Preuve de l’urgence de la situation économique libanaise confrontée à un risque de défaut et de dévaluation de la Livre Libanaise, l’Agence de Notation Moody’s a dégradé, une nouvelle fois, les notes attribuées aux obligations libanaises.

Selon le communiqué

Le déclassement en Caa2 reflète la probabilité accrue d’un rééchelonnement de la dette ou d’un autre exercice de gestion du passif qui pourrait constituer un défaut au sens de la définition de Moody’s depuis l’ouverture de la révision en vue de la dégradation des notations Caa1 début octobre. Les protestations sociales généralisées, la démission du gouvernement et la perte de confiance des investisseurs ont également sapé le modèle de financement traditionnel du Liban fondé sur les entrées de capitaux et la croissance des dépôts bancaires, menaçant la viabilité de l’ancrage et la stabilité macroéconomique.

La période considérée permettra à l’agence de notation d’évaluer la probabilité d’un scénario de restructuration de la dette susceptible d’entraîner des pertes plus importantes pour les investisseurs privés que ce qui est compatible avec une notation Caa2.

Moody’s devrait achever cet examen dans un délai de trois mois.

Moody’s a également abaissé la notation du programme à moyen terme de billets à moyen terme non garantis du Liban à (P) Caa2 de (P) Caa1 et a confirmé la notation à court terme de (P) NP. La note (P) Caa2 est également en cours de révision pour dégradation.

Les plafonds à long terme des obligations et des dépôts en devises du Liban ont été abaissés à Caa1 et Caa3, respectivement. Les plafonds des obligations et des dépôts à long terme libellés en monnaie locale ont été ramenés à B2. Les plafonds d’obligations et de dépôts en devises étrangères à court terme demeurent non prioritaires.

Ainsi, la nouvelle note obligataire est passée de Caa1 (Risque élevé) à Caa2, Ultra spéculatif, toutes 2 des notes attribuées aux obligations de très mauvaise qualité, sous surveillance négative.
Pour rappel, l’agence avait déjà dégradé le Liban en janvier 2019.

Lien vers le site de Moody’s (en anglais)
Moody’s downgrades Lebanon’s rating to Caa2, maintains review for downgrade

Cette dégradation intervient alors qu’une étude a estimé à 29% les risques de défaut de paiement du Liban, d’ici 1 an et 59% d’ici 5 ans.

Certains estiment que le Pays des Cèdres se trouve déjà en situation de défaut, les dernières obligations arrivées à maturité en mai ayant été remboursées par la Banque du Liban (BDL) et non le Ministère des Finances. Le Liban fait également face aux remboursements de 1.5 milliards de dollars d’obligations en novembre ainsi qu’à 500 millions de dollars d’intérêts de la dette publique. Une autre tranche d’obligations viendra a maturité en mars.

Face à la situation actuelle et notamment les manifestations qui se poursuivent pour la 20ème journée, le gouvernement semble avoir renoncé à l’émission de 2 milliards de dollars initialement prévue pour y faire face.

Pour rappel, Moody’s estimait déjà intenable les promesses du gouvernement de maintenir la parité et semblait déjà sceptique quant au plan de réformes économiques présentés par le Premier Ministre sortant Saad Hariri. Ainsi dans un rapport publié en Juin 2019, l’agence estimait probable une restructuration de la dette publique, ce que refusent pour le moment tant le Ministère des Finances que la Banque du Liban (BDL), alors que celle-ci atteint 150% du PIB, un des taux les plus élevés au Monde.

Toujours selon Moody’s, « en dépit de l’inclusion de mesures d’austérité budgétaire dans le projet de budget 2019, le ralentissement des entrées de capitaux et la croissance plus faible des dépôts augmentent le risque que le gouvernement inclue un rééchelonnement de la dette ou un autre exercice de gestion du passif pouvant constituer un défaut selon notre définition. » 

Cette situation s’est encore dégradée par la baisse de 4.4% des réserves monétaires de la Banque du Liban en octobre, comme annoncée aujourd’hui.

Cette nouvelle dégradation ne devrait pas faciliter la tâche des autorités publiques dans la levée de fonds, rendant les intérêts de nouvelles émissions plus élevés.

Pour rappel

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