Le siège de l'Association des Banques du Liban après l'explosion du Port de Beyrouth. Crédit Photo: Libnanews.com
Le siège de l'Association des Banques du Liban après l'explosion du Port de Beyrouth. Crédit Photo: Libnanews.com

Après la décision hier du Conseil de la Shoura de suspendre la circulaire 151 de la Banque du Liban qui avait instauré un taux de change de 3 900 LL/USD en octobre dernier en cas de retrait des comptes dollars et exigé un paiement en devises étrangères, les banques libanaises et leurs dirigeants se montreraient inquiets de cette décision qui pourraient amener à la faillite de leurs établissements et à la mise sous séquestre de leurs biens personnels.

Certains établissements auraient ainsi suspendu toute opération en attendant la prise de position officielle de la Banque du Liban

Pour rappel, aucun appel de cette décision n’est possible. Il est attendu à ce que la Banque du Liban précise dans les prochains jours les procédures annonçant l’annulation de cette circulaire et la mise en place d’un nouveau mécanisme de retrait des fonds. Ainsi, l’hypothèse la plus probable serait que les banques puissent permettre le retrait de petits montants en dollars, chose cependant difficile en raison de l’insolvabilité de plusieurs grands établissements.

Autre possibilité, le paiement à hauteur de la parité officielle en cas de retrait, soit à 1 507 LL/USD. Cependant, cette mesure pourrait également être confrontée à des recours devant la justice libanaise ou encore à un taux à la discrétion du client. Cette mesure pourrait amener à officialiser par conséquent une décôte incontrôlée des comptes en dollars.

Une dernière possibilité et non des moindres serait de reconnaitre la faillite des banques et donc amener à la liquidation d’une grande partie des établissements actuels. Dans un tel scénario, les dirigeants de ces banques ainsi que les actionnaires principaux pourraient voir leurs biens personnels être saisis par la justice afin de rembourser les créances de ces établissements bancaires.

Cependant, les biens des établissements bancaires eux-même pourraient être surévalués par rapport à la réalité du marché déjà précédemment à la crise. Certaines sources estiment ainsi qu’il existerait une différence de 25% voire même plus entre la valeur comptable de ces biens et la valeur réelle sur le marché. Quant au capital existant, en dépit d’une augmentation effectuée, il y a peu, il se serait déjà évaporé en raison de la crise que traverse actuellement le Pays des Cèdres.

Pour rappel, les dépôts totaux auprès des banques libanais atteignent 148.65 milliards de dollars selon les derniers chiffres publiés par la Banque du Liban, dont 83% en dollars environ.

Les banques considérées déjà comme insolvables dans un rapport publié l’année dernière

Le rapport publié en 2020 par la Foundation for Defense of Democracies et intitulé Crisis in Lebanon, Anatomy of a financial Collapse estime toutes les banques libanaises étudiées comme étant insolvables. Elles sont également menacées par des procédures judiciaires, accusées de blanchiment d’argent et en raison du lien de certains établissements avec le Hezbollah aux USA.

• Bank Audi S.A.L.
• Bank of Beirut S.A.L.
• Bank of Beirut and the Arab Countries S.A.L.
• Bankmed S.A.L.
• Banque Libano-Française S.A.L.
• BLOM Bank S.A.L.
• Byblos Bank S.A.L.
• Crédit Libanais S.A.L.
• Fenicia Bank S.A.L.
• Fransabank S.A.L.
• IBL Bank S.A.L.
• Lebanon and Gulf Bank S.A.L.
• MEAB Bank S.A.L.
• Société Générale de Banque au Liban S.A.L.

Parmi les banques citées:

Au total, les 14 banques prises en compte nécessiteraient un apport de 67 milliards de dollars, ce qui est bien éloigné des sommes maximales que le Liban pourrait obtenir dans le cadre d’une aide internationale, soit 26 milliards de dollars (15 milliards de dollars de prêts via le FMI et 11 milliards de dollars via CEDRE à condition de mettre en place les réformes économiques, monétaires et financières nécessaires pour les débloquer).

Selon les calculs effectués par un expert étranger, tous les établissements nécessiteraient des injections massives de fonds, allant jusqu’à 11.9 milliards de dollars pour la BLOM seulement, suivie de 11 milliards de dollars pour la Banque Audi, des sommes aujourd’hui impossibles à trouver au Liban même. Le risque de faillite ou encore de shutdown complet est donc présent pour ces établissements avec d’importantes pertes pour les actionnaires actuels.

Ils ne pourraient survivre qu’à condition de fusionner ou encore de procéder à des haircuts sur les dépôts.

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