Le président de la république, le Michel Aoun s’est rendu samedi à Dar al-Fatwa pour y rencontrer le mufti de la république, le Cheikh Abdul Latif Daryan et lui souligner l’importance politique de cette communauté religieuse au Liban.

S’exprimant devant les journalistes, le chef de l’état a indiqué avoir “souligné à Son Éminence l’importance du rôle que joue la chère communauté sunnite dans la préservation de l’unité et de la diversité politique du Liban, ainsi que l’importance de la participation avec le reste des composantes du Liban dans la vie nationale et politique et dans les moments qui dessinent l’avenir du Liban”.

Abordant le sujet du retrait de la vie politique de l’ancien premier ministre Saad Hariri, il a ainsi estimé ne pas souhaiter le retrait de la communauté politique alors que certains évoquent un boycott sunnite des prochaines élections législatives et que l’Arabie Saoudite oeuvrerait par ailleurs à la mise en place d’une opposition menée par Bahaa Hariri, le frère de Saad Hariri et par Samir Geagea, le dirigeant des Forces Libanaises.

“Nous ne voulons pas assister à un boycott (des élections), car le Liban perdrait l’une de ses principales composantes et cela menacerait la société à laquelle nous sommes habitués”, poursuit le chef de l’état, soulignant que tous les préparatifs nécessaires avaient été faits pour que les élections aient lieu en temps et en heure et ne voir aucune raison pour reporter ce scrutin.

Les discussions entre les 2 hommes auraient également porté sur les relations avec les pays arabes, relations à l’heure actuelles suspendues suite au retrait des ambassadeurs des pays membres du conseil de coopération du golfe qui ont part ailleurs également renvoyé les ambassadeurs du Liban en place chez eux.

“Nous avions des points de vue identiques sur la nécessité d’établir les relations les meilleures et les plus fermes avec eux, et que la priorité doit rester pour préserver la paix civile et la stabilité dans le pays”, estime le chef de l’état, indiquant que les efforrts portent actuellement pour que “les liens reviennent comme ils l’étaient et encore meilleurs”. Le chef de l’état faisait ainsi allusion à l’initiative koweitienne qui a circulé la semained dernière.

Pour rappel, les autorités libanaises auraient accepté la presque totalité de la feuille de route. La réponse libanaise note cependant que le gouvernement exprime les positions officielles du Liban et s’est engagé à respecter les résolutions internationales et notamment celles de l’ONU. Elle souligne cependant qu’il revient à la communauté internationale d’aider le Pays des Cèdres dans la mise en oeuvre de ces résolutions et indique que le Hezbollaht est un élémentiel au Liban.

Selon le texte koweitien qui a été remis à la troika, les pays arabes demandent la mise en place d’un calendrier précis pour la mise en œuvre des résolutions du Conseil de sécurité n° 1559 (2004) concernant le désarmement des milices au Liban, de la résolution n° 1680 (2006) concernant le soutien à la souveraineté et à l’indépendance politiques du Liban et le plein soutien à l’Union nationale libanaise. Dialogue, et Résolution 1701 (2006) sur les armes du Hezbollah et la région du Sud-Liban, selon le principe fondamental du contrôle de l’État sur la présence d’armes en dehors de l’autorité du gouvernement libanais. 
Les pays du Golfe exigent l’arrêt de toutes les activités des groupes opposés aux pays du Conseil de coopération et la poursuite de quiconque tenterait d’inciter ou de participer à la violence, qu’il soit citoyen ou résident au Liban, contre les gouvernements du Conseil de coopération du Golfe mais aussi la mise en place d’un système d’information sur la sécurité entre eux et le pays des cèdres. Concernant les trafics de drogue, ils demandent un audit des exportations libanaises via la présence d’observateurs bilatéraux pour s’assurer que les exportations sont exemptes de toute contrebande.

Les pays membres du conseil de coopération du golfe demandent aux autorités libanaises de tenir leurs engagements à ce que soient organisées les élections législatives de mai 2022 et présidentielles d’octobre 2022.

Une communauté religieuse au centre de toutes les convoitises pour les prochaines élections législatives entre enjeux locaux et régionaux

Bahaa Hariri. Capture d'écran de son allocution du 28 janvier 2022
Bahaa Hariri. Capture d’écran de son allocution du 28 janvier 2022

Depuis, les autorités saoudiennes auraient mis en place une commission au sein de leur représentation diplomatique au Liban en vue de préparer des candidats qui lui seraient favorables au sein de la communauté sunnite et une alliance avec les Forces Libanaises et le PSP de Walid Joumblatt. Hier déjà, le fils ainé de l’ancien premier ministre, Bahaa Hariri, proche du prince héritier Mohammed Ben Salmane, avait fait un premier pas vers une possible candidature.

l’Arabie saoudite est également considérée comme à l’origine de la décision du retrait politique de l’ancien premier ministre Saad Hariri, celui-ci ne pouvant bénéficier du financement de sa campagne électorale par le royaume saoudien lors du scrutin législatif qui devrait avoir lieu en mai prochain. Les relations entre Saad Hariri et Mohammed Ben Salmane s’étaient fortement dégradées, ce dernier n’étant pas satisfait de Saad Hariri pour son attitude modérée vis-à-vis du Hezbollah, Saad Hariri considérant de son côté que la paix civile prévalait au Liban. Ainsi, les différends entre les 2 hommes ont été officialisés lors du kidnapping de l’ancien premier ministre en novembre 2017, Saad Hariri ayant été même contraint d’annoncer sa démission depuis l’Arabie saoudite jusqu’à la médiation du président de la République Française qui a obtenu sa libération.

Quant à Bahaa Hariri, il s’était déjà fait connaitre par le passé en ayant adopté des positions plus marquées à l’égard du Hezbollah, s’alignant sur le positionnement politique de l’Arabie saoudite, notamment au sujet du conflit au Yémen contrairement à son frère cadet, dont l’attitude était considérée comme plus modérée. Ce positionnement avait cependant été marqué par la crainte de voir la scène politique devenir plus tendue.

“La petite famille du martyr Rafic Hariri, ainsi que sa grande famille, ne se sont pas, ne se désintégreront pas, et avec partenariat et solidarité, nous mènerons la bataille pour récupérer la patrie et restaurer la souveraineté du pays de ses occupants (…) et nous continuerons ce que nous avons appris de mon père, c’est que nous sommes un peuple de modération et non d’extrémisme, de reconstruction et non d’effondrement, de citoyenneté non de discrimination, de souveraineté non de dépendance, et du peuple de la profondeur arabe”, avait alors conclu le fils de l’ancien premier ministre Rafic Hariri.

Il s’agirait, pour Riyad, d’accorder ou non un parrainnage officiel du royaume à ces personnalités qui leur serait demandé d’avoir une vision politique compatible avec celles de l’Arabie Saoudite notamment dans son bras-de-fer avec l’Iran et le Hezbollah.

Cependant, la rue sunnite montrerait des signes de rebellion contre ce plan, beaucoup de sympathisants de l’ancien premier ministre Saad Hariri estimant que Samir Geagea avait trahi ce dernier. Ils rappellent également que Samir Geagea reste reconnu coupable de l’assassinat de l’ancien premier ministre Rachid Karamé, un crime pour lequel il n’a été qu’amnistié. Même si Bahaa Hariri se présente, il n’est pas certain de pouvoir ainsi récupérer les voix des sympathisants de son frère.

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