Riad Salamé sur Al Hadath, 24 mai 2021

S’en prenant ouvertement au président de la république, le général Michel Aoun, le gouverneur de la Banque du Liban a estimé que personne ne dirigeait le Liban, tout en défendant sa décision d’arrêter le financement des subventions accordées au carburants, qui auraient, selon lui, épuisé les réserves monétaires.

Il aurait aussi estimé que la présidence de la république ainsi que le premier ministre sortant Hassan Diab étaient informés par avance de la fin de ce programme, chose que réfutent ces derniers, notant que Riad Salamé s’était engagé à poursuivre le financement du programme d’aide à l’achat de carburant jusqu’en septembre, mi-juillet en contrepartie d’une hausse de la parité utilisée de 1507 LL/USD à 3900 LL/USD.

Aussi le gouverneur de la Banque du Liban a appelé le gouvernement pourtant démissionnaire, à faire adopter une loi par le parlement pour pouvoir utiliser les réserves monétaires obligatoires.

Ainsi, les pénuries de carburants ont un effet domino sur l’ensemble du pays, avec les coupures d’électricité publique mais également des générateurs privés, comme ceux des centres commerciaux dont de nombreux employés sont poussés au chômage technique voire même des hôpitaux dont plusieurs ont dû fermer leurs portes. En cause, l’incapacité de la Banque du Liban à ouvrir les lignes de crédit nécessaires au déchargement de tankers mais également le refus des sociétés distributrices de carburants à livrer leurs stocks en l’attente d’une nouvelle tarification du ministère de l’énergie prenant en compte la parité au marché noir. Si appliquée, les prix des carburants pourraient augmenter de plus de 100%, induisant une hausse d’une ampleur inconnue et avec des conséquences dramatiques sur l’inflation et la perte d’achat de la population déjà fortement impactée par la dégradation de la parité de la livre libanaise.

Le gouverneur de la Banque du Liban n’est pas déjà à son premier bras de fer avec les autorités libanaises. il avait, l’année dernière, refusé de reconnaitre toute perte du secteur bancaire privé ou public dans le cadre des négociations avec le FMI. Si celles-ci avaient alors abouti, la perte de valeur de la parité entre monnaie locale et dollar aurait été maitrisée et ainsi limiter les pertes du secteur bancaire à 60 milliards de dollars – selon les estimations du gouvernement Diab et confirmées par le FMI – contre plus de 100 milliards de dollars aujourd’hui, notent les observateurs.

Pour rappel, le président de la république avait appelé à une réunion exceptionnelle aujourd’hui du gouvernement sortant afin de discuter de la situation actuelle et du rôle joué par le gouverneur de la Banque du Liban Riad Salamé dont la révocation aurait pu figurer à l’ordre du jour, indiquent certaines sources. Cependant, le premier ministre sortant Hassan Diab aurait refusé que cette réunion puisse avoir lieu, prenant à contre-pied le président de la république.

Ces mêmes sources estiment que Hassan Diab aurait pu subir des pressions politiques, notamment de la part du président de la chambre Nabih Berri et des anciens premiers ministres afin que ce conseil des ministres ne puisse se tenir en dépit des dispositions constitutionnelles prévoyant une possible réunion dans des circonstances exceptionnelles. Elles estiment ainsi que Hassan Diab est responsable désormais d’un vide de l’exécutif face à la situation, chose que souhaitait obtenir Riad Salamé qui semble ainsi se féliciter par ses déclarations de l’absence désormais visible de gouvernance de l’état via l’absence d’un cabinet même sortant.

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