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Les États théocratiques, gouvernés par des principes religieux et souvent dirigés par des chefs religieux, ont une dynamique unique qui les pousse à auto-entretenir leur légitimité par le biais de conflits constants. Ces conflits prennent souvent la forme de guerres religieuses, semblables à celles qui ont ravagé l’Europe avant les traités de Westphalie de 1648. Cet article explore pourquoi et comment ces États théocratiques se retrouvent piégés dans un cycle perpétuel de guerre et examine les implications de ce phénomène pour la stabilité mondiale.

Légitimité et Théocratie : Une Interdépendance Inextricable

La Source de Légitimité

Dans une théocratie, l’autorité politique est directement dérivée de l’autorité divine. Les dirigeants sont souvent considérés comme les représentants de la volonté de Dieu sur Terre. Cette structure confère une légitimité incontestable tant que la population croit en cette connexion divine. Cependant, pour maintenir cette croyance et cette légitimité, les dirigeants doivent constamment démontrer leur dévotion religieuse et leur capacité à défendre et propager la foi.

La Guerre comme Outil de Légitimité

La guerre contre les infidèles ou les hérétiques devient ainsi un moyen crucial pour les dirigeants théocratiques de prouver leur piété et leur engagement envers la foi. Les conflits permettent de galvaniser la population, de distraire des problèmes internes et de renforcer l’image du dirigeant en tant que protecteur et propagateur de la foi. La guerre devient donc un outil politique indispensable pour maintenir la légitimité.

Le Cycle de Conflit : Une Spirale Infernale

Les Ennemis Extérieurs

Les États théocratiques se définissent souvent en opposition à des ennemis extérieurs, généralement d’autres confessions ou sectes religieuses. La guerre contre ces ennemis est justifiée comme une défense de la vraie foi contre les menaces extérieures. Cette perpétuation du conflit permet de maintenir un état de mobilisation permanente, nécessaire pour justifier le pouvoir théocratique.

Les Ennemis Intérieurs

Outre les ennemis extérieurs, les théocraties doivent également gérer les dissensions internes. Toute forme de déviation ou de réforme religieuse est perçue comme une menace existentielle. La répression des hérésies internes est donc essentielle pour préserver l’homogénéité religieuse et, par extension, la stabilité politique. Cette lutte interne alimente également le cycle de conflit, car les dirigeants doivent continuellement prouver leur dévouement à la pureté de la foi.

Le Destin de la Guerre Infinie

L’absence de mécanismes de résolution pacifique des différends religieux dans les théocraties conduit à un état de guerre perpétuel. Chaque génération de dirigeants doit démontrer sa légitimité par de nouveaux conflits, créant un cercle vicieux où la guerre devient une condition permanente. Ce phénomène rappelle la période pré-Westphalienne de l’Europe, où les guerres de religion étaient endémiques en l’absence d’un cadre juridique international pour la paix.

Vers une Situation Pré-Westphalienne

La Paix de Westphalie : Une Parenthèse Historique

Les traités de Westphalie de 1648 ont marqué un tournant en mettant fin aux guerres de religion en Europe. Ils ont établi le principe de souveraineté nationale, où chaque État avait le droit de déterminer sa propre religion sans ingérence extérieure. Cependant, les États théocratiques modernes, en refusant cette séparation entre religion et politique, risquent de revenir à une situation pré-Westphalienne où la guerre de religion est la norme.

Les Implications Modernes

Dans le contexte moderne, les guerres de religion menées par les États théocratiques ont des implications mondiales. La globalisation et les technologies modernes amplifient les conflits locaux, les transformant en crises internationales. Les réfugiés, le terrorisme et l’instabilité régionale sont quelques-unes des conséquences directes de ces conflits théocratiques.

L’Impossibilité de la Paix Durable

Tant que les États théocratiques subsistent, le rêve d’une paix durable reste illusoire. Les fondements mêmes de ces États exigent un état de guerre permanent pour maintenir la légitimité de leurs dirigeants. L’idée de souveraineté nationale, fondement de la paix de Westphalie, est incompatible avec la vision théocratique du monde, où la foi transcende les frontières nationales et justifie l’intervention extérieure.

Conclusion

Les États théocratiques sont pris dans un cycle infernal de guerre et de légitimité, semblable à celui de l’Europe pré-Westphalienne. Leur dépendance à la guerre pour maintenir leur légitimité religieuse et politique les condamne à des conflits incessants, à la fois internes et externes. Cette dynamique pose un défi majeur à la stabilité mondiale et remet en question la possibilité d’une paix durable dans les régions dominées par des théocraties. Pour briser ce cycle, une redéfinition radicale de la relation entre religion et politique est nécessaire, un défi immense dans le contexte actuel.

Les États Théocratiques et la Guerre : Le Cas de l’Iran, d’Israël et de l’Arabie Saoudite

Introduction

Les États théocratiques modernes, tels que l’Iran chiite et l’Arabie Saoudite sunnite, ainsi que l’État d’Israël avec ses conflits militaires contre le Hezbollah et les Houthis, illustrent comment la légitimité de ces régimes est souvent maintenue par des conflits permanents. Ces conflits, qu’ils soient directs ou par procuration, révèlent une dynamique similaire à celle des guerres de religion européennes pré-Westphaliennes, où la guerre devient un outil essentiel pour maintenir l’autorité politique et religieuse.

L’Iran Chiite : Une Théocratie en Guerre Permanente

Contexte et Légitimité

Depuis la révolution islamique de 1979, l’Iran est une théocratie chiite gouvernée par le clergé sous la direction du Guide Suprême. La légitimité de ce régime repose sur sa capacité à défendre et propager l’Islam chiite. Cette légitimité est renforcée par des conflits constants avec des ennemis perçus, tant à l’intérieur qu’à l’extérieur.

Les Conflits par Procuration

L’Iran utilise des groupes proxies pour étendre son influence et maintenir un état de guerre permanent. Par exemple :

  1. Hezbollah au Liban : Le Hezbollah est une milice chiite soutenue par l’Iran, engagée dans des conflits réguliers avec Israël. Ce soutien permet à l’Iran de projeter son pouvoir tout en affirmant sa position de leader du monde chiite.
  2. Houthis au Yémen : En soutenant les Houthis dans leur conflit contre le gouvernement yéménite et les forces de la coalition menée par l’Arabie Saoudite, l’Iran renforce son influence régionale et s’oppose indirectement à l’Arabie Saoudite sunnite.
  3. Hamas à Gaza : L’extrémisme sunnite, incarné par des groupes comme le Hamas, s’engage activement dans une confrontation perpétuelle avec l’État d’Israël, qu’il perçoit comme une théocratie juive hostile. Le Hamas, par ses actions militantes et terroristes, cherche à affaiblir et à délégitimer Israël dans la région. Cette lutte incessante l’a conduit à chercher des alliances improbables, notamment avec l’Iran chiite. Malgré leurs différences religieuses et idéologiques fondamentales, le Hamas et l’Iran partagent l’objectif commun de résister à Israël, considéré comme leur ennemi commun. Cette alliance repose sur le principe que “l’ennemi de mon ennemi est mon ami”, une dynamique géopolitique complexe où des intérêts stratégiques et la volonté de déstabiliser un adversaire commun prévalent sur les divergences théologiques.

Le Conflit avec Israël

L’opposition à Israël est un pilier central de la politique étrangère iranienne. Cette opposition permet à l’Iran de se présenter comme le défenseur des Palestiniens et de l’Islam contre l’ennemi sioniste. Le soutien à des groupes comme le Hezbollah et le Hamas en Palestine renforce cette image et maintient un état de tension permanente.

Israël : Une Nation en Conflit Permanent

Contexte et Légitimité

Israël, bien que non théocratique dans le même sens que l’Iran ou l’Arabie Saoudite, est profondément influencé par des éléments religieux dans sa politique et ses conflits. La légitimité de l’État d’Israël est constamment renforcée par la perception de menaces existentielles de la part de ses voisins.

Les Conflits avec le Hezbollah et les Groupes Palestiniens

  1. Hezbollah : Les affrontements réguliers avec le Hezbollah au Liban sont un exemple de conflit où la légitimité du gouvernement israélien est renforcée par la nécessité de défendre ses frontières et ses citoyens contre une menace constante.
  2. Groupes Palestiniens : Les conflits permanents avec des groupes armés palestiniens, notamment dans la bande de Gaza, permettent au gouvernement israélien de maintenir un état de mobilisation nationale et de justifier des politiques de sécurité rigoureuses.

L’Arabie Saoudite : La Théocratie Sunnite en Opposition Permanente

Contexte et Légitimité

L’Arabie Saoudite est une monarchie absolue gouvernée selon les principes du wahhabisme, une interprétation rigoureuse de l’Islam sunnite. La légitimité de la famille royale saoudienne repose sur sa revendication de protéger les lieux saints de l’Islam et de promouvoir le sunnisme.

Le Conflit avec l’Iran Chiite

  1. Guerre Iran-Irak : Dans les années 1980, l’Arabie Saoudite a soutenu l’Irak de Saddam Hussein dans sa guerre contre l’Iran, un conflit qui a duré huit ans et qui a été largement perçu comme une lutte entre l’Islam sunnite et chiite.
  2. Guerres avec Daech et les Houthis : L’Arabie Saoudite s’est engagée dans une guerre directe au Yémen contre les Houthis, soutenus par l’Iran, et a lutté contre les groupes extrémistes sunnites comme Daech. Ces conflits renforcent la légitimité de la monarchie saoudienne en tant que défenseur du sunnisme contre les menaces chiites et extrémistes.
  3. Guerres contre Daech en Irak et en Syrie : Elle a été largement perçue comme un conflit sunnite-chiite en raison des implications religieuses et sectaires profondes impliquées. Daech, un groupe sunnite extrémiste, a cherché à imposer son interprétation rigoriste de l’islam et à établir un califat dans la région, menaçant ainsi les gouvernements à majorité chiite en Irak et en Syrie. Pour contrer cette menace existentielle, les forces gouvernementales, soutenues par des milices chiites et des forces alliées, ont formé des coalitions pour combattre Daech. Ce conflit a exacerbé les tensions sectaires préexistantes, attisées par des décennies de rivalités politiques et religieuses, et a exacerbé les divisions entre les communautés sunnite et chiite dans la région. La lutte contre Daech est devenue un théâtre où les identités sectaires ont été mobilisées, amplifiant les dynamiques de conflit religieux et de rivalités géopolitiques au Moyen-Orient.

Vers un Extrémisme et une Destruction Globale

La Dynamique de l’Extrémisme

Les conflits constants entre les théocraties chiites et sunnites, ainsi que les affrontements réguliers entre Israël et ses voisins, créent un environnement où l’extrémisme est à la fois une conséquence et un moteur. Chaque camp utilise la religion pour justifier ses actions, radicalisant ainsi leurs populations et créant un cycle de violence difficile à briser.

La Destruction Globale

Les conflits régionaux entre l’Iran et l’Arabie Saoudite, ainsi que ceux impliquant Israël, ont des répercussions mondiales. Les guerres par procuration, le terrorisme, et les crises humanitaires résultant de ces conflits alimentent l’instabilité globale. Les rivalités religieuses exacerbées par les États théocratiques entraînent une destruction massive, tant sur le plan humain qu’infrastructurel.

Le Destin de la Guerre Infinie

Comme en Europe avant les traités de Westphalie, les théocraties modernes semblent destinées à des conflits sans fin. Tant que la légitimité de ces régimes dépendra de leur capacité à défendre et à propager leur version de la foi, la paix durable restera hors de portée. Les conflits théocratiques perpétuent une instabilité qui menace non seulement la région, mais le monde entier.

Conclusion

L’Iran chiite, l’Arabie Saoudite sunnite, et Israël illustrent comment les États théocratiques et religieusement influencés auto-entretiennent leur légitimité par des conflits constants. Ces guerres, souvent menées par procuration, perpétuent un cycle de violence et d’extrémisme similaire à celui de l’Europe pré-Westphalienne. Pour briser ce cycle et atteindre une paix durable, une redéfinition radicale de la relation entre religion et politique est nécessaire, un défi immense dans le contexte actuel.

Bernard Raymond Jabre

Bernard Raymond Jabre
Bernard Raymond Jabre, Etudes scolaires à Jamhour puis à l’Ecole Gerson à Paris, continua ses études d’économie et de gestion licence et maitrise à Paris -Dauphine où il se spécialise dans le Master « Marchés Financiers Internationaux et Gestion des Risques » de l’Université de Paris - Dauphine 1989. Par la suite , Il se spécialise dans la gestion des risques des dérivés des marchés actions notamment dans les obligations convertibles en actions et le marché des options chez Morgan Stanley Londres 1988 , et à la société de Bourse Fauchier- Magnan - Paris 1989 à 1991, puis il revint au Liban en 1992 pour aider à reconstruire l’affaire familiale la Brasserie Almaza qu’il dirigea 11 ans , puis il fonda en 2003 une société de gestion Aleph Asset Management dont il est actionnaire à 100% analyste et gérant de portefeuille , de trésorerie et de risques financiers internationaux jusqu’à nos jours.

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