Mon Beyrouth à moi … n’existe plus

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Gamin, insouciant, aventurier, je flânais très souvent dans mon Beyrouth a moi, celui de mes parents et celui de mes grands parents, mais surement pas celui de nos enfants…..Un itinéraire que certains des lecteurs de « cette génération », peuvent se rappeler et revoir « les yeux fermes » –

Assez souvent, je “déambulais” au Centre Ville, de mon temps on disait « centre-ville », a présent le mot « in » devient « Solidere – Down Town ». Donc je « descendais » soit à pied, soit en Bus (25 piastres), eh oui de mon temps, un bus était « acceptable » , propre, « bien fréquenté, et ponctuel !! Je retrouvais des copains, je rejoignais mon père a son bureau rue Allenby (bizarre, il existe toujours !!).

Bab Idriss était la « porte » de ma promenade, je passai devant Sémiramis, en admirant le bel étalage de fruits et légumes parfois « hors saison » de Halabi. Attire par une bonne odeur d’un un bon plat de “foul” de chez Maatouk je continue mon périple
en descendant les ruelles étroites et longues de Souk El Tawilé (comme son nom l’indique) – Pour les « nouveaux », ce sont des ruelles qui n’existent plus que sur des pancartes bien clouées dans les dédales des Souks de Beyrouth actuels –

« Khabbaz, Zahar, et autres » ont été remplaces par Zara et autres (je n’ai rien contre)

Qui ne se souvient pas de la “berké” de Antabli ou l’on pouvait déguster une Achtalieh ou une Mouhallabieh et siroter un Jellab.

Que reste-t-il de ces endroits ?

Quelques marches et j’arrive à Souk El Joukh. De là, la rue Allenby est proche; un sandwich de Kachkaval grillé de chez “Sinno” qui reconverti dans le commerce des jouets , avant de passer envoyer un télégramme (j’explique = un télégramme est un message envoyé par un opérateur, utilisant le code Morse !!!), Laissez tomber c’est du chinois pour nos jeunes. Donc j’envoie ce « télégramme » du bureau de la poste du coin, et je termine ma flânerie au bureau de mon père en regrimpant les longs escaliers – qui existent encore – qui aboutissent chez Ajami.

J’ai eu cette chance de connaitre ce centre ville. Certains quartiers et endroits célèbres me reviennent à l’esprit.Où sont-ils à présent? Pourquoi avoir détruit ce cœur de Beyrouth ? Pourquoi ne l’avoir pas reconstruit en lui gardant son cachet d’antant ? Pourquoi n’avoir garde que quelques immeubles « anciens » –

La guerre me dira – t – on a tout ravagé et n’a rien respecte. Mais Messieurs les “responsables” et “promoteurs” (de ce Centre Ville), Berlin a bien été détruite, certains quartiers de Paris aussi durant les guerres mondiales, Stalingrad a été rayée de la carte, mais ces villes ont bel et bien été reconstruites en gardant leur cachet.

La génération de la guerre (celle de 75) est le dernier témoin de Beyrouth. Tout le reste n’est qu’artificiel – Pourquoi avoir voulu faire de Beyrouth un second Dubai, et ou en sommes nous a présent ? Dans un Centre Ville qui ne vit pas asses, qui ne grouille pas de monde comme il aurait du le faire, bref un centre ville « inconnu », « aphone »,

« rigide et froid » – Un patrimoine mort.

Mais chez nous, il semble que le mot “patrimoine” n’existe que sur les cartes postales et dans certaines encyclopédies. Les Ministres du Tourisme se contentent – et encore – de montrer des photos d’archives d’une ville qui “fut”. Qu’on le veuille ou non, Beyrouth , le Beyrouth, n’existe que dans nos “souvenirs”. C’est une ville de Béton et de Fric que nous avons à présent….

Messieurs,vous avez tue un passe, vous avez tue une histoire, vous avez tue un patrimoine, et vous tuez la civilisation de Beyrouth –

Celui qui ne connait pas son histoire ne peut bâtir un avenir

Fouad A.Salha

Fouad Salha
Economiste de formation, Fouad A Salha est l’auteur de plusieurs articles et opinions allant de la politique aux problèmes sociaux. Citoyen libanais et fier de l’être, il est actuellement membre du mouvement de la citoyenneté œuvrant pour la promotion des droits et respects du citoyen, de la démocratie et de la réforme

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