La loi électorale est sur le point de sortir ( !?) sauf modifications de dernière minute. Le libanais essaye d’y comprendre ce qui s’est passé. Une piste: Paul Walzawick (1921-2007) (théoricien de la communication) écrit dans son essai “Comment réussir à échouer (trouver l’ultrasolution)» (1988). L’ultrasolution, un terme qu’il a inventé pour “définir les solutions qui se débarrassent non seulement du problème mais aussi de tout le reste”. C’est aussi une solution à somme nulle avec des gagnants et des perdants pour finir avec une solution moins valable que l’initiale. Pour la loi électorale : Les négociations et le problème posé étaient faux et l’impasse dans laquelle le pays et le système sont passés en est une bonne preuve.
Récapitulatif
Les libanais ont fini par occulter tous les griefs qu’ils sont censés avoir contre la loi électorale de 1960 (et ses applications hybrides depuis 1992: représentativité des citoyens chrétiens, quelles confessions élisent des candidats de quelles autres, le déséquilibre démographique qui mine la parité 50/50, l’ajout de 20 députés aux 108 distribués sur des bases circonstancielles et la chambre des sénateurs Tous à la base des arguments recevables, mais dans la pratique les propositions mises en avant sont des ultrasolutions: proportionnelle (avec détails et mode de fonctionnement à géométrie variable), grandes/moyennes circonscriptions, voix préférentielles (quoi qu’il en soit), basées sur des considérations douteuses, qui reposeraient les mêmes problèmes aux prochaines échéances. Les lois discutées, en fait une façon déguisée d’écarter les candidats indépendants qui voudraient assumer leur responsabilités et d’acculer les ambitieux à courtiser les grands partis, à s’engager à suivre les instructions, ou à payer leur place sur la listes (Les listes sans donner le choix du panachage et vraiment choisir). En finale : Un système mieux verrouillé et plus pernicieux.
Quand une solution n’est pas basée sur des principes clairs, elle n’est pas soutenable. Quand une solution est basée sur des bricolages de dernière minute négociés en secret, ce n’est pas de bon augure.
Rappel
Ce que les électeurs libanais cherchent dans une loi électorale est la représentativité de leurs aspirations, une convergence de leurs droits et la possibilité de demander des comptes à leurs élus et de les changer quand ils trouvent d’autres candidats plus compétents pour remettre en question les pratiques actuelles.
Une solution simple que les électeurs peuvent comprendre
La loi électorale qui résout une grande partie des problèmes posés et peut régénérer la classe politique démocratiquement et enfin découpler la politique du confessionnel est simple:
A partir des 26 circonscriptions actuelles les diviser pour avoir dans chacune 2, 3 ou 4 députés et avoir 42 circonscriptions pour 128 députés: par exemple Chouf 1, Chouf 2: 4+4, Beyrouth 1, à Beyrouth 6 pour 19 députés), Baalbak/Hermel 3 circonscriptions pour 10 députés (3+3+4) le redécoupage est simple: 7 à 2 députés, 26 à 3 députés et 9 à 4 députés. Par Mouhafazat : Beyrouth de 3 à 6 circonscriptions, Bekaa de 3 à 7, Mont-Liban de 6 à 11, Nord-Liban de 7 à 10 et Sud-Liban de 7 à 8.
Implications
Le redécoupage donne une quasi égalité des circonscriptions en nombre de députés; Une mitigation de l’effet des gros blocs et où toutes les voix comptent: les grands partis doivent s’allier avec les notables locaux et trouver une convergence entre le programme national et les considérations locales.
Ceci donne une démocratie plus saine et une dynamique de renouvellement de la classe politique où une obligation de faire ses preuves pour continuer…
Il faut éviter le charcutage électoral en utilisant des règles simples de continuité géographique et historique et de distribution démographique.
Une loi intégrée
Il faudra inclure 4 mesures simples pour avoir une loi saine: Introduire la bulletin de vote standardisé disponible le jour de l’élection où les noms de tous les candidats formellement acceptés figurent et rejeter les bulletins “marqués” qui facilitent l’identification des électeurs récalcitrants (déjà incluse dans le projet de loi, un grand progrès sans doute). L’application de la carte magnétique sous des aspects tous louable est une ultrasolution (comme son ancetre la carte électorale). Pour le comptage, protéger la confidentialité des électeurs en regroupant le comptage des urnes. Il est critique de permettre aux non-résidents de voter à travers les consulats ou les ambassades. Garder l’élection simple à un seul tour avec majorité relative et que le meilleur gagne en toute transparence. Une articulation plus détaillée découlant des mêmes principes est simple à formuler.
Nous sommes dans une situation d’impasse artificielle très malsaine (déjà, avant de voter la loi, les uns et les autres parlent de modifications pour la rendre plus acceptable et les libanais commence a suspecter un jeu de dupes).
En tant que citoyens il faut recadrer le débat et reconnaître qu’il y a toujours des solutions viables sans vouloir trouver l’ultrasolution.
Nagy Rizk est libanais, il a une formation d’ingénieur (AUB) et dans les Affaires (INSEAD). Il est dirigeant d’entreprises au Liban. Il a une longue experience de consultant en stratégie et business development dans la region MENA.