” Le feu et moi fumons, côte à côte. Nous offrons nos volutes au vieux lac . Au cours de ces journées là-haut, je me consacre à la pure réjouissance d’être …. Seul, devant le lac : ne nuire à rien, ne subir le diktat de personne, ne désirer pas plus que ce l’on éprouve et savoir que la nature ne nous rejette pas. Dans la vie il faut trois ingrédients : du soleil, un belvédère, et dans les jambes le souvenir lactique de l’effort. “
Sylvain Tesson, Dans les forêts de Sibérie, 2011.

Cyril vit en montagne depuis son plus jeune âge. Il vient d’apprendre d’un voisin qu’il faudra désormais prendre des précautions avec les autres pour éviter la contagion d'”un méchant virus ” et se faire vacciner au plus tôt. Cependant, il a déjà choisi de rester branché sur ce que la nature communique . Ces rapports sont sans risque; le face à face avec le ciel, le travail de la terre, l’escalade des cimes et le patinage sur les lacs. Ses potes habitent à courte distance dans la forêt. Pour se rencontrer “on fera des pas en arrière en attendant que le monde soit vacciné” .

Cet homme se nourrit du choix délibéré, du bon sens immédiat, du regard spacieux, du verger et du plaisir à transmettre à travers ses écrits l’attachement aux vécus sensoriels qu’il redécouvre chaque jour. Cela se passe au contact de l’air qu’il hume, des arbres qu’il caresse, des animaux qui l’accompagnent fidèlement et des végétaux qui lui enseignent le goût des saveurs et de l’immunité. Lors d’un rare échange téléphonique de chez un ami, un envoyé de presse lui pose cette question:

Que faites vous pour vous prémunir du COVID-19 et de ses variants? Il répond ainsi : Je reste là où je suis, à distance des hommes agités et des lieux fermés afin de pouvoir mieux explorer ce qui reste de cette magnifique aventure d’un temps vécu .

” L’incertitude au sujet de la fin de cette crise oblige à vivre dans l’instant. Le lendemain n’existe pas. Aucune projection n’est possible. Comme le pointent Brooks et al. (2020), ce qui a permis de tenir la période de confinement a été de l’être dans de bonnes conditions, mais surtout d’avoir une date de fin qui permettait la projection, la confiance. Les dates successives de sortie de confinement n’ont pas permis de se projeter dans une sortie sûre et certaine.

D’ailleurs, le déconfinement conserve un goût de non achevé : il ne renvoie pas à l’avant, rien n’est terminé, tout continue… Le coronavirus n’est pas mort.” D. Peyrat-Apicella et S. Gautier,
Réf Éthique et santé, 20 juin 2020.

Joe Acoury

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