La Banque du Liban a publié une nouvelle circulaire, la 159, permettant aux banques libanaises de donner des livres libanaises sur base du taux de sa plateforme électronique Sayrafa au lieu de devises étrangères concernant les comptes dit “fresh money” qui étaient pourtant jusqu’à présents protégés de ce type de pratiques.

Cette décision de la Banque du Liban semble ainsi vouloir forcer à liratifier l’économie libanaise alors que les liquidités étrangères manquent au pays des cèdres et que de nombreux établissements locaux sont considérés en état de faillite technique.

Le gouverneur de la Banque du Liban tenterait ainsi de renflouer “avec les fonds des tiroirs”, les banques libanaises, accusent certains observateurs, qui notent que le dollar dit frais était la dernière chose qui qui continuait à graisser une économie déjà fortement impactée par une crise financière d’une ampleur difficilement imaginable.

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Des banques considérées insolvables

Ainsi dès 2020, un rapport publié par la Foundation for Defense of Democracies et intitulé Crisis in Lebanon, Anatomy of a financial Collapse estime toutes les banques libanaises étudiées comme étant insolvables.

Au total, les 14 banques prises en compte nécessiteraient un apport de 67 milliards de dollars, ce qui est bien éloigné des sommes maximales que le Liban pourrait obtenir dans le cadre d’une aide internationale, soit 26 milliards de dollars (15 milliards de dollars de prêts via le FMI et 11 milliards de dollars via CEDRE à condition de mettre en place les réformes économiques, monétaires et financières nécessaires pour les débloquer).

Selon les calculs effectués par un expert étranger, tous les établissements nécessiteraient des injections massives de fonds, allant jusqu’à 11.9 milliards de dollars pour la BLOM seulement, suivie de 11 milliards de dollars pour la Banque Audi, des sommes aujourd’hui impossibles à trouver au Liban même. Le risque de faillite ou encore de shutdown complet est donc présent pour ces établissements avec d’importantes pertes pour les actionnaires actuels.

Ils ne pourraient survivre qu’à condition de fusionner ou encore de procéder à des haircuts sur les dépôts présents, estimait-on déjà à l’époque, chose depuis faite indirectement avec certains établissements procédant via la circulaire 158 qui permettait le retrait de dollars dits lollars à hauteur de 20% seulement de leurs valeurs comptables.

En mai dernier, un nouveau rapport publié par Standard & Poors jetait le froid avec des estimations de décôtes allant jusqu’à atteindre plus de 100% du PIB avant toute dévaluation officielle de la livre libanaise face au dollar. 

Cette restructuration et décôte des actifs des banques libanaises pourrait même atteindre 134% du PIB en 2021, estiment ainsi les auteurs du rapport qui accusent les autorités monétaires d’avoir fait assumer aux déposants ces pertes et non aux actionnaires des banques via la circulaire 154 qui appelait à une hausse des fonds propres des établissements. 

Par ailleurs, la BdL elle même possèderait 44% de la dette publique et 26% des dettes des banques. 

Element clé, du rapport, le coût de la restructuration pourrait dépasser les 100% du PIB, 134% au pire même. 

Autre preuve de l’insolvabilité des établissements bancaires, les banques correspondantes étrangères clôturent les comptes des banques libanaises y compris de la Banque du Liban elle-même.

Les banques correspondantes clôturent les comptes de la Banque du Liban

Riad Salameh, governor of Lebanon's central bank, speaks to the Financial Times in his office in Beirut, Lebanon, on October 30, 2017. [Sam Tarling for the Financial Times]

4 banques correspondantes ont déjà décidé de clore les comptes de la Banque du Liban elle-même, a indiqué le gouverneur de la Banque du Liban lui-même début avril 2021.

Le gouverneur de la banque du Liban Riad Salamé aurait ainsi informé le procureur de la république, le juge Ghassan Oweidat, de la clôture des comptes de la Banque du Liban auprès de banques correspondantes étrangères, indique le journal Al Akhbar. Cette lettre a été transférée par le magistrat au Président de la République, le général Michel Aoun, au premier ministre sortant Hassan Diab et aux ministres sortants des finances Ghazi Wazni et de la Justice Marie Claude Najm. 

Il s’agirait notamment du cas des comptes dollars auprès de la Wells Fargo, des comptes en livre sterling de la HSBC, en couronne suédoise auprès de la Danske et des comptes dollars canadiens de la CIBS. 

Selon le gouverneur de la Banque du Liban, ces décisions seraient motivées par l’état de défaut de paiement, les campagnes politiques visant la Banque du Liban et par “le Tollé judiciaire”, allusion aux accusations de détournement de fonds et de corruption visant Riad Salamé lui-même

Parallèlement, les banques correspondantes des banques privées locales ont augmenté les garanties exigées pour continuer à ouvrir des lignes de crédit nécessaires, notamment à l’importation de marchandises, en dépit de la publication de la circulaire 154 de la BdL qui a porté à 3% les fonds déposées par les banques locales en devises à l’étranger. 

Par ailleurs, Jp Morgan demanderait une hausse des garanties des lignes de crédit nécessaires entre autre à l’importation de carburants mais aussi refuserait pour l’heure, d’accorder les lignes de crédit nécessaires au paiement de la société allemande Combi Lift en vue de procéder à l’enlèvement des matières dangereuses du port de Beyrouth.

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