La désorientation, par Mohamed El Bachir

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En faisant le ménage dans mes veilles ”clefs USB”, j’ai trouvé, entre autres, deux textes datant de 2006. L’un, intitulé «En un combat douteux», l’autre, «Réponse ouverte à José Bové».

La campagne référendaire contre le Traité constitutionnel européen (TCE) et ses conséquences politiques en sont les sujets principaux. Et jugeant que la situation sociale, économique et politique actuelle en est une conséquence, j’ai décidé de soumettre ces articles  de nouveau au débat sous le titre la « Désorientation ».

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                                                        En un combat douteux

                                                  ( 6 Décembre 2006)  Mohamed El Bachir

Le sens des mots

La langue française associant les termes «cum» et «sensus» signifiant «avec» et «sens» a donné le mot «consensus».

Ce terme veut dire «être d’avis avec» ou «être du même avis» et le verbe qui en découle est « consentir ».

Le contraire de «consensus» est «dissension».

Du consensus à la dissension

Le consensus

La campagne référendaire a été l’occasion d’une alchimie féconde entre des citoyens, des syndicalistes et des politiques. Cette alchimie a été possible parce qu’elle avait un sens et que son objet, le Traité Constitutionnel Européen, était bien identifié. De même, l’élaboration du programme «ce que nous voulons» a pu prendre corps parce que là, encore, la rencontre entre «avec» et «sens» allait de soi. Avec conviction, nous avons soutenu que le programme qui était au cœur du travail collectif était prioritaire, et que la question de celui ou celle qui le porterait était secondaire.

C’était faire l’impasse sur un élément de taille: celui de «l’ego» des prétendants au trône!

Dans une contribution «Y. Salesses ou Marie Georges Buffet?  Ne nous fâchons pas»  du 21 novembre 2006, j’écrivais: «l’idéal serait que les candidats choisissent entre eux la ou le meilleur…» en s’inspirant du proverbe de W. Blacke:

 «Quel est l’acte sublime? S’effacer devant l’autre…»

Mais le 9 et 10 décembre à St Ouen, les militants de la gauche antilibérale qui s’étaient donné rendez-vous pour désigner leur candidat, se sont trouvés confronté à l’avenir même de leur mouvement .

Le compte rendu des choix des collectifs a mis en évidence le choix majoritaire pour MGB à 55%.

Le Collectif National, a récusé ce choix en introduisant deux nouvelles conditons:

La ou le candidat ne peut pas être la ou le porte parole d’un Parti.

Des collectifs locaux auraient été crées par les communistes, à la hâte à seule fin de «gonfler» les voix en faveur de MGB…Création de nouvelles règles et accusations gratuites pour justifier le non respect du double consensus!

La dissension

La règle du double consensus fut donc mise en avant pour récuser celle arrivée en tête dans le choix des collectifs locaux, en arguant du fait que la candidature de MGB serait perçue par les électeurs comme étant celle du P.C.F. Au sujet de ce postulat, maintes fois ressassé, une remarque s’impose.

Lors de la campagne référendaire, la bataille politique n’a pas été perçue par l’électeur comme étant celle du PCF, et pour cause: la campagne était unitaire. Les médias, du reste, ne s’y sont pas trompé en s’attardant davantage sur la signification de la campagne contre le TCE et ses conséquences. D’où la dureté de cette bataille politique et médiatique.

Aujourd’hui, un élan unitaire, franc et massif, de la part des différents portes parole serait perçu de la même façon pour la campagne présidentielle et je n’en doute pas.

Mais il ne faut pas prendre les électeurs  pour des imbéciles. Ce n’est que dans la clarté et la transparence dans le mouvement unitaire que se dissiperont les malentendus.  Ce n’est que l’engagement sincère dans la bataille politique de Clémentine Autain, d’Yves Salesses, de C. Debons, J.L.Mélenchon. et des autres  que le peuple mesurera la profondeur de nos convictions et la crédibilité de «ce que nous voulons».

Pour asseoir une grande ambition collective et unitaire, il faut réaffirmer la volonté tenace «de la ou le candidat, la ou le plus crédible ».

Il ne faut pas perdre de vue, qu’il s’agit aujourd’hui de voter pour une élection présidentielle et que les voix des couches populaires ne s’exprimeront pas pour le ou la première venue. Affirmer le contraire relève plus de l’amateurisme politique ou de la démagogie et montre une profonde méconnaissance du peuple, voire un certain mépris de celui-ci.

Lutte de classes et citoyennisme

On ne peut pas mettre en doute la sincérité de nombreux citoyens à vouloir une véritable politique de gauche. Mais ceux qui parlent au nom du «mouvement social»,  ont ceci en commun: le rejet de «l’organisation», du «Parti».

Je nommerai  cette mouvance politique, le ”citoyennisme”.

 Le ”citoyennisme” a cette particularité : l’action immédiate. C’est ce qui constitue sa force et en même temps sa faiblesse, car contrairement aux apparences, il ne s’inscrit pas dans une perspective d’avenir.

A la lourdeur démocratique d’une organisation, le militant ”citoyenniste”  oppose une action pragmatique, voire instinctive. Puisqu’il n’a de compte à rendre à personne, il devient  le militant de l’immédiateté. Il flirte volontiers avec un certain anti- communisme.

 Le parti communiste est lui même traversé  par ce ”citoyennisme”.

«La démocratie participative» et «faire la politique autrement» sont l’alpha et l’oméga de ce système de pensée mais dans la pratique, et le congrès de Saint Ouen l’a confirmée, la démocratie n’est pas plus participative dans les collectifs antilibéraux que dans les organisations traditionnelles. Quant à la «Politique Autrement»,  elle met en évidence des manigances et des manipulations qui n’ont rien à envier à celles des dirigeants des organisations traditionnelles.

Cette mouvance ”citoyenniste”  me fait penser à un vol d’étourneaux et je crains hélas qu’après son passage, nous n’aurions plus qu’à compter les plumes perdues…

                                                 Réponse ouverte à José Bové

                                                  (5 Décembre 2006 )

En tant que communiste, il m’est impossible de garder le silence face à la «Lettre de José Bové aux collectifs» (1), mais avant de répondre, je voudrais rappeler certaines de mes positions politiques au lendemain du 29 Mai.

Dans un article intitulé «Les défis du 29 mai», paru dans le journal l’Humanité du 4 juin 2005, j’écrivais qu’ «Autour du  NON à un Traité sacralisant le libéralisme, une alchimie a soudé des citoyens et des militants, des associations,  des syndicats et des forces politiques progressistes…Encore une fois, c’est l’unité dans le respect qui a permis d’imposer un débat de fond au sein de la société française et réconcilier le citoyen avec la politique… Des défis qui invitent chaque acteur du « NON » de Gauche à  la modestie, à la sérénité et à la lucidité. »

Lors de la campagne référendaire, je clamais, à qui voulait bien l’entendre, que la campagne référendaire était déjà une victoire politique  mais j’ajoutais que : « Une victoire du «Non» le 29 mai serait lourde de responsabilités pour les forces de Gauche qui ont appelé à ce « Non ».

Dans l’article cité ci-dessus, j’introduisais l’idée suivante : «Il faut continuer à préserver cette alchimie qui a su marier mouvement social et mouvement politique… Mais après le 29 mai, que faire?»

C’est ainsi que j’avais posé déjà le principe d’une candidature unitaire dès juin 2005 et ceci pour deux raisons:

1°) En cohérence avec les mouvements initiés autour du référendum, une lutte politique pour un « Non » devait être prolongée par une bataille politique pour un « Oui.»   

2°) Stratégiquement, en bons joueurs d’échecs, il fallait mettre le Parti Socialiste sous pression et avancer le pion « candidature unitaire anti-libérale » afin de ne pas laisser à ce parti le champ libre pour préparer sa conférence nationale du 11 novembre 2005.

Ceci d’autant plus que, le 4 juin 2005, son Premier Secrétaire déclarait sans ambiguïté : 

« …C’est le P.S qui doit fixer la ligne du rassemblement, son contenu et ses formes, et non se les faire imposer de l’extérieur… Que Marie- Georges Buffet ou Olivier Besancenot veuillent faire croire que la  France est devenue trotskiste, c’est compréhensible. Que nous nous  laissions abuser serait répréhensible.» (2)

                                                   M. El Bachir

(1) https://bellaciao.org/fr/Lettre-de-Jose-Bove-aux-collectifs

(2) https://www.vie-publique.fr/discours/149211-declaration-de-m-francois-hollande-premier-secretaire-du-ps-sur-le-re

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