Un rapport publié ce lundi par l’agence de notation Moody’s évoque la perte de 12 milliards de dollars au sein du système bancaire libanais, dont 5,7 milliards de dollars pour le seul mois de novembre, alors que l’Association des Banques du Liban (ABL) avait pourtant instauré un contrôle des capitaux limitant les transferts de fonds à l’étranger.

Ces informations ont été compilées à partir de données fournies par la Banque du Liban (BDL) elle-même alors qu’une enquête a été ouverte à ce sujet par la commission d’investigation spéciale de la Banque Centrale.

Selon Moody’s, les sorties importantes de capitaux en 2019 ont mis à rude épreuve le financement et la liquidité monétaires du Liban, induisant les banques du pays et la Banque du Liban à imposer des restrictions officieuses et officielles sur les dépôts en devises.

L’agence note également que les pénuries de dollars ont entraîné la mise en place d’un taux de change fictif pour la livre libanaise, qui était d’environ 2 200 pour un dollar au 15 janvier contre le taux de parité officiel de 1 507,5. Les dépôts des banques libanaises devraient continuer de baisser progressivement en raison des retraits de dollars et de livres libanaises et de nouvelles entrées de capitaux limitées.

Autre sujet d’inquiétude, la dollarisation des dépôts, qui mesure de l’aversion pour le risque et les inquiétudes quant à la pérennité du rattachement de la monnaie locale au dollar américain, a atteint 74,8% fin novembre, un sommet jamais vu depuis 11 ans.

Ce rapport indique que les banques libanaises devront lever un total de 1,9 milliard de dollars d’ici la fin de 2019 et 1,9 milliard de dollars supplémentaires d’ici le 30 juin 2020 pour respecter les dispositions de la circulaire de la banque centrale concernant l’augmentation du capital de ces dernières. Moody’s estime cependant que les augmentations de capital seront difficiles à réaliser, en particulier pour les banques avec un actionnariat diversifié, bien que la plupart des grandes banques, comme BLOM Bank, procèdent à des augmentations de capital avec un certain retard.

Le capital supplémentaire contribuera à stimuler les actifs étrangers des banques après les sorties de fonds importantes en 2019 dans un contexte de baisse de confiance des déposants, et enverra un signal positif aux déposants et aux contreparties des banques libanaises, telles que les banques correspondantes. Sinon, les paramètres de capital diminueront en raison d’une augmentation de la pondération des risques sur les euro-obligations souveraines à 150% par rapport à 100% en septembre 2019, pour refléter la notation équivalente au Caa du Liban. Toutefois, la pondération des risques sur les importantes expositions des banques aux devises étrangères à BdL a été maintenue à 50%.

En cas d’échec pour augmenter le capital, Moody’s estime que les banques libanaises pourraient faire face à certaines sanctions:

La Banque du Liban n’a pas précisé les sanctions qu’elle imposera aux banques qui ne sont pas en mesure de répondre à ses exigences. Cependant, le scénario le plus extrême serait de retirer une licence bancaire non conforme.

Le rapport de l’agence de notation Moody’s salue par ailleurs, l’augmentation réussie à hauteur de 262 millions de dollars du capital de la BLOM Bank, le 15 janvier dernier.

Une fois réalisée, l’augmentation du capital sera positive sur le plan du crédit, car elle renforcera les tampons d’absorption des pertes de BLOM Bank et soutiendra ses mesures de capital à un moment où le Liban (revue Caa2 pour révision à la baisse) est confronté à de graves difficultés fiscales, économiques et financières et au milieu de la paralysie politique et de manifestation de la société civile, qui ont commencé en octobre.
La banque a déclaré en novembre qu’elle s’attendait à affecter ses bénéfices de 2019 au titre de provisions, compte tenu de la détérioration des conditions du pays.

Parmi les difficultés auxquelles la BLOM Bank ferait face, Moody’s note plus particulièrement l’existence de prêts à hauteur de 200 millions de dollars, accordés à des clients de détail et à des petites et moyennes entreprises.

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