Les 3 anciens premiers ministres Nagib Mikati, Fouad Saniora et Tamam Salam sont montés au créneau à la défense du premier ministre désigné Saad Hariri, suite à l’envoi par la Présidence de la République d’une lettre au parlement accusant ce dernier d’être à l’origine du retard pris dans le processus de formation d’un prochain gouvernement.

Selon le communiqué publié par les 3 hommes, ils estiment que Saad Hariri a agi conformément à la constitution libanaise, avec des consultations parlementaires avec tous les blocs présents au sein de la chambre. Il aurait ainsi remis, “sans délai” précise le communiqué, une proposition de formule gouvernementale pour laquelle il n’a reçu aucune réponse du Président de la République. Ils accusent également Baabda de souhaiter instaurer un tiers de blocage au sein du prochain cabinet, des “normes contraires” à la constitution selon eux et réfuté par la présidence.

Aussi, selon les 3 anciens locataires du Grand Sérail, si l’article 10 de l’article 53 de la Constitution donne au Président de la République le droit d’envoyer des messages à la Chambre des représentants sur des questions nationales générales, celui-ci ne peut faire appel à la chambre concernant la formation du gouvernement en raison de la séparation des pouvoirs.

Toujours selon la constitution, les 3 anciens premiers ministres notent que l’article 64 stipule qu’il revient au premier ministre désigné de proposer au Président de la République la formule gouvernementale qui publie, en accord avec lui, le décret de sa formation.

Selon eux, Saad Hariri aurait suivi ces procédures mais aurait également été “confronté à chaque fois à des obstacles et des exigences qui s’écartent de la constitution et tendent pour inclure ceux qui n’ont aucun intérêt dans la question de la formation du gouvernement, pour lui donner un rôle contraire aux dispositions de la constitution.”

Il s’agirait, selon eux, de placer le premier ministre, en subordination au président de la république, ce qui porterait atteinte à la constitution libanaise et à la séparation des pouvoirs.

Ils estiment ainsi que la lettre adressée au parlement constitue “un véritable coup d’État contre la constitution, et ce sont les mêmes pratiques qui ont entravé la mise en œuvre des dispositions de la constitution, ont également retardé la formation du gouvernement et mis le pays au bord de l’effondrement.

Un pays sans gouvernement alors que la crise économique le touche de plein fouet

Le Liban est sans gouvernement depuis la démission, le 10 août dernier, du premier ministre sortant Hassan Diab.

La formation d’un nouveau gouvernement est considérée comme une des conditions préalable à la relance des négociations avec le Fonds Monétaire International afin d’obtenir un déblocage de l’aide financière de la communauté internationale face à la crise économique que traverse le Liban. 

Suite à l’échec de Moustafa Adib à former un cabinet, l’ancien premier ministre Saad Hariri, qui avait pourtant démissionné suite à d’importantes manifestations en octobre 2019, s’est vu être chargé de former un nouveau gouvernement en octobre 2020.

Pour tenter de débloquer la situation, l’ancien premier ministre a promis au mouvement Amal d’attribuer le portefeuille du ministère des finances à un membre de la communauté chiite. Il avait également réitéré que le Liban pouvait se passer d’un état de défaut de paiement, déniant ainsi la gravité de la crise économique cependant vécue par la population, avec 55% de celle-ci vivant désormais sous le seuil de pauvreté alors que la récession économique a atteint 29% selon certains rapports pour l’année 2020.

Cependant, les propositions de Saad Hariri d’un cabinet de 18 membres se heurtent à la présidence de la République, qui souligne que si les communautés chiites et sunnites choisissent leurs représentants, les représentants chrétiens au sein du nouveau cabinet seraient également choisis par le premier ministre désigné. Le Général Aoun estime de fait que les propositions actuelles du premier ministre contreviennent à la fois à la constitution libanaise et au pacte national.

Ce dernier accuse de son côté le chef de l’état de souhaiter obtenir un tiers de blocage au sein de son nouveau cabinet, ce que réfute la présidence de la république.

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