Le Logo du Fonds Monétaire International (FMI)
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Certaines sources proches du Fonds Monétaire Internationale ont indiqué que le plan présenté par le gouvernement libanais serait insuffisant. En cause, l’absence d’un calendrier pour la mise en place des réformes nécessaires pour sauver l’économie libanaise, confrontée à la plus grave crise de son histoire.

Les négociations ont débuté mercredi dernier, via vidéoconférence, COVID-19 oblige, en présence de représentants de la Présidence de la République, du Premier Ministre, du Ministère des Finances mais aussi de la banque du Liban et de l’association des banques du Liban.

Pour rappel, les autorités libanaises ont annoncé un état de défaut de paiement, début mars, alors que la dette libanaise a atteint la somme record de 92 milliards de dollars et que le PIB pourrait reculer de 55 millards de dollars en 2018 à 34 milliards de dollars en 2020. La récession économique qui touche le Liban pourrait atteindre 12%, estimait la Banque Mondiale déjà avant la crise du coronavirus COVID-19 et les mesures de confinement décidées pour éviter l’extension de la pandémie au Liban. Plus de 60% de la population vivrait actuellement en-dessous du seul de pauvreté soit avec moins de 6 dollars par jours.

Les autorités libanaises avaient déjà promis d’importantes réformes économiques et monétaires dès le début des années 2000 dans le cadre des conférences PARIS I, PARIS II et PARIS III ainsi que lors de celle de CEDRE en avril 2018. Cependant, ces réformes et notamment la privatisation de certaines entités n’ont jamais été effectuées.

La communauté internationale exigerait ainsi un calendrier clair de mise en oeuvre des réformes et notamment dans les secteurs financiers, administratifs et structurels, plus particulièrement dans celui de la production d’électricité publique, subventionnée à hauteur de 2 milliards de dollars. En cause, les exigences de certains hommes politiques et les difficultés à mettre en place un tel calendrier en raison du fonctionnement sectaire et confessionnel du pays sur lequel s’est greffé une importante corruption des administrations publiques.

Des demandes avec l’objectif que l’aide échappe au contrôle international

Certaines personnes souhaiteraient ainsi qu’une partie de l’aide demandée, 10 milliards de dollars pour le FMI seulement, puisse échapper aux conditions liées aux contrôles financiers et aux réformes qui pourraient réduire leurs influences politiques.

D’autres estiment aussi que les réformes du plan de sauvetage seraient trop floues et vagues donc non contraignantes. le FMI pourrait alors exiger une nouvelle version du plan de sauvetage prenant en compte ces remarques.

Ces informations interviennent alors que les autorités libanaises se montrent pourtant optimistes quant au déroulement des négociations avec le FMI.

Des divergences au sein du camp libanais

Par ailleurs, les divergences entre les pôles politiques, les différents partis politiques, mais aussi avec les responsables monétaires publics et privés pourraient également nuire à la partie libanaise. Certains dirigeants économiques et politiques pourraient tenter de mettre des bâtons dans les roues du gouvernement libanais, comme par exemple l’Association des Banques du Liban (ABL) qui souhaite présenter son propre plan de sauvetage.

L’ABL, qui avait unilatéralement instauré un contrôle des capitaux dès novembre 2019, aggravant ainsi la crise économique induite par un recul de l’activité, est en effet opposée à la restructuration du secteur bancaire privé. Celui ci prévoit un Wipe-Out des actionnaires existants des banques libanaise qui seraient alors remplacés par une contribution exceptionnelle des plus grands déposants. Il s’agit de sauver le système bancaire privé confronté à des pertes pouvant atteindre jusqu’à 100 milliards de dollars, estiment certains experts, une somme impossible à couvrir pour les autorités libanaises en cas de faillite des banques. Les dirigeants des banques privées sont sujets à de nombreuses critiques pour ne pas avoir su diversifier plus les portefeuilles qu’ils gèrent, les exposant de facto à un possible état de défaut de paiement.

Ces derniers répliquent, accusent l’état de ne pas avoir conduit les réformes nécessaires au sein du secteur public, alors que 70% des dépôts des banques étaient ainsi investis en obligations libanaises à des taux élevés.

Face au plan de sauvetage du gouvernement, l’opposition des banques s’organise

Cela faisait déjà depuis quelques temps, que les tensions entre gouvernement Hassan Diab et gouverneur de la BDL montaient. Aussi, déjà avant la détérioration de la parité de la monnaie locale face au billet vert, la BDL était régulièrement accusée de manquer à ses obligations quant au financement de biens pourtant essentiels comme les médicaments.

La semaine dernière a été marquée par la mise en examen d’un haut responsable de la Banque du Liban, Mazen Hamdan, le directeur en charge des opérations monétaires, alors que la Banque du Liban est déjà fortement critiquée pour son incapacité à mieux contrôler la parité entre livre libanaise et dollar. Mazen Hamdan a été accusé par le Président du Syndicat des agents de change d’avoir fait acheter d’importantes quantités de devises étrangères afin de provoquer un affaiblissement de la livre libanaise. Il aurait également directement mis en cause le gouverneur de la BDL lui-même, indique le quotidien Al Akhbar.

Ce lundi alors que Mazen Hamdan était officiellement inculpé, la nouvelle a été quelque peu éclipsée par la plainte du gouverneur de la Banque du Liban contre la journaliste Dima Sadek, concernant des révélations dont elle a été l’auteur, il y a déjà 2 mois. Elle avait alors accusée Riad Salamé, son frère mais également sa proche collaboratrice Marianne Hoayek de détenir plusieurs comptes en banque dans des paradis fiscaux et cela pour plusieurs centaines de millions de dollars. Peut-être s’agissait d’une coïncidence… mais curieuse coïncidence tout de même.

Par ailleurs, se multiplient les articles sur “un coup d’état du Hezbollah contre le système bancaire”. Pourtant, le mouvement chiite est loin d’être impliqué dans le système bancaire en raison des sanctions américaines qui l’ont paradoxalement immunisés. Selon certaines sources, certains intérêts – et notamment bancaires – mèneraient actuellement un lobbying intense pour utiliser l’épouvantail Hezbollah contre le plan Hassan Diab. Coïncidence aussi, ces articles paraissent alors que le système bancaire est mis en cause cette semaine lors du round 2 des négociations.

Tant les actionnaires des banques privées que la Banque du Liban font l’objet d’un projet de restructuration important. Le gouvernement prévoit en effet un approvisionnement à la totalité du capital des actionnaires qui seraient ainsi mis à l’écart et leurs remplacements par les plus gros déposants. Il s’agit, pour les autorités, d’éviter le scénario d’un haircut, le 3ème scénario, étant celui d’une perte totale.

Des coïncidences un peu trop nombreuses en ce court laps de temps que cela soit en fin de compte bien fortuit….

Mais un échec couteux si les négociations avec le FMI échouent

La situation internationale et notamment celle des pays arabes et leurs situation financière n’incite pas à l’optimisme. Entre effondrement des cours du pétrole, des déficits budgétaires qui se creusent, notamment pour l’Arabie Saoudite qui a décidé d’augmenter la TVA imposée sur sa population, il est très improbable de pouvoir compter sur une aide bilatérale.

Le Liban ne pourra donc que compter sur lui-même mais il n’en a plus les moyens.

En cas d’échec des négociations avec le FMI, l’alternative serait couteuse, avec une perte totale des dépôts bancaires ou encore une dévaluation incontrôlée de la livre libanaise, l’état n’étant pas en mesure de sauver une seule banque libanaise même la plus petite aujourd’hui. Des troubles socio-économiques, de véritables émeutes de la faim pourraient alors se produire…. comme le notent diverses agences internationales qui estiment la situation libanaise de plus en plus risquée.

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