Dalati Ministerial Council Lebanon

Une nouvelle réunion du conseil des ministres a débuté ce vendredi 28 janvier en vue d’examiner le budget 2022. Si pour l’heure, aucune nouvelle taxe n’a été décidée, certaines dispositions comme le relèvement du dollar douanier ont déjà été adoptées. Ainsi celui-ci devrait s’aligner sur le taux de la plateforme électronique de la Banque du Liban Sayrafa, induisant une augmentation moyenne de 25% des prix des marchandises importées et donc une nouvelle vague d’inflation au Liban après celle déjà subie par la population suite à la dégradation du taux de parité de la monnaie locale face au dollar au marché noir.

D’autres hausses pourraient être prévues, comme celles concernant le coût des télécoms tant publics que privés mais également surtout de l’électricité publique. Le ministre de l’énergie Walid Fayyad s’est ainsi prononcé en faveur de la hausse des tarifs de l’EDL au détriment d’une avance du trésor public, cela afin de permettre l’achat de fioul et ainsi relancer la production locale d’électricité et réduire les pénuries actuelles. Cette hausse des tarifs constitue également l’une des exigences de la Banque Mondiale afin de fournir les prêts nécessaires à l’achat de gaz égyptien et d’électricité en provenance de la Jordanie.

S’il était initialement prévu d’adopter le budget 2022 ce vendredi, le vote du conseil des ministres a déjà été repoussé demain, cela afin de permettre la poursuite des discussions.

L’adoption de ce budget et surtout la question du déficit budgétaire prévu est scruté par les instances internationales et plus particulièrement par le FMI avec qui le Liban a débuté des négociations en espérant pouvoir débloquer 3 à 4 milliards de dollars d’aide face à la crise économique qu’il traverse actuellement, une somme jugée insuffisante par rapport à celle espérée par le précédent gouvernement qui tablait sur une aide de 10 milliards de dollars. En cause, le gouvernement actuel considère les pertes du secteur bancaire moins importantes que le gouvernement précédent, induisant une baisse également de l’ampleur de la restructuration du secteur bancaire pourtant nécessaire.

Et après le budget 2022, l’épineuse question de la restructuration de la dette publique et du système bancaire reste sur la table

Cette information intervient alors que parallèlement, le ministre des finances Youssef Khalil s’est déclaré contre la fermeture d’un grand nombre d’établissements bancaires hier soir sur les ondes de la MTV Lebanon, tout en reconnaissant un manque de confiance envers la structure bancaire actuelle de la part de la population mais également de la diaspora.

Ainsi si la dette publique serait sur le point de dépasser 100 milliards de dollars à hauteur du taux de change officiel de 1507 LL/USD, elle ne serait plus estimée que d’un peu plus de 40 milliards de dollar sur base du taux de change au marché noir. Cependant, parallèlement le PIB libanais est passé de 55 milliards de dollars en 2018 à 21 milliards de dollars seulement en 2021, un recul qui induit un ratio de la Dette Publique/PIB qui a continué à se détériorer.

Ces propos contrastent avec les mesures préconisées par les experts concernant la restructuration du secteur bancaire, notant que seules 5 à 6 établissements pourraient survivre en raison des pertes accumulées mais également par rapport aux demandes des instances internationales qui pourraient accorder une aide économique au Liban, confronté à l’une des plus graves crises économiques depuis la moitié du XIXème siècle, selon les auteurs d’un rapport de la Banque Mondiale.

Par ailleurs, ces propos interviennent également alors que les répartitions des pertes financières du secteur bancaire auraient été révéles. L’Etat, dont de nombreux responsables politiques sont actionnaires de banques comme le premier ministre lui-même, envisagerait de faire porter 55% de ces pertes aux déposants, contre seulement 19% aux actionnaires alors que 46% des actionnaires seraient impliqués sur la scène politique, induisant un conflit d’intérêt. Le premier ministre lui-même d’ailleurs serait l’un des plus importants actionnaires d’une banque locale, alors que le ministre des finances, Youssef Khalil n’est autre que l’ancien responsable des opérations financières de la Banque du Liban, considérée comme responsables, par les opérations d’ingénierie financière menées entre 2016 et 2018, de la crise de ce secteur.

Ainsi, les pertes du secteur bancaire actuellement estimées à 69 milliards de dollars sont moindre par rapport aux estimations du précédent gouvernement soit 83 milliards de dollars en 2021, estimations proches de celles du FMI. Quant aux agences de notations, certaines estiment les pertes proches de 103 milliards de dollars. Si restructuration il y a sans qu’elle puisse être suffisante, les spécialistes craignent que la situation financière du Liban ne puisse rapidement s’améliorer, prolongeant d’autant d’années la crise économique.

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