L’ancien premier ministre Najib Mikati est donné pour l’heure grand favori dans le cadre des consultations parlementaires qui s’ouvriront le 26 juillet prochain. Pour rappel, nommé le 22 octobre 2020, l’ancien premier ministre Saad Hariri a annoncé son retrait vendredi dernier, 9 mois après un processus similaire alors que le Liban est sans gouvernement fonctionnel depuis le 10 août 2020.

La nomination d’un nouveau gouvernement est pourtant essentiel au déblocage de l’aide économique de la communauté internationale en raison de la crise actuelle que traverse le Liban. Après une récession économique de 29% en 2020, le Pays des Cèdres pourrait être touché par un nouveau recul de 9% de son PIB en 2021, alors que la monnaie nationale s’est effondrée face au dollar au marché noir.

Alors que les autorités locales espéraient obtenir jusqu’à 9 milliards de dollars de la part du FMI, l’institution internationale aurait indiqué qu’elle ne fournira que 3 à 4 milliards de dollars sous condition de lancer immédiatement les réformes nécessaires et de reconnaitre l’ampleur des pertes du secteur financier. Elle a souligné que les estimations du plan Hassan Diab seraient exactes et conformes à ses analyses, induisant donc un bail-out des actionnaires actuels, chose que ces derniers refusent. Ils avaient d’ailleurs activé leurs relais au sein du parlement, entrainant une vive tension entre l’institution législative et l’exécutif.

Qui est Najib Mikati?

Né le 24 novembre 1955 à Tripoli au Nord du Liban, Najib Mikati a été premier ministre d’avril à juillet 2005 et de juin 2011 à février 2014.

Il s’est fait connaitre par le monde des affaires. Dès 1982, il fonde avec son frère, le groupe M1, principalement basé sur l’industrie des télécommunications, qui investira dans différents pays arabes et en Afrique, mais également dans le secteur bancaire au Liban ou encore dernièrement en Birmanie en rachetant un opérateur local avec une polémique quant à cette opportunité alors que ce pays fait l’objet d’un coup d’état militaire

Sa fortune actuelle est estimée à 2.6 milliards de dollars, lui permettant de figurer dans le classement Forbes des personnes les plus riches au Monde.

Un homme politique au parcours ambiguë

Il deviendra d’abord ministre des transports et des travaux publics au sein du gouvernement de Salim Hoss, le 4 décembre 1998 et sera l’un des rares ministres de ce cabinet à être élu député à Tripoli en 2000 face au Courant du Futur du premier ministre Rafic Hariri qu’il rejoindra au sein de l’équipe que ce dernier constituera.

En dépit de fortes amitiés avec le régime syrien – il est ami personnel du président Bachar el Assad, il se déclarera opposé mais votera tout de même en faveur d’un amendement constitutionnel accordant au Président de la République Emile Lahoud 3 années de mandat supplémentaire.

Il sera nommé premier ministre en avril 2005 dans un contexte rendu tendu par l’attentat qui a couté la vie à Rafic Hariri. Son gouvernement devra organiser les élections législatives de juin 2005 avec l’assurance que lui et ses ministres ne seront pas candidats au scrutin. Le gouvernement Fouad Saniora lui succèdera.

Il sera reconduit comme premier ministre le 25 janvier 2011, après déjà la démission du gouvernement Saad Hariri lors du mandat du Président Michel Sleiman. Il démissionnera le 22 mars 2013 en raison de différends au sein même du gouvernement, différends portant sur la loi électorale.

Depuis, il fait parti du club des 4 anciens premiers ministres avec Tamam Salam, Fouad Saniora et donc Saad Hariri qui dénoncent régulièrement les violations, selon eux, de la constitution libanaise en rapport aux prérogatives des premiers ministres, cela dans un contexte sectaire et confessionnel.

Un candidat controversé également la cible de la fureur populaire

Najib Mikati est également régulièrement dénoncé par les habitants de sa ville qu’ils accusent de détournement de fonds.

En 2019, la juge Ghada Aoun, procureur du Mont Liban, avait d’ailleurs mis en examen Najib Mikati, son fils Maher et son frère Taha ainsi que la Banque Audi – banque dans laquelle il possède une part importante des actions sous forme de certificats de dépôt auprès de la Deutsch Bank notamment – pour s’être enrichi de manière illégale dans le cadre de prêts subventionnés par la Banque du Liban (BDL) à l’origine prévus pour les personnes aux moyens limités. Pour sa part, l’établissement bancaire réfute toute violation de la législation locale.

Il sera également impliqué dans des détournements de fonds européens, indiquait en 2019, le site TRTWorld, aux côtés de l’ancienne commissaire aux affaires étrangères, Federica Mogherini et de l’ancien premier ministre libanais, Saad Hariri. Des députés européens demandaient ainsi l’ouverture d’une enquête parlementaire dans le cadre de cette affaire, chose pour l’heure toujours en attente en dépit de la reconnaissance par l’ancienne commissaire que des anomalies ont été constatées, lors une audition devant le Parlement réuni à Strasbourg.

Selon l’enquête initiale, l’UE aurait déboursé pour l’achat de terrains et la construction d’au moins six stations d’épuration qui sont aujourd’hui inactives et n’ont jamais fonctionné – faisant également partie d’une arnaque beaucoup plus importante. Ainsi, potentiellement 110 millions de dollar auraient pu être détournés, note TRT World.

Ces révélations interviennent alors qu’une conférence a eu lieu à Bruxelles, il y a quelques semaines, où était présent Omar Harfouche. Ce dernier accusait des hommes politiques et des associations de Tripoli, d’être à l’origine de l’échec de la mise en place d’une usine de gestion des déchets pour un montant 38 millions de dollars qu’il avait pour projet de construire à cause de la corruption.

Il aurait ainsi accusé Najib Mikati de l’avoir menacé, dans le cadre de ce dossier, “de le faire disparaitre” au cours d’une conversation téléphonique.

Face à ces accusations, de nombreuses manifestations ont eu lieu devant son domicile à Tripoli. Lui-même est allé jusqu’à menacer, le 29 janvier 2021, de faire usage des armes contre les manifestants pour défendre ses propriétés sur place en cas de perte de contrôle de l’armée libanaise.

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