Hassan Nasrallah : La Palestine ou le retour sur un discours

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Suite à l’actualité au Moyen-Orient, notamment en Syrie et en Irak où les deux armées et leurs alliés enchaînent les victoires, la Palestine revient sur le devant de la scène. Ces trois dossiers ont fait partie conjointement du discours télévisé de Sayyed Hassan Nasrallah, Secrétaire Général du Hezbollah, daté du 16-02-2017.[1]

Analyser les discours de Sayyed Hassan Nasrallah n’est pas une mince affaire. Ils sont d’une densité particulière et d’une visée multidimensionnelle. Le discours du chef du Hezbollah se situe dans la même voie que l’interview du Président Bachar Al-Assad accordée à des médias officiels français. [2]

Les auditeurs du chef du Hezbollah peuvent s’apercevoir qu’il existe plus que jamais une affirmation que la guerre en Syrie a été remportée par l’axe de la résistance et que le temps est venu de la purifier. Les constatations sur le terrain militaire, diplomatique et politique en Syrie affirment cela.

Cependant, une lecture précise du discours de Sayyed Nasrallah fait émerger une idée très importante, qui peut donner quelques éclairages sur les pourparlers des dirigeants israéliens sur le plan politique intérieur et extérieur. Suite aux victoires de l’axe de la résistance au Moyen-Orient, la boussole de cette résistance pourrait être réorientée de nouveau vers la Palestine, qui semble « délaissée » en ce moment.

C’est dans ce cadre que le Secrétaire Général du Hezbollah a mis en garde Israël, déclarant que la résistance est prête à la moindre faille qu’elle risquera de commettre contre le Liban. Ensuite, Sayyed Nasrallah a évoqué la capacité de la résistance à  mener des frappes contre le site nucléaire de Demona à Haifa en cas de conflit. Le Secrétaire Général du Hezbollah semble vouloir indiquer tout simplement que les points les plus stratégiques en Israël sont sous le feu de la résistance.

L’évocation du site nucléaire de Demona entre dans la guerre dissuasive contre Israël. Cependant, le chef du Hezbollah affirme aux dirigeants israéliens qu’en ce qui concerne le Liban, ils ne peuvent plus faire ce qu’ils veulent, comme ils veulent et comme ils avaient l’habitude de faire.

Néanmoins, il est difficilement croyable que la résistance libanaise soit aussi immorale pour tuer des milliers et des milliers d’innocents, en bombardant un site nucléaire. Mais lorsque l’adversaire devient sourd, aveugle et irraisonnable, il faut bien lui parler avec les mots qu’il peut comprendre.

Le chef du Hezbollah évoque le site de Démona pour signifier également que cette cible stratégique est sortie de la liste des surprises qu’il a évoqué à maintes reprises. Cependant, y-a-t-il d’autres points plus stratégiques et sensibles en Israël que le site nucléaire de Demona ? Qu’est-ce qui pourrait être plus stratégique pour une puissance comme Israël que ses sites nucléaires ?

Le discours du chef du Hezbollah se situe dans le registre de la guerre psychologique qui a déjà fait ses effets. Selon la chaîne Al-Mayadeen, environ quatre mille colons ont manifesté au lendemain du discours de Sayyed Nasrallah afin de réclamer le démontage du réacteur nucléaire en question. Les manifestations des colons à Haifa révèlent aussi que le peuple israélien prend les paroles d’Hassan Nasrallah au sérieux, lui donnant de la crédibilité.

Après la guerre psychologique, il y a la guerre secrète. Il n’est pas anodin que le Président de la République libanaise Michel Aoun mette à son tour en garde Israël. En général, les mises en garde sont multidimensionnelles et contiennent plusieurs messages de la part de l’émetteur, dont un ou plusieurs avertissements, ainsi que l’absence d’une volonté d’entrer dans des conflits armés. Mais que fait un peuple si une guerre lui est imposée ?
La défense légitime n’est-elle pas un droit stipulé dans la Charte des Nations-Unies, chapitre 7, article 51 ? [3]

Enfin, l’axe de la résistance remporte les victoires contre le terrorisme et ses sponsors au Moyen-Orient. Il est indéniable que les règles du jeu ont changé. Cependant, les espoirs reposent encore et toujours sur un sursaut dans la direction d’une paix juste et équitable, même si ces espoirs sont à l’heure actuelle très réduits, face à un ennemi aveuglé par son arrogance, qui se retournera contre lui un jour.

Antoine Charpentier


  • [1] Discours du Secrétaire Générale du Hezbollah : 16-02-2017
  • [2] EXCLUSIF TF1 – l’entretien integral de bachar al-assad : http://www.lci.fr/international/exclusif-tf1-l-entretien-integral-de-bachar-al-assad-2026157.html
  • [3]Carte des Nations-Unis, chapitre VII : action en cas de menace contre la paix, de rupture de la paix et d’actes d’agression http://www.un.org/fr/sections/un-charter/chapter-vii/index.html
Antoine Charpentier
Antoine Charpentier, né au Liban et installé en France depuis plusieurs années, détenant un Master d'Histoire Contemporaine, de l'université de Besançon, terminant actuellement un Master de science des religions à l'université de Strasbourg. Analyste et blogueur politique spécialisé des questions du Moyen-Orient.

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