Si on considère le sommet économique de la Ligue Arabe purement d’un angle économique, cela a été assez pauvre. Il convient de l’admettre.

Il s’agit avant tout d’une victoire politique à la Pyrrhus qui consacre les divisions politique du Monde Arabe au lieu de les amoindrir.

Le sommet “économique” puisqu’il faille désormais le mettre entre guillemet a été plus politique: Le Liban a effectivement marqué un certain nombre de poids, sur la question des réfugiés notamment, qu’ils soient syriens et palestiniens et de pression de la part de certains pays, principalement des Etats-Unis. N’en déplaisent aux détracteurs du rôle du Washington dans l’absence des principaux chefs d’état qu’il y a beaucoup de coïncidence pour ne pas l’évoquer dans l’analyse de notre grille de lecture.

Retour volontaire ou retour obligatoire à la casse Syrie

Le Pays des Cèdres fait en effet face à plusieurs défis qu’on lui impose: La présence syrienne sur ses infrastructures alors que de nombreux pays qu’ils soient occidentaux ou arabes souhaitent conditionner le retour des réfugiés syriens à un règlement politique de la crise syrienne.

D’où la demande de ces pays, de la France lors du congrès CEDRE en avril 2018, ou des pays arabes lors du Sommet économique qui vient de s’achever, à ce que ce retour soit volontaire, puisqu’à ce moment-là, ils disposeraient des moyens pour les en empêcher. Il faut faire la différence entre réfugiés économiques – qui sont nombreux – et réfugiés politiques – qui le sont beaucoup moins-. Si beaucoup de réfugiés syriens préfèrent résider au Liban, il s’agit avant tout parce qu’ils jouissent d’une importante aide économique, jusqu’à 200 USD par membre et par mois. Plus encore, ils privent la population libanaise d’emplois sous qualifiée. D’autre part, prolonger leur séjour à l’étranger permet d’allonger la crise syrienne, pays qui a par conséquent moins de main d’oeuvre pour se reconstruire. L’idée est un peu vague mais on aura tous compris de quoi il s’agit.

En cela, le Liban paye aujourd’hui un combat d’arrière garde, lui qui a déjà tant payé lors des phases actives du conflit syrien. On essaye maintenant de ne pas jouir du processus de reconstruction de la Syrie, chose dont il pourrait largement profiter économiquement parlant, alors que le Pays des Cèdres traverse une grave crise en regard avec le taux d’endettement public qui poursuit une courbe ascendante, du taux de croissance ou du taux de chômage qui se dégradent, du nombre de faillite qui s’accélère, etc…

La question de l’implantation des réfugiés palestiniens fait son retour sur scène

La deuxième victoire libanaise concerne le volet des réfugiés palestiniens. Les USA ont en effet arrêté leurs subventions à l’UNRWA dans la foulée de la reconnaissance de Jérusalem comme étant la capitale d’Israël. Ils ont grosso modo choisi un camps quand leur politique dans la région était déjà largement biaisée.

Jared Kushner, gendre même du Président Américain, avait proposé au Roi Abdallah de Jordanie, l’implantation permanente des réfugiés palestiniens en Jordanie, lors d’un entretien bilatéral.

Pire encore, on assiste au retour du Plan Kissinger, avec une volonté d’imposer des choses inacceptables pour les pays de la région. Le Congrès Américain a examiné deux projets de loi visant à limiter le statut de réfugié palestinien à la génération témoin des évènements de 1948. Les autres, les descendants, soit les millions de réfugiés restants enregistrés auprès de l’UNRWA dans ses cinq zones d’opérations, la Cisjordanie occupée, la bande de Gaza, la Jordanie, le Liban et la Syrie, seraient poussés les nationalités des pays dans lesquels ils résident. Le Liban aurait donc à faire face à l’implantation des réfugiés palestiniens ou à de nouveaux conflits en cas de refus.
La Jordanie a heureusement refusé.

Des délégations pratiquement sans chef d’état mais des décisions tout de même

Face à ces mesures, les pays arabes ont d’abord timidement agi. C’est peut-être justement pour ne pas mécontenter les USA – alors que se multipliaient les rumeurs selon lesquelles Washington avait fait pression sur de nombreux pays allant même jusqu’à mettre en garde ces dirigeants contre de possibles attentats les visant lors de cette conférence à Beyrouth – que les principaux chefs d’état des pays membres de la Ligue Arabe n’ont pas fait le déplacement à Beyrouth mais envoyé des délégations mineures.

C’est aussi pour cette même raison que l’Emir du Qatar s’est déplacé puisque dans son bras de fer aujourd’hui avec l’Arabie Saoudite, il essaye d’éviter un alignement tant sur la politique américaine que saoudienne et son aide de 500 millions de dollars en achat de bons de trésor permet de conserver un status-quo et un équilibre au lieu de changer la donne puisque dans la situation dans laquelle se trouve ce pays, il s’agit de ne pas aussi mécontenter les USA.

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