Grand show hier du gouverneur de la Banque du Liban Riad Salamé, sur la chaine Al Hourra. On pourrait presque être convaincu que tout va bien et que le pire est passé, si on ne lit pas entre les lignes.

Ainsi, Riad Salamé a admis que la BdL ne dispose plus que de 36 milliards de dollars en y incluant les réserves en or de cette dernière et réfutant toute interaction dans le programme de subvention, selon lui décidé par le gouvernement. La Banque du Liban ne ferait ainsi que fournir les devises étrangères nécessaires à l’achat des produits de première nécessité. Il a également estimé que le défaut de paiement n’a pas permis au Liban d’attirer les devises fortes nécessaires à la poursuite de ce programme. C’est vite oublier que l’inversion des flux financiers a eu lieu dès janvier 2019, soit bien avant mars 2020 et l’annonce d’un état de défaut de paiement et le transfert par des responsables politiques et bancaires dès 2017 d’importants montants à l’étranger afin de préempter un état de défaut très probable dès l’époque.

Contrairement aux demandes du gouvernement, Riad Salamé a également refusé, une nouvelle fois, de toucher aux réserves monétaires obligatoires de la Banque du Liban afin de poursuivre pour un temps, le programme de subvention à l’achat des produits de première nécessité, le temps de mettre en place un programme alternatif visant plus précisément les personnes vulnérables.

Concernant l’argent des déposants, il ne serait pas dans la Banque du Liban, selon lui, écartant ainsi sa responsabilité dans les évènements qui sont survenus. Cette affirmation est plutôt surprenante quand on sait que l’ABL avait révélé que ses membres avaient placé, auprès de la Banque du Liban, près de 70 milliards de dollars sous forme de certificats de dépôts. On peut douter que les banques libanaises, elles-même, disposent de fonds propres aussi importants, d’autant plus qu’elles en ont cruellement besoin aujourd’hui puisqu’elles sont considérées comme étant insolvables.

Aussi, on aimerait bien savoir comment la Banque du Liban a dépensé 56 milliards de dollars de subvention au cours des 3 dernières années soit plus de 18 milliards de dollars par an alors que le format du programme de subvention était estimé à près de 7 à 8 milliards de dollars annuellement. Un différentiel important existe donc… Outre les produits de première nécessité, il semblerait donc que les fonds de la Banque du Liban aient également servi à financer des produits non-essentiels. Il reste à en connaitre les bénéficiaires.

Cela, d’autant plus qu’il est en fin de compte très facile d’être généreux avec l’argent des autres. La Banque du Liban dépensait ainsi près de 18 milliards de dollars par an dans le cadre de subvention avec l’argent des autres, l’argent de la population. Combien de gens étaient ainsi admiratifs de la politique monétaire du gouverneur de la Banque du Liban, une politique bien couteuse entre maintien du Peg et subventions à l’achat de produits de première nécessité, ne pouvant même pas penser qu’au final c’était leur propre argent qui était ainsi dépensé. À force de manger le pain blanc les bons jours, il ne reste que quelques miettes aujourd’hui par ces temps de crise.

Riad Salamé va jusqu’à évoquer une amélioration de la situation sur le marché immobilier. Cette affirmation est également quelque peu déconcertante. Il s’agit avant tout aujourd’hui d’une augmentation du nombre de ventes d’unités immobilières donc de l’absorption d’une bulle qu’il avait lui-même contribué à mettre en place avec un plan de soutien aux constructeurs du secteur et non à la consommation.

Sur le taux de change, le gouverneur de la Banque du Liban a reconnu son incapacité à réglementer ce taux, soulignant que la banque centrale joue un rôle majeur dans la préservation du taux de change, mais elle ne peut pas déterminer seule le taux de change avec donc la loi de l’offre et de la demande, reconnaissant en fin de compte, l’échec de la politique du maintien d’une parité, sa politique durant 25 ans dont on paie aujourd’hui le prix avec une correction sévère et une dévaluation de facto du taux de change de la livre libanaise face au dollar de près de 80%.

Bref, de l’art, du grand art même pour persuader les gens mais le diable se cache dans les détails…

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