Burkini en terre laïque et String en terre musulmane ?

1234

Sous le signe de la « Tolérance », Burkini en terre laïque et String en terre musulmane ?

De l’audace, il en faut pour faire mâcher les mots. Un titre choc pour certains permet de pointer du doigt ce qui est tolérable pour les uns et intolérables pour les autres ; sous le signe du choc des cultures, certains messages trouveront bien leur places, au moins je l’espère…

D’un pays à un autre et d’une plage à une autre, c’est la culture locale qu’il faudra respecter avant tout autre amalgame. Comprendre les restrictions vestimentaires d’un pays fait partie des convictions de respect à la terre d’accueil sur laquelle nous vivons. Qu’on soit en terre Sainte, en terre d’Islam ou en Occident et plus spécifiquement en terre « laïque », les signes vestimentaires ont leur code d’adhésion à la société à laquelle on appartient.

L’affaire du Burkini en France, qu’on désigne déjà comme «le  feuilleton d’été » est loin d’être anodine… Des critiques s’élèvent contre l’interdiction de certaines plages en France ayant interdit le port du Burkini considéré comme tenue ostentatoire… En dépit du fait que certains le considère comme un pas en avant, ses partisans seraient-ils pour le port du string sur les plages en Arabie, en Iran, au Maroc, ou ailleurs  sur toute autre terre où la tolérance est régie par la religion d’Etat ?  Un Français vivant à l’étranger peut-il imposer son string de plage sur une plage, ou son décolleté dans un pays musulman sans se heurter aux mœurs locales?

Plusieurs enseignes privées partout dans le monde, imposent le port d’un maillot de bain conforme à leur réglementation  pour accéder à leurs plages et piscines ; le Maroc n’a-t-il pas interdit récemment  le port du Burkini sur ses plages privées ? Dans certains pays, on va plus loin, au Liban par exemple, on interdit même aux employées de maisons et aux gens de couleurs, l’accès aux plages privées, n’est-ce pas vrai ? Pourquoi alors ce tollé de certaines presses libanaises qui polémiquent sur l’affaire du port du Burkini sur nos plages françaises ? A-t-on bien pris en compte la culture locale du pays avec ses principes fondamentaux d’un Etat laïque ?

Comparer l’incomparable est le comble de certains qui se croient cerner les problématiques d’une société étrangère à la leur. Prendre en compte la culture locale est le principe de base pour toute communication hors polémique … Tolérer l’autre commence par une compréhension de la culture et l’entité d’un Etat avec ses Us et Coutumes.

Utiliser la photo des “Soeurs Chrétiennes” trempant leurs pieds au bord de la mer, en réponse et soutien au Burkini comme l’a fait le journal An-nahar ne me laisse pas indifférente. Au contraire, choquée de cette comparaison, je pointe du doigt l’ignorance ou l’absence de prise en compte d’un élément essentiel, celui de la culture locale de notre société française qui fait face à des problématiques que seul un citoyen français, serait en mesure de comprendre.
J’invite ces gens de la plume à reprendre le problème dans son ensemble.

Non ! Il ne s’agit pas d’une simple affaire de tissu. Il s’agit de nos respects à cette terre d’accueil où plusieurs d’entre nous avaient quitté leur pays d’origine pour venir trouver refuge au pays des droits de l’homme et ce qui va avec pour la dignité humaine et les droits accordés aux femmes. Comme partout, il y a ceux qui ont su profiter du système pour s’intégrer et réussir et ceux qui ont su détourner les lois et les aides pour leur propres intérêts. En France, les citoyens vivent et profitent d’un système d’aide et de répartition basé sur nos impôts de citoyens… Plusieurs en profitent bien jusqu’au détournement des lois les plus sociales… Peut-on me dire dans quel pays arabe, il y a ce système d’aide social offert par la France du contribuable à ses citoyens ?

Vouloir imposer un mode de vie autre que celui qu’on a tous connus est une atteinte à la France… Les plages françaises sont des plages publiques entretenues par l’Etat aux frais du contribuable et ces plages doivent rester à l’image de la France…

Nul besoin du Burkini sur nos plages, les pudiques enfilaient déjà des combinaisons de baignade avec bonnet… Pouvons-nous parler d’une invention quand il s’agit d’une étoffe, comme son nom l’indique, faisant référence à la Burka ?  « Comment ne pas voir que le surgissement de cette question du burkini vient s’ajouter à la longue liste des attaques répétées contre l’indifférenciation et à l’affirmation d’une visibilité radicalement différente. » Ne s’agit-il pas d’une suite à ces « petites dérogations » déjà acquises ? Allons-nous aussi exiger des maîtres nageuses femmes pour venir au secours de ces femmes en Burkini par respect à leurs convictions et parce qu’un homme maître nageur ne pourra pas les toucher ?  Et pourquoi ce Burkini s’imposerait sur nos plages au moment où la France a vécu cette année ses attentats les plus lourds ? N’y aurait-il pas une provocation à une population en crise face au choc et aux menaces qu’elle subit ?

Certes les musulmans de France sont la 2e communauté religieuse, après les Chrétiens. N’avions-pas interdit dans les lieux publics les crèches de Noël ? Et Le sapin de la cathédrale de Notre Dame à Paris, cette année, quelqu’un s’en souvient ? Nous vivons dans un Etat laïque avec le respect de chaque citoyen, la religion n’est pas la base de notre Etat en France. « En France, une norme sociale demande une certaine discrétion dans l’expression publique de ce qui met à part rang social, convictions politiques ou religieuses. On a là un élément essentiel de la paix sociale. Il ne s’agit pas d’une stricte neutralité, telle celle qui est associée à une vision radicale de la laïcité, mais d’une forme de modération – ne pas provoquer. Le chrétien le plus convaincu et qui n’en fait pas mystère n’aurait pas idée de coudre sur ses vêtements la croix des croisés. Ne pas respecter cette norme, c’est refuser de participer à un monde commun. »

Chaque pays a ses habitudes vestimentaires et ses traditions à respecter.
Respectons alors celles de la France sans vouloir modifier son paysage de mixité.
La France appartient à ses citoyens tous égaux et la plage est un lieu public qui doit rester à l’abri… Personnes n’interdit une femme musulmane de se baigner et dans les boutiques françaises dédiées au sport, on trouve tous les accessoires nécessaires pour se baigner pudiquement et s’intégrer à la masse.

 « Mettre en avant la liberté souveraine de chaque individu pour étendre l’usage d’un instrument de contrôle social ne peut que décrédibiliser ceux qui jouent ainsi sur les mots. Le projet de société associé au port de la tenue islamique a déjà conquis une partie non négligeable du territoire. Un nouvel épisode se joue maintenant autour du « burkini ». La résistance sera-t-elle suffisante avant qu’il ne soit trop tard ? [ Philippe d’Iribarne, L’islam devant la démocratie, Gallimard, 2013.]

Par Jinane Chaker-Sultani Milelli

Jinane Chaker Sultani Milelli
Jinane Chaker-Sultani Milelli est une éditrice et auteur franco-libanaise. Née à Beyrouth, Jinane Chaker-Sultani Milelli a fait ses études supérieures en France. Sociologue de formation [pédagogie et sciences de l’éducation] et titulaire d’un doctorat PHD [janvier 1990], en Anthropologie, Ethnologie politique et Sciences des Religions, elle s’oriente vers le management stratégique des ressources humaines [diplôme d’ingénieur et doctorat 3e cycle en 1994] puis s’affirme dans la méthodologie de prise de décision en management par construction de projet [1998].

2 COMMENTAIRES

    • Je trouve pourtant que ce qu’elle dit est cohérent. Non seulement humilier ces femmes avec cette tenue vestimentaire est contraire au progrès de la société, aux droits de la femme durement acquis, mais aussi, ça choque les autochtones qui ne demandent qu’une chose: qu’on respecte leurs us et coutumes. Je comprends aussi très bien qu’on ne se promène pas les seins à l’air en Arabie Saoudite si ça choque, et je respecte le lieu où je vais en me comportant convenablement.

Un commentaire?