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Dans un contexte de tensions croissantes au Moyen-Orient, Israël, confronté à l’impossibilité de mener des frappes directes contre l’Iran, se tourne vers une stratégie de réponse politique. Georges Malbrunot, journaliste de renom, révèle que Tel Aviv pousse à la formation d’un “OTAN arabe” pour contrer la menace iranienne.

Face à l’impossibilité de répondre directement par des moyens militaires conventionnels, notamment en raison de l’interdépendance économique et des risques d’escalade, Israël propose une réplique politique sous forme d’une alliance militaire régionale. Cette “OTAN arabe” serait non seulement une démonstration de force collective, mais aussi un moyen de coordonner plus efficacement les défenses contre les agressions iraniennes avec notamment un système de pré-alerte. La proposition israélienne vise ainsi à créer un contrepoids régional à l’Iran, tout en renforçant la position des pays arabes face aux menaces sécuritaires.

Par ailleurs, un Otan Arabe et musulman, cela a déjà existé avec le Pacte de Bagdad qui a été un échec historique.

Un “OTAN arabe” synonyme de reconnaissance de l’Iran comme menace majeure et changement de stratégie défensive

L’Iran, une puissance régionale incontournable

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La proposition d’un “OTAN arabe”, notamment avancée par Israël, signifie implicitement la reconnaissance de l’Iran comme une puissance régionale prééminente, capable de menacer directement la sécurité des pays du Golfe. Avec ses capacités balistiques avancées, l’Iran a démontré à plusieurs reprises sa capacité à atteindre des cibles stratégiques dans la région, y compris les installations pétrolières et les capitales des États arabes. Cette menace croissante nécessite une réévaluation des stratégies de défense traditionnelles, qui jusqu’à présent s’appuyaient largement sur la protection offerte par des puissances extérieures comme les États-Unis et la France.

Vers une stratégie de défense plus autonome

La dépendance à long terme envers les protections tierces, telles que le traité de Quincy entre l’Arabie saoudite et les États-Unis ou les bases françaises dans le Golfe, a offert une sécurité relative mais a également exposé ces pays à des vulnérabilités externes et à des critiques internationales. En proposant un “OTAN arabe”, Israël suggère une transition vers une approche plus autonome et collective de la défense régionale, ce qui pourrait renforcer la capacité des pays arabes à gérer indépendamment leurs conflits régionaux et à réduire leur dépendance aux puissances occidentales, s’ils demeurent toutefois indépendants de la puissance israélienne.

Israël pour sa part s’ouvre un nouveau marché pour son industrie militaire, un marché jusque là pris par les Etats-Unis principalement qui pourraient voir d’un mauvais oeil cette intrusion. Il se pose des questions sur plusieurs points majeurs, comme par exemple l’accès par Israël des systèmes de défense des pays arabes.

Si cette approche, face à la perte d’influence des puissances occidentales dans un certain nombre de pays, notamment en Afrique face au bloc Russie/Chine, pourrait s’avérer être une garantie pour les pouvoirs en place dans les pays de la péninsule arabique, elle semble toutefois difficilement pouvoir être mise en oeuvre.

Renforcement d’une approche conflictuelle

Cependant, la formation d’une alliance militaire explicitement dirigée contre l’Iran pourrait exacerber les tensions régionales. Plutôt que de maintenir une posture défensive ou de chercher des solutions diplomatiques, un “OTAN arabe” pourrait être perçu comme une escalade dans l’approche conflictuelle, poussant potentiellement la région vers plus d’instabilité. Cette stratégie risque de provoquer des réponses militaires accrues de la part de l’Iran, augmentant ainsi le risque de conflits ouverts.

Implications pour la stabilité régionale

Le défi pour les pays arabes sera de trouver un équilibre entre la nécessité de renforcer leur sécurité collective et le risque d’aggraver les tensions avec l’Iran. La formation d’une telle alliance nécessiterait une diplomatie subtile et une planification stratégique pour éviter d’aliéner complètement l’Iran, tout en préparant les pays membres à une défense commune efficace. La réussite de ce projet dépendra également de la capacité des pays arabes à surmonter leurs différences internes et à présenter un front uni face aux menaces régionales.

Vers une nouvelle alliance régionale?

Israël promeut l’idée d’une alliance militaire régionale similaire à l’OTAN, incluant les principales puissances arabes du Golfe. Ce projet, qualifié de “voeu pieux” par certains experts, cherche à unifier des pays traditionnellement réticents à entrer en conflit direct avec l’Iran. “Ni Riyad, ni Abou Dhabi ne veulent de guerre contre l’Iran”, souligne le spécialiste. Toutefois, Mohammed bin Salman (MBS), le prince héritier saoudien, pourrait être attiré par une approche plus transactionnelle, note Georges Malbrunot

La bombe nucléaire saoudienne : un jeu dangereux

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L’approche transactionnelle évoquée pourrait aboutir à un développement nucléaire saoudien. Historiquement, la région a été marquée par une course aux armements nucléaires, débutée dans les années 80 lorsque l’Iran a lancé son programme militaire en réponse au programme irakien. Aujourd’hui, l’acquisition potentielle de l’arme nucléaire par l’Arabie saoudite risquerait de raviver cette course, déstabilisant davantage la région.

Efficacité des défenses aériennes : entre réalité et prétention

Sur le plan militaire, la récente escalade des tensions a été marquée par l’envoi de 300 missiles et drones par Téhéran, principalement interceptés par les forces américaines, françaises, anglaises, jordaniennes et par le système de défense Iron Dome israélien. Cependant, le taux d’interception effective est sujet à controverse. Selon des sources officielles, Iron Dome n’a dû faire face qu’à environ 50 missiles, et 5 ont réussi à atteindre le territoire israélien. Cela met en lumière un taux d’échec d’interception de 10%, bien supérieur aux 0,6% revendiqués par les autorités israéliennes.

Avec une bombe nucléaire, un seul missile qui passe suffit à détruire un pays comme Israël.

L’échec du Pacte de Bagdad et les implications pour un “OTAN arabe”

Retour sur le Pacte de Bagdad : Ambitions et Désillusions

Le Pacte de Bagdad, formellement connu sous le nom de Pacte de l’Organisation du Traité de l’Asie Centrale, fut signé en 1955 entre l’Irak, la Turquie, le Pakistan, l’Iran et le Royaume-Uni. Cette alliance militaire, inspirée par la Guerre Froide, visait à contenir l’expansion soviétique au Moyen-Orient. Cependant, le pacte s’est effondré après le coup d’État en Irak en 1958, qui a vu une nouvelle administration hostile à l’Ouest prendre le pouvoir.

Les causes profondes de l’échec

Plusieurs facteurs ont contribué à l’échec du Pacte de Bagdad, illustrant les défis inhérents à la coopération régionale au Moyen-Orient. Premièrement, le manque d’adhésion populaire et le sentiment anti-occidental dans les États membres, exacerbé par le soutien du pacte à des régimes perçus comme des marionnettes de l’Occident. Deuxièmement, les rivalités internes et les méfiances historiques entre les membres ont sapé l’unité, empêchant une coopération efficace.

Or tout comme les pays du Pacte de Bagdad, les relations entre pays arabes sont marquées par des rivalités, notamment par exemple entre l’Arabie saoudite et le Qatar, ou encore des revendications territoriales.

Parallèles avec l'”OTAN arabe”

Aujourd’hui, alors qu’Israël propose la création d’un “OTAN arabe”, les fantômes du Pacte de Bagdad résonnent comme un avertissement. Les défis sont nombreux : les rivalités géopolitiques entre les États arabes, le manque de confiance mutuelle, et les craintes d’aggraver les tensions avec l’Iran. En outre, la diversité des régimes politiques et des orientations stratégiques dans la région rend difficile la formation d’une alliance cohérente.

Implications pour la sécurité régionale

La proposition d’Israël nécessite une évaluation prudente des leçons du passé. Un “OTAN arabe” devra surmonter les obstacles qui ont jadis entravé le Pacte de Bagdad, notamment en assurant que l’alliance reflète les intérêts et les aspirations des peuples de la région, et non seulement ceux de leurs dirigeants ou de puissances extérieures. De plus, une telle alliance devrait œuvrer à des solutions diplomatiques et de sécurité qui renforcent la stabilité régionale sans provoquer de nouvelles hostilités.

Les obstacles internes à la formation d’un “OTAN arabe”

La question chiite : un défi de cohésion interne

L’un des défis majeurs à la formation d’un “OTAN arabe” réside dans la composition démographique complexe des pays membres potentiels, en particulier la présence significative de minorités chiites. Dans des pays comme Bahreïn et l’Arabie Saoudite, les chiites représentent une part importante de la population, souvent concentrée dans des régions stratégiquement et économiquement vitales, comme les zones pétrolières de l’Est saoudien.

Bahreïn a été le théâtre de révoltes notables en 2011, largement portées par la majorité chiite qui se sent marginalisée sous le régime sunnite. Ces tensions sectaires internes pourraient compromettre l’unité nécessaire à une alliance militaire régionale efficace, car elles exposent les fissures internes qui pourraient être exploitées par des adversaires comme l’Iran.

Mécontentement populaire et la question palestinienne

Un autre obstacle majeur à l’adhésion populaire à un “OTAN arabe” est le traitement du conflit israélo-palestinien par les gouvernements arabes. Malgré les récents accords de normalisation entre Israël et certains États arabes, une grande partie de l’opinion publique arabe reste profondément insatisfaite de la manière dont leurs dirigeants gèrent la question palestinienne. Les accords, perçus comme des trahisons par certains segments de la population, exacerbent le sentiment d’aliénation et de méfiance envers leurs propres gouvernements, ainsi que la collaboration avec Israël, qui est au cœur de l’idée d’un “OTAN arabe”.

En Jordanie même ou 60% de la population est d’origine palestinienne, de nombreuses manifestations ont lieu notamment en soutien avec le Hamas.

Implications pour la sécurité et la stabilité régionale

Ces problèmes internes posent des défis significatifs pour la sécurité et la stabilité régionale, rendant la formation d’une alliance militaire cohérente plus compliquée. La présence de minorités chiites, potentiellement perçues comme alignées avec l’Iran, soulève des questions de loyauté et de sécurité nationale au sein des États membres de l’alliance proposée. De plus, le mécontentement généralisé concernant la question palestinienne peut limiter la capacité des gouvernements arabes à s’engager pleinement dans une alliance perçue comme bénéfique à Israël.

Des obstacles économiques à l'”OTAN arabe”

La contrebande comme moteur économique

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Dans le contexte complexe des relations au Moyen-Orient, certains pays arabes ont trouvé des bénéfices économiques dans les sanctions imposées à l’Iran. Par exemple, Dubaï, plaque tournante commerciale de la région, a développé une économie partiellement dépendante de la contrebande avec l’Iran. Selon des estimations, jusqu’à un tiers de l’économie de Dubaï pourrait être attribué à des échanges informels ou illégaux avec l’Iran. Cette dynamique soulève des questions sur les motivations économiques des pays de la région à adhérer à une alliance militaire stricte qui pourrait compromettre ces flux économiques bénéfiques.

Impact des sanctions et intérêts économiques divergents

La dépendance à ces échanges illégaux crée un dilemme pour les États du Golfe. D’un côté, ils subissent une pression internationale pour se conformer aux sanctions contre l’Iran, visant à limiter son influence régionale et son programme nucléaire. D’un autre côté, la contrebande avec l’Iran est une source de revenus substantielle, soutenant non seulement des entreprises locales mais aussi des secteurs économiques entiers. Cela pose un problème de cohérence pour ces pays lorsqu’il s’agit de se positionner clairement contre l’Iran dans le cadre d’un “OTAN arabe”.

Risques et répercussions pour une alliance militaire

La participation à une alliance comme l'”OTAN arabe”, axée sur la sécurité et potentiellement hostile à l’Iran, pourrait forcer ces pays à reconsidérer leurs activités économiques informelles. Cela pourrait entraîner des perturbations économiques significatives et des mécontentements locaux, surtout dans les zones où l’économie est fortement liée à la contrebande. En outre, l’engagement dans une telle alliance pourrait exposer ces pays à des représailles économiques ou politiques de la part de l’Iran, ce qui pourrait à son tour affecter la stabilité régionale.

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