Des déposants libanais et une association suisse ont porté plainte auprès de l’autorité de surveillance financière suisse contre 3 banques dont les filiales helvétiques de la Banque Audi et de la Bank Med ainsi contre la Banque Julius Baer. Selon le texte de la plainte, 500 millions de dollars auraient ainsi transité via ses établissements au bénéfice du gouverneur de la Banque du Liban Riad Salamé et de ses proches.

Cette plainte intervient alors que de nouveaux documents révélés par l’agence de presse Reuters concernant le dossier Forry Estate, entreprise appartenant au frère de Riad Salamé.

Selon les termes du contrat, Forry Estate recevait ainsi une commission des 3/8ème des 1% commissions sur l’achat des certificats de dépôts de l’état via la Banque du Liban par les banques privées entre 2004 et 2014. Ces montants qui atteignaient ainsi ensuite plusieurs millions de dollars étaient reversés et redistribués, selon les aveux même de Riad Salamé, en connaissance de la commission centrale de la Banque du Liban.

Cependant, le contrat signé par la Banque du Liban avec les banques locales ne stipule pas le nom de Forry Associates, ce qui amène les experts judiciaires à s’interroger sur les versements effectués au bénéfice de cette entreprise et transférés en connaissance de cause par 6 banques locales à l’étranger.

Il s’agit désormais de déterminer les rôles de ces établissements et de ces proches dans des transferts qui sont dérivés de la corruption, note la plainte.

Pour rappel, le gouverneur de la Banque du Liban est arrivé dans les valises de l’ancien premier ministre Rafic Hariri en 1993. Il était précédemment son chargé de compte à la Merril Lynch. Considéré comme proche de nombreux hommes politiques, il jouirait de leur soutien tout comme celui des Etats-unis, alors que 6 pays ont ouvert des enquêtes à son encontre.

Ces dernières semaines ont ainsi été marquées par la publication par la procureur du Mont Liban d’un mandat d’amené visant Riad Salamé dans le cadre d’une enquête pour manipulation du cours de la livre libanaise. Ce mandat n’a pas été exécuté après que les forces de sécurité intérieure dirigées par le général Othman, proche de Saad Hariri, aient protégé celui-ci face aux membres de la sécurité de l’état venu l’arrêter.

Par ailleurs, des dirigeants de banques locales auraient menacé de fermer leurs établissements et de quitter le Liban en cas d’arrestation de Riad Salamé.

Les autorités européennes et notamment allemandes estiment ainsi que la fortune du gouverneur de la Banque du Liban dépasse désormais les limites d’un enrichissement naturel depuis sa nomination par l’ancien premier ministre Rafic Hariri en 1993, amenant de facto à des suspicions de détournements de fonds vu la nature des placements.

Si l’enquête progresse à l’étranger avec des perquisitions menées notamment en France, au niveau local, le juge d’instruction Jean Tannous ferait face à de nombreuses difficultés. Six banques libanaises, la Banque Audi, la Banque Med, la SGBL, la Banque Al Mawarid, la Banque Saradar, la BML, font notamment l’objet d’une demande d’information de celui-ci concernant des transferts suspects des comptes du gouverneur de la Banque du Liban qui agit lui-même à la demande des enquêteurs suisses, français et luxembourgeois. Cependant, elles se retranchent derrière le secret bancaire, qui ne serait pas pourtant valide en cas d’accusation de détournements de fonds.

Le procureur de la république, le juge Ghassan Oweidat, aurait refusé d’autoriser le juge Jean Tannous et son collègue Raja Hamouche, pourtant son représentant, à se rendre ce lundi à Paris comme annoncé le 21 janvier dernier dans le cadre d’une réunion de concertation et d’échange d’informations concernant le dossier.

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