (oui, je sais, pour la traduction, je suis très fort).

Le rideau est donc tombé sur Ziad Itani pour se re-ouvrir sur une scène non moins rocambolesque : Le ministre de l’intérieur a innocenté le don juan james-bondien en demandant au peuple libanais de s’excuser. Il n’a cependant pas donné les clefs de la cellule de Ziad au peuple Libanais, ce qui fait qu’il reste enfermé pour le moment en attendant que le peuple libanais dise « pardon ».

Quand même, si tu regardes bien, monsieur le ministre, le peuple libanais dans ce cas de figure, c’est Ziad Itani, et, si excuse il y a, tu as une jolie panoplie de ministres qui a au moins mille raisons de s’excuser. Rappelle-toi la guerre de la crise des déchets et les pauvres manifestants arrosés à l’eau et aux bombes lacrymogènes. Les bateaux centrales. Ramlet el bayda. L’économie déficiente. La corruption…

Trop forts nos ministres lorsqu’ils te sortent une perle avec la souplesse polito-diplomatique d’un troupeau d’éléphants en déroute. En effet, pour conclure le roman en beauté et, parce que le Liban est le pays de l’impossible possible, un nouveau chapitre s’ouvre dans le livre de l’amant de Lady Gadot, celui de Suzanne el Hajj, ancien Colonel en tête du département du Cybercrime des FSI. Suzanne el Hajj, grande experte du Cybercrime et du Cyberterrorisme, décorée à maintes reprises pour son intégrité et sa bravoure, aurait recruté un hacker amateur qui s’est non seulement trompé d’espionne israélienne, en choisissant une des stars les plus en vogue du moment, mais aussi de Ziad Itani. Il faut dire que, pendant que Ziad Itani pourrissait dans sa cage, personne n’avait pensé remonter à la source de l’information. C’est seulement quand le pauvre bougre a avoué son crime qu’on s’est intéressé à remonter le fil de l’information (va comprendre). Heureusement pour lui que, par un heureux concours de circonstances, ni le hacker, ni l’experte en Cybercrime n’avaient jamais entendu parler des VPN gratuits pour cacher leur traces de pas digitales.

Rappelons quand même que l’histoire tient la route : Dame Suzanne n’en est pas à son premier crime. Elle aurait – horreur! – liké une blague de Charbel Khalil sur Twitter avant de l’effacer rapidement. Catastrophe, le post critiquait l’Arabie Saoudite et Suzanne el Hajj a perdu toute couverture politique, devenant persona non grata dans toutes les soirées organisées par nos ministres toujours soucieux des relations diplomatiques et qui n’ont jamais critiqué le Royaume.

Oui, le ministre a raison. Il faut bien s’excuser, mais pas de Ziad Itani ou de sa fille et de sa femme. S’il faut s’excuser, entre les aveux et les désaveux, la culpabilité et l’innocence, c’est bien de Dame Justice, parce que, si partie de jambes en l’air il y a eu, c’est bien avec elle que l’acte a eu lieu.

Un commentaire?