On vit depuis des siècles dans un Islam travesti transmis, depuis le deuxième siècle, aux travers d’une herméneutique (ta’ouil) ancienne, de déviations de versets, de négligence des contextes, de hadiths douteux, mais aussi de tromperies sur plusieurs questions dont celle du «kofr» (hérésie) et du «haram/hallal» (illicite/licite). Ceci a conduit vers un Islam «parallèle» déroutant souvent meurtrier, destructeur, “ex communicateur”, inhumain en contradiction avec l’Islam du Coran ainsi qu’avec les faits et gestes authentiques du Prophète (Qssl) qualifié, par le Coran, d’une «moralité éminente» (inaka lâala kholoqin âdhim) !

Un Islam que se sont approprié une “armée de religieux”, devenus ‘autocrates’, par des subterfuges rendant leurs interprétations, leurs fikh (avis juridique religieux) et leurs règles moribondes incontestables. Dans ces stratagèmes on relève les plus usités: «moutafak âlayhi» (convenu, en fait entre 02 personnes Al Boukhari et Muslim) ; «bil ijmâa» (par consensus, en fait les chouyoukh des quatre Doctrines ‘madhahib’) ; «kouroun moufadhala» (les trois ‘meilleurs’ 1er siècles) ; «ahl edhikr» (en fait, les incontournables chouyoukh) ; «eddine bil nakl oua la bilfikr» (la religion s’adopte sans réflexion) et ce, pour empêcher toute discussion, tout esprit critique afin de laisser les croyants dépendants, toute leur vie, de leur bon vouloir à la faveur de l’hermétisme du Texte sacré !

Tout cela, transmis par les livres religieux anciens (tourath eddini) et relayés depuis l’époque Omeyade et Abbasside (soit près de 600 ans) jusqu’à nos jours ; sans possibilités d’autres interprétations ou d’innovation, encore moins une remise en cause des contenus ! Les esprits ayant tenté cela, avaient subi les persécutions ou le martyr que l’Histoire a rapporté.

C’est parce qu’on a consacré, exalté les auteurs et leurs livres – même dans l’erreur – d’il y a 13/14 siècles que les sociétés musulmanes sont ce qu’elles sont aujourd’hui ; des peuplades dans un état marqué par l’arriération de la pensée et des conditions de vie, jusqu’à se pourrir la vie depuis des siècles, pensant détenir chacun la vérité en prétendant défendre la religion sacrée et…Dieu ! On érige alors des législations d’inspiration religieuse, disent-ils, baptisées «charia», afin de piloter la vie du musulman dans ses moindres faits et gestes quotidiens…jusqu’à sa mort !

Cependant, dès que la «lumière» du modernisme et de désaliénation rayonna, des esprits d’arrière-garde, «gardiens du Temple», se déclarant érudits religieux, crient «à l’égarement», voire à «l’hérésie» en s’opposant à toute innovation qui pourrait remettre en cause les us, coutumes et pensées des «salafs» (anciens) ! D’où les conflits, les régressions et les violences passées et actuelles du monde musulman.

Est-il pensable, logique et raisonnable que l’on puisse calquer les faits, gestes et pensées des sociétés bédouines de la péninsule arabique du 6ème siècle sur celles du monde «numérique» et «nucléaire» du 21ème siècle et suivants ? Ce serait nier, alors, l’universalité du Coran, toutes les cultures, tous les peuples, toutes les langues, tous les progrès scientifiques, techniques et philosophiques qui, en fin de compte, sont et restent une création de Dieu consacrés dans le Livre Saint !

La «charia» n’est autre qu’une “invention” des foukaha (juristes musulmans) – après la mort du Prophète – durant les 3 premiers siècles qualifiés (par les foukaha eux-mêmes) de «qouroun el moufadhala» (voir plus haut), pour imposer leurs savoirs, leurs interprétations, leur pouvoir et autant assouvir leurs fantaisies.

Pour eux, par exemple, bien que n’ayant presque plus cours, épouser une fillette de 9 ans entre dans la “charia”; la femme, reléguée dans leurs législations, presque au rang d’animal dans ses droits et devoirs entre dans la “charia” parce que «d’esprit incomplet» ; l’illicite et le licite (haram et hallal), qui composent l’essentiel de leur littérature, entre aussi dans cette “charia” ; le «djihad», d’essence défensif (difâa), élargi injustement à l’agression (djihad ettalab) l’est aussi ! Encore et encore, jusqu’à des choses que la raison révulse et répugne au point où ils décrètent eux-mêmes «haram» (illicite) des faits et gestes que le Coran ne prescrit pas ou que le Prophète n’a pas prononcé !

      Ils font souvent l’inverse de ce que dit ou interdit le Coran ! Pour cela, ils usent d’artifices et d’extrapolations par des hadiths, comme preuves, poussant jusqu’à déclarer inopérant certains versets, gênants leurs objectifs ou volonté, en les qualifiant de… «mensoukh». A l’exemple de ce hadith d’Al Boukhari visant les non-musulmans, (et donc parole du Prophète exécutable dans le temps et l’espace) qui dit «je suis venu par l’épée jusqu’à ce que vous attestiez qu’il n’y a pas de divinité en dehors de Dieu», en contradiction avec le verset «combattez ceux qui vous combattent et ne transgressez pas, Allah n’aime pas les transgresseurs !»

Les musulmans se retrouvent majoritairement, aujourd’hui, devant deux «islam» : celui du Coran assez négligé et celui des hadiths hétéroclites (que ne connait pas le Prophète), que l’on a fait confondre avec la «sunna authentique», qui est imposé à force de propagandes et d’artifices allant jusqu’à sacraliser leurs rapporteurs, les ‘fouqaha’ qui interprètent ainsi que leurs fikh (avis religieux) ! Comme si ce Coran était insuffisant pour lui greffer des milliers d’annexes et d’apocryphes,

Les principales références qui se sont imposées «incontestables et incontournables» sont Al Boukhari et Muslim. Leurs deux «Sahih», (l’authentique), recueils de Hadiths sont qualifiés de «plus fiables Livres après celui de Dieu» (mieux que le Al-Muwatta de l’imam Malik né vers 711, soit 79 ans après la mort du Prophète), ainsi que les 4 imams initiateurs des 4 doctrines (madhahib), sans oublier surtout Cheikh el Islam Ibn Taymiyyah (1263/1328) l’auteur, entre autres, des «Fatawa al-Kubra» (les grandes fatwas, 36 volumes), dont les adeptes salafistes en font leur source principale d’inspiration.

      A propos de celui qui a assassiné le 2ème Calife, Omar Ibn El Khettab, il répond : «Celui qui a tué le Calife, était un mécréant qui haïssait l’Islam, le Prophète et sa nation (les Musulmans), il a donc tué Omar par haine envers le Prophète et la religion. Mais celui qui a tué Ali, priait, jeûnait et lisait le Coran. Il a tué Ali en croyant que le prophète et Allah voulaient qu’Ali soit tué. Il a fait cela par amour envers Allah et son prophète, mais il avait juste tort.» (Minhaj Al Sunnah Vol 4 Page 155).

Il donne aussi cette «fatwa» sur quelqu’un qui, avant la prière, dit son intention (Nia) : «Al Hamdoulilah, la ‘Nia’ n’a jamais été pratiqué par les savants, ni le prophète, [ni…ni] et quiconque prétend que cela fait partie de la religion, il doit se repentir de cela, et s’il ne veut pas se repentir et recommence : Tuez le !» (Al Fatwa Al Kubra Vol 1- Page1)… Avec Ibn Taymyyah c’est l’ère des tribunaux pour apostasie et à notre époque, celui du terrorisme «djihadiste».

Il faut reconnaitre que ces derniers ne font qu’appliquer à la lettre ce qu’ils ont appris des livres religieux reconnus et admis, même par les universités islamiques dont Al Azhar.  Selon l’écrivain et poète tunisien Abdelwahab Meddeb, dans son livre «La Maladie de l’islam», Ibn Taymiyyah était «peu estimé de ses érudits collègues… (il) exaltait les foules incultes».

Les «hadiths» ont un impact tel qu’ils impriment le comportement de la plupart des musulmans, voire fortement certains (sunnites), sans qu’ils n’en connaissent la teneur ; aussi est-il utile de donner quelques explications et précisions à leurs propos.

La chaîne de transmission des hadiths est reconnue (depuis le deuxième siècle [H], après la mort du prophète) : Prophète…vers Compagnons (sahaba)…vers les suivants (tabiine)…vers les suivants des suivants (tabii ettabiine)…vers cheikh echouyoukh…vers chouyoukh…vers Boukhari et Muslim qui ont écrits leurs «Sahih». Entre la mort du Prophète et la mort de Boukhari (810/870), il s’est déroulé environ 238 ans. Il s’agit du cheminement schématique d’un hadith ! Imaginons qu’il faut considérer des milliers rapportés (ou imputés) par des dizaines de «Compagnons» à des centaines de «suivants» vers des milliers de «suivants des suivants» …jusqu’à Al Boukhari sur 238 ans !

      Chacun des hadiths est classé selon son degré d’authenticité (en gros ainsi 🙂

– «Al mutawatir» (le récurrent) qui doit être transmis, tel qu’entendu du Prophète par au moins 07 de ses compagnons, à plusieurs de leurs disciples (probes) et ainsi de suite. Il ne doit souffrir d’aucune modification dans le fond ! On le qualifie aussi de hadith «marfou3» (élevé) ; considéré comme le plus authentique.

– «Al Ahad» (disons unique) – qui regroupe les acceptables, les faibles, les douteux, etc  – qui ne répond pas aux conditions de récurrence, du nombre de rapporteurs et leur probité, de leur enchaînement, de leur cohérence…Ainsi l’authenticité n’est pas assurée selon les règles des juristes musulmans (foukaha). On lui donne plusieurs qualificatifs ; «Al Maoukouf», «al moursal», «al mounkati3e», «Al Mou3dhal» et d’autres. Tous sont qualifiés de ‘faibles’, ils ne devraient pas être considérés comme venant du Prophète !

Prenons le hadith «moursal» (on va voir pourquoi) : C’est celui ou le narrateur (tabiî ou tabii ettabiines, qui sont des milliers) saute un «sahabi» (qui sont environ 120) en imputant lui-même le hadith au Prophète sans l’avoir entendu de lui, ou vu ou vécu son époque !

La tromperie est que dans presque tous les sites, qui parlent de l’Islam, ainsi que des «chouyoukh», on dissimule la chaine de transmission des hadiths, qu’ils citent, pour les faire passer pour «authentiques». On vous renvoie donc directement à un «personnage» ayant vécu l’époque du Prophète. On vous dira, par exemple, que c’est un hadith rapporté par Al Boukhari ou Muslim avec la précision «de (âan), Abu Hurayra , le prophète a dit…».

Des penseurs estiment que 80% des faits et gestes des musulmans s’inspirent des hadiths «Ahad». Ils les rejettent parce que la transmission est rompue ou que le rapporteur manque d’honnêteté ou que le hadith est contraire aux principes du Coran ou aux comportements et «moralité éminente» du Prophète. Ils disent qu’en aucun cas ils ne doivent être considérés «hadiths» venant du Prophète. Pour eux il n’y a d’Islam authentique (du Coran et de la véritable sounna) qu’avant la mort du dernier calife «sahabi»…et encore (en évitant de faire référence à la «grande fitna») ! Le reste n’est que falsification, fausse imitation ou mensonge. Ils soutiennent que l’interprétation du Coran n’est jamais définitive et qu’elle ne doit pas être close au 7/8ème siècle avec l’injonction des hadiths, sinon on remettrait en cause son universalité !

Ce qu’il faut reconnaitre d’honnête chez Al Boukhari ou Muslim, c’est qu’ils citent toute la chaine de transmission de façon précise ; ce qui permet de s’assurer du degré d’authenticité de chaque hadith !

      Prenons cet exemple de dissimulation sur le hadith «choix de l’épouse» (classé ‘moutafak aleyhi’, c’est-à-dire ‘admis’ par Al Boukhari et Muslim). On cite : «Selon Abou Hourayra, le Prophète a dit: On épouse la femme pour quatre raisons: Pour son argent, pour sa famille, pour sa beauté, ou pour sa religion (sa chasteté). Emporte celle qui a la religion, puissent tes mains se couvrir de poussière !» (Reconnu authentique). La véritable chaine que rapporte Al Boukhari est en fait celle-ci : «Mesdad nous a raconté, que Yahia a raconté, que Abdullah a dit que Said ben abi Said lui a raconté que son père a rapporté de Abou Hourayra que le Prophète a dit : On épouse …». On voit bien que l’on cache la chaine des rapporteurs pour ne pas donner la possibilité de juger du degré d’authenticité du hadith !

Abu Hurayra est admis comme «compagnon du prophète» par les foukahas, bien qu’il ne l’ait fréquenté que les 4 années dernières avant sa mort. On lui a attribué plus de 5300 hadiths c’est-à-dire bien plus que ce qu’ont rapporté les véritables «sahaba» réunis, qui ont vécu auprès de lui, en proche, toute sa vie ! Certains le considèrent comme personnage proche d’une légende tout en lui reprochant de se permettre de donner des détails de la vie intime du Prophète qu’il ne peut connaitre. Dire que le Prophète était avec Aicha chez lui etc… ou que Zeynab lui a préparé telle chose, ou qu’elle était jalouse de… et bien plus …d’où peut-il avoir cela ?

Ce qui est triste, c’est que les musulmans, dans les mosquées, s’expriment en le citant avec ses hadiths, plus que le Prophète ou le Coran !

      Une compilation de milliers (plus de 7000) de hadiths, considérés comme «les plus authentiques» faite par Al Boukhari par ouï-dire, 220 ans – il aurait commencé à l’âge de 16/17 ans – après la mort du Prophète suivant une chaine de rapporteurs disparates, au nombre 6 ou 7, est pour le moins problématique ! Surtout qu’il y a déjà des hadiths négligés d’imams plus proches des «sahabi» en particulier Malik ibn Anas (surnommé l’imam de Médine).

Comme disait l’autre : Allez donc essayer de reconstituer aujourd’hui (seul et à dos de chameau), les faits, gestes et paroles de l’Emir Abdelkader – 135 ans seulement après son décès – sans consulter aucune bibliothèque ni documents, ni téléphone, mais uniquement à partir de la mémoire des gens ayant entendu dire d’autres gens et ainsi de suite, en visitant tous les lieux qu’il a fréquenté jusqu’en Syrie ! Aberrant !

Il faut aussi savoir que l’idéologie et la méthodologie salafiste, dans la perception de la religion, n’est pas exclusive aux «salafistes», aux accoutrements particuliers. Elle est insidieusement enracinée dans presque toutes les couches sociales musulmanes ! On trouvera toujours des altérations enfouies d’un «tourath» (héritage) équivoque qui fige l’esprit des musulmans.

Remettre en cause ces hadiths ainsi que leur transmission, est perçue comme nier l’Islam, carrément, alors que le Prophète à lui-même interdit l’écriture de ses faits, gestes et paroles au moment où il a ordonné l’écriture du Coran! Même du temps des 4 premiers Califes, où l’on a retranscris et rassemblé le Coran, on ne l’a pas fait pour les hadiths !

      Jusqu’à nos jours, on accepte et adopte ces antagonismes (voire contradiction avec le Coran) comme une richesse ! Même notre langage est altéré ! On anoblit de «radhia allaou ânhou» (que Dieu l’agrée) aussi bien le «sahabi» tueur de «sahabi» que sa victime «sahabi»)….par exemple ! Tout comme ce ‘Califat’ instauré (après la mort du Prophète) que les islamistes s’échinent à réinstaurer comme mode de gouvernance, essentiel pour les musulmans ! Tous les Califes pensaient que la religion et les interprètes étaient à leur service et non au service du peuple, d’où le désordre et les abus dans l’émission de «fatwa».

Les musulmans semblent condamnés, durant encore longtemps, à s’abreuver des hadiths douteux ! Et cela semble arranger beaucoup de gouvernants. Les éliminer, aujourd’hui, est un véritable défi, car 90% de la foi du musulman est fondée principalement sur les hadiths et non sur le Coran qui n’arrange ni les gouvernants, ni les intérêts des hommes de religions, ni les imposteurs et fossoyeurs ! Les éliminer c’est aussi se retrouver presque sans hadiths et donc sans religion ! Est-ce faisable au vu des enjeux, des rapports de force et la désunion des États musulmans ?

Difficile de s’entendre, de s’organiser, de s’unir ou de se moderniser et de progresser, ils avaient fait (et font) l’objet de convoitises de leurs richesses par les puissants jusqu’à les coloniser ! Ce n’est qu’après la 2ème guerre mondiale que le processus de décolonisation et l’émancipation s’enclenche, par les contacts avec les autres cultures et la prise de conscience !

      Des ‘oulémas’ et chercheurs contemporains tentent d’y remédier, mais non sans grandes difficultés allant jusqu’à subir la prison ou l’accusation de «kafir» (mécréant) par les “gardiens du temple”, tous copieurs, radoteurs et “par-coeuristes”, sans innovation depuis le 1er siècle suivant la mort du Prophète! Ces nouveaux éclaireurs s’emploient, malgré les obstacles, à analyser, défaire méthodiquement ces mythes devenus «religion», en lieu et place de l’Islam du Coran, tout en érigeant une «nouvelle pensée islamique» – en accord avec la lettre et l’esprit du Coran comme base – plus rationnelle, plus humaine, plus juste, afin de rendre la vie plus facile et la foi plus attrayante et moins repoussante!

A. Djerrad  

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