Emmanuel Macron depuis la Résidence des Pins, le 6 août 2020. Crédit Photo: Dalati & Nohra

1- La présence multiforme de la France au Liban

La France est historiquement présente au Liban par le rôle qu’elle s’est arrogée de «Protectrice des chrétiens d’Orient» et par ses congrégations religieuses, gérant un important secteur éducatif, qui a longtemps formé l’élite libanaise, jadis majoritairement francophone, avant d’être supplantée par l’anglais. L’Université Saint Joseph (USJ), l’université pontificale gérée par les Pères Jésuites, le lycée Français dans ses diverses branches régionales, de même que les établissements scolaires des Pères Jésuites, des Frères des Écoles Chrétiennes, des Frères Maristes, des religieuses de l’Ordre des Dominicains et des Franciscaines, le Collège Protestant. Enfin, naturellement, l’Institut Français pour le Proche Orient (IFPO) qui s’est distingué sous la direction de l’islamophiliste François Burgat, –dans son double rôle d’«idiot utile du terrorisme islamique» et de «tonton flingueur de la bureaucratie française»– par des analyses fantaisistes qui ont fourvoyé la France dans le désastre de Syrie.

A- Les membres français du Conseil Européen des Relations extérieures: Chef de file de la guerre médiatique contre la Syrie, la France est également présente via les membres français du Conseil Européen des Relations Extérieures (ECFR) European Council for Foreign Relations, une structure financée conjointement par Heinrich Böll Stiftung et Open Society Foundation de George Soros.

Parmi les membres français du Conseil ont figuré notamment Basma Kodmani, première porte parole de l’opposition off shore syrienne pétro monarchique; Natalie Nougayrède, ancienne directrice du Journal le Monde et créatrice des blogs des services parallèles français, notamment «l’œil borgne sur la Syrie» d’Ignace Leverrier, alias Pierre Wladimir Glasman, ancien chiffreur de l’ambassade de France à Damas et connu sous le sobriquet d’Al Kazzaz au moment du déclenchement de la guerre de Syrie; Parmi les autres membres figurent Bernard Kouchner, ministre transfuge socialiste des Affaires étrangères du Nicolas Sarkozy, déclencheur de la guerre de Syrie, et de son épouse Christine Ockrent, à l’époque directrice de France 24… Autrement dit les chefs de file de la guerre médiatique contre la Syrie.

Il n’est pas indifférent de rappeler à ce propos que le Conseil Européen des Relations Extérieures a alloué, en 2012, une subvention substantielle de l’ordre de 2 millions d’euros à François Burgat en vue d’animer une étude collective sur «la transition dans les pays arabes». Ce qui pourrait expliquer la fébrilité de cet incubateur intellectuel de deux islamistes notoires, son thésard Nabil Ensari et le djihadologue Romain Caillet, «fiché S» et son rôle de tonton flingueur de la bureaucratie française dans la traque de toute pensée dissidente. Pour aller plus loin sur ces thèmes,

2- La France: «La tendre mère des Libanais» ou une “marâtre”?

La France a favorisé l’emigration chiite vers l’Afrique en vue de réduire l’importance numérique chiite dans le recensement démographique visant à la répartition sur une base confessionnelle du pouvoir dans le système constitutionnel libanais en vue de confier les rênes du gouvernement au tandem maronite sunnite afin de faire du Liban le point de jonction de l’Islam et de la chrétienté à un moment charnière de l’expansion économique européenne vers le flanc sud de la Méditerranée. Avec pour objectif ultime de conférer un primat maronite au «pays des cèdres, du lait et du miel», non pour en faire un réduit chrétien comme se sont appliqués à le faire les milices chrétiennes durant la guerre interconfessionnelle (1975-1990), mais «un Foyer National Chrétien» symétrique au «Foyer National Juif» de la promesse Balfour (1917) de la Grande Bretagne.

Une lecture fractale de cette séquence historique révèle que la France «La tendre mère» des Libanais n’a pas été si tendre que cela, ni maternelle. Le pays qui a institutionnalisé et instrumentalisé le confessionnalisme du Liban aura procédé à une répartition du travail dans ses colonies sur une base raciale.

La permanence de la dénomination de rues baptisées du temps du mandat français au Liban (1923-1943), telles qu’ Ernest Renan, le grand déchiffreur du mystère libanais pour le compte des services français; Maurice Barrès, le chantre de l’identité française, thématique récurrente du débat public en France avec son cortège de stigmatisations, ou encore du Général Henri Gouraud, artisan du grand Liban, mais dépeceur du bassin historique de la Palestine; Ou enfin Georges Picot, le négociateur maladroit face à Sykes du partage du Levant en zones d’influence franco-britanniques, témoignent de la persistance d’une certaine forme de servitude volontaire du Liban à l’égard du legs colonial.

Particulièrement Henri Gouraud et Georges Picot, sur des grandes artères de la capitale libanaise, artisans de la balkanisation du Monde arabe. Gouraud, l’homme qui captura, en 1898, Samory Touré, le chef mandingue, qui s’opposait aux colonisateurs du Soudan français (Mali); Gouraud, l’une des figures importantes de l’histoire de la colonisation française, l’homme qui colonisa le Niger, le Tchad et la Mauritanie, l’homme qui sonna la charge contre les résistants syriens à la bataille de Mayssaloune (1925), dans laquelle périra le ministre syrien de la défense, Youssef Al Azmeh, ainsi que près de 400 des siens dans la bataille fondatrice de la conscience nationale syrienne.

Cent ans après la première vague d’émigration libanaise en Afrique, il importait que ce fait soit souligné et qu’il soit procédé à une décolonisation des mentalités.

La France est en outre présente via l’Agence Française pour le Développement (AFP). Un rapport de la Cour des comptes de France publié le 19 juin 2022, évalue à 214 millions d’euros l’aide publique française envoyée au Liban entre 2020 et 2022. Mais, l’instance chargée du contrôle des dépenses publiques françaises souligne que cette augmentation du soutien financier au pays devrait être mieux coordonnée. L’AFD s’est distinguée pour être l’instrument d’accompagnement de la stratégie d’influence de la France dans son pré-carré africain, l’Afrique Occidentale et Équatoriale francophone. L’infiltration israélienne en Afrique occidentale s’est faite avec l’accord de la France qui souhaitait défendre son pré carré africain en tandem avec Israël, faisant du Mali, «la porte d’entrée» de l’État Hébreu vers l’Afrique francophone, avant que le Mali ne répudie son alliance avec son ancien colonisateur.

Une cible idéale en ce que le Mali constitue le plus grand pays musulman d’Afrique occidentale, où la finance islamique y prospère, alors que les Maliens depuis une décennie se détournaient progressivement de la France vers les pétromonarchies et que la Chine jouit d’un prestige certain du fait de sa restauration du centre de documentation islamique de Tombouctou. Au–delà de l’objectif affiché de s’interposer entre les belligérants et d’éviter l’effondrement de l’État malien, Serval puis Barkhane répondaient au souci des Occidentaux de créer un glacis stratégique au centre de l’Afrique, à proximité de la plate forme opérationnelle de la Chine dans la zone. Un cordon sanitaire identique à celui que les pays occidentaux ont établi autour de l’Iran, l’autre grand fournisseur d’énergie de la Chine.

Cette tendance s’est accentuée et amplifiée avec la présence de deux philo sionistes patentés au Quai d’Orsay, Bernard Kouchner sous Nicolas Sarkozy, et Laurent Fabius, sous François Hollande. Depuis lors, des entreprises israéliennes se sont déployées au Mali: Elbit et Mer, mais surtout Israël Aerospace ont réussi à décrocher le contrat de protection périmétrique de la Minusma, au Mali. Des sociétés israéliennes ont fourni aussi des équipements visant à renforcer la sécurité des bases de la Minusma dans tout l’Azawad, avec l’ambition de devenir le prestataire de service des 40 bases de l’ONU à travers le Monde; La présence israélienne au Mali dans une zone sensible, le septentrion malien, dans une zone happée par la tentation intégriste, explique partiellement le rejet de la France non seulement au Mali mais également en Afrique Occidentale, le Burkina Faso et la percée russe en République centrafricaine.

3- La patrimonialisation des rapports d’État entre la France et le Liban, sous la double mandature Jacques Chirac- Rafic Hariri.

Au Liban, la patrimonialisation des rapports d’état entre la France et le Liban, sous la double mandature du tandem Jacques Chirac-Rafic Hariri (1992-2005), a généré une forme subliminale de pacte de corruption sur le modèle de la Françafrique qui s’est prolongée bien au delà de la présence à la tête de l’état français du post gaulliste et son bienfaiteur, le milliardaire libano-saoudien.

Pour aller plus loin sur cette affaire, cf ce lien: https://www.renenaba.com/la-france-et-le-liban-le-recit-dune-berezina-diplomatique

Pays anciennement sous son son mandat, la France a infiltré tous les rouages de l’administration libanaise au point de propulser un de ses agents au poste de premier ministre et d’embrigader un diplomate en poste à l’administration centrale comme «indic», alors que la technostructure française se liguait contre le président Emmanuel Macron pour faire capoter l’idée de sanction contre la classe politique libanaise corrompue.

A- Le premier ministre Moustapha Adib, un agent des Français. Moustapha Adib, ancien directeur du cabinet du premier ministre Najib Mikati, était en fait un agent français proposé par la France au poste de premier ministre pour succéder à Saad Hariri, démissionnaire et un diplomate en poste au palais Bustros, le ministère libanais des Affaires étrangères, trahissant les obligations de sa charge, se chargeait de transmettre régulièrement à l’ambassade de France à Beyrouth, les câbles diplomatiques adressés par les ambassadeurs libanais en poste à l’étranger.

B – Autre dérive morale: la collusion de la technostructure française avec le cartel bancaire libanais.
Les menaces de sanctions brandies par le président Emmanuel Macron contre la classe politique libanaise corrompue n’ont impressionné personne pour la simple raison que le cartel bancaire français a été un des principaux bénéficiaires des ingénieries financières conçues par le gouverneur de la Banque du Liban, Riad Salamé. Une synergie particulièrement fructueuse notamment sous la double mandature de Jacques Chirac en France et de Rafic Hariri à Beyrouth, entre 1993-2005, à sa fin tragique. Protégé par une puissance de feu médiatique sans pareille au Liban, constituée par des scribouillards véreux, des obligés, arrimés à leur seigneur par des prêts longue durée, à taux zéro, l’ancien élève des Jésuites, impavide, saignait en fait son pays au profit exclusif des possédants.

Protecteur de l’oligarchie bancaire libanaise, le gouverneur de la Banque du Liban était inamovible du fait d’un triple véto quant à son éviction: Les États-Unis, dont il était un exécutant fidèle de leurs oukazes; le patriarcat maronite soucieux de préserver un des trois piliers du pouvoir maronite au Liban avec la présidence de la République, et le commandement en chef de l’armée………avec, à distance, la mafiocratie libanaise, une cohorte de chefs de clans polymorphes de petites vertus mais de grande vénalité. Riad Salamé nourrissait l’ambition d’accéder à la magistrature suprême. Il cherchera à donner des gages à l’administration xénophobe et populiste de Donald Trump en se missionnant comme un exécutant zélé des sanctions américaines, illégales au regard du droit international, contre le Hezbollah et ses sympathisants.

Mais la Softwar menée par l’Otan contre le Liban en vue d’entraver toute ouverture vers l’EST de ce petit pays à l’épicentre des conflits régionaux et de soulever ainsi la population libanaise contre le Hezbollah libanais, a produit des effets inverses. Un effet boomerang. La population saignée par tant de privations, sombrant dans la pauvreté ou se résignant à l’exil forcée, se soulèvera. Et devant le temple de la corruption, le siège de la Banque du Liban, les manifestants iront droit au but en brandissant les banderoles houspillant Riad Salamé, le gouverneur de la banque en ces termes: «Riad, le voleur». A la grande consternation des protecteurs occultes du gouverneur. Pour écrasante que soit sa responsabilité dans le désastre financier libanais, et pour aussi surprenant que cela puisse paraître, force est néanmoins de constater que Riad Salamé a ainsi fait les frais de la Soft war de l’Otan contre le Liban. Au titre de dommage collatéral.

L’expérience le prouve et l’histoire l’enseigne: Les amis de l’Amérique ne sont pas éliminés par les ennemis de l’Amérique, mais par l’Amérique elle-même: Saddam Hussein en a fait la mortelle expérience. Depuis la plus haute antiquité, il est admis que la Roche Tarpéienne jouxte le Capitole et que l’ingratitude est la loi suprême des peuples pour leur survie. L’onde de choc de la contestation populaire a révélé le défaut de la cuirasse et fendu l’armure du gouverneur, provoquant le collapsus de son système immunitaire politique.

Sur Riad Salamé et ses manigances, cf ce lien https://www.renenaba.com/liban-pandora-papers-et-rapport-du-fmi/
En dépit des gracieusetés libanaises dont elle a bénéficié, la France continue de s’enfoncer dans l’endettement, qui explique sa nervosité: La France a enregistré en 2021 le pire déficit commercial de son histoire, soit 84,7 milliards d’euros, battant le précédent record de 2011, avec 75 milliards d’euros. Le déficit public s’élevait, en 2020, à 212,0 Md€, soit 9,2 % du PIB.

La technostructure française, la cellule Moyen-Orient de l’Élysée et le Quai d’Orsay se sont ligués pour tuer dans l’œuf l’idée de sanctions contre les politiciens libanais. La France redoutait en effet que l’effondrement du système bancaire libanais ne profite à la richissime diaspora libanaise chiite d’Afrique.

La richissime diaspora chiite? Que dire des milliardaires sunnites qui se sont succédé à la tête du gouvernement libanais: Fouad Siniora, Najib Mikati, de même que le clan Hariri: Rafic, le chef du clan, son successeur Saad avant sa faillite ?

4- La phobie anti-syrienne.

La phobie anti-syrienne syrienne détermine la politique française au Liban. La France continue de se positionner au Liban en fonction de l’attitude des dirigeants libanais à l’égard de la Syrie, quelles que soient leurs aptitudes intellectuelles ou leurs qualités morales. Et son affrontement avec la Syrie constitue la ligne directrice de sa politique au Liban. Ceci explique son soutien à Samir Geagea, le fossoyeur du leadership chrétien, à Walid Joumblatt, le chef féodal du Parti Socialiste Progressiste, à la versatilité légendaire, enfin à Saad Hariri, dont les états de service se résument à une double faillite, faillite financière et faillite politique.

Sur le rôle de la France dans le Monde arabe, cf ce lien: https://www.madaniya.info/2020/08/31/le-centenaire-de-la-proclamation-du-grand-liban-une-demarche-passeiste-nostalgique-dune-grandeur passée https://www.madaniya.info/2022/01/14/la-france-une-puissance-en-perte-dequilibre/

Le coup d’état du Niger, l’été 2022, a provoqué par contrecoup la fragilisation de la médiation française en vue de l’élection présidentielle libanaise,– déjà tributaire du bon vouloir saoudien–, en ce que ce coup de force dans le pré carré français, survenant après les déboires au Mali et au Burkina Faso, a considérablement terni le prestige de la France en Afrique, et en application du principe des vases communicants, au Liban. La proposition saugrenue d’Emmanuel Macron de mettre sur pied une coalition internationale contre le Hamas, sur le modèle de la coalition anti Daech, lors de sa visite de solidarité avec Israël, dans la foulée de la nouvelle flambée de violence israélo-palestinienne, le 24 octobre 2O23, a fait apparaître la France comme assumant un rôle comparse au Moyen Orient, aux antipodes de la posture gaulliste.

5 – La gesticulation diplomatique française inopérante du fait du handicap dirimant représenté par la détention arbitraire de Georges Ibrahim Abdallah.

Mettant à profit le branle bas diplomatique déclenchée par l’opération ”Déluge Al Aqsa”, l’attaque du mouvement islamiste palestinien Hamas contre Israël, le 7 octobre 2023, l’émissaire français au Liban, M. Jean Yves Le Drian, a effectué une discrète visite au Liban, fin octobre, pour sonder les autorités libanaises alliées de la France, –le patriarche maronite et les chefs des anciennes milices chrétiennes, Samir Geagea (Forces Libanaises) et Sami Gemayel, (phalangiste) ainsi que Teymour Joumblatt, le nouveau chef druze du du Parti Socialiste Progressiste– sur la possibilité de modifier la résolution 17401 du Conseil de Sécurité de l’ONU, en vue d’aménager une zone démilitarisée dans la région frontalière libano-israélienne et entraver ainsi toute possibilité d’action du Hezbollah libanais contre Israël.

L’entretien de l’émissaire français avec M. Gebrane Bassil, chef du Courant Patriotique Libanais (CPL), a été bref et houleux. M. Le Drian plaidant en faveur de l’élection du commandant en chef de l’armée libanaise, le général Joseph Aoun, à la présidence de la République libanaise «dans l’intérêt de la France et l’Europe», faisant valoir que sa présence à la tête de l’État Libanais pourrait brider le flux migratoire des réfugiés syriens vers l‘Europe, oubliant que sous la mandature du socialiste François Hollande, dont il était le ministre de la défense, la France a été un des chefs de file de la destruction de la Syrie.

Paris semble oublier que le zèle pro-israélien de la France depuis la présidence de Nicolas Sarkozy, “premier président de sang mêlé de France”, se répercute négativement sur ses alliés libanais en raison du rôle joué par le Hezbollah dans la dissuasion anti-israélienne et la délimitation des zones d’exploitations offshore libanaise. Plus concrètement, l’acharnement pro-israélien de la France fragilise ses alliés maronites tout comme le passif criminogène de ses alliés libanais la dessert. Une alliance de “loosers”. En tout état de cause, la gesticulation diplomatique française au Liban demeure inopérante en ce qu’elle se heurte à un handicap dirimant: la détention arbitraire du communiste libanais pro palestinien, Georges Ibrahim Abdallah, un maronite de naissance, mais néanmoins symbole vivant du combat national palestinien en Europe occidentale. Mèche à combustion lente, la détention arbitraire de Georges Ibrahim Abdallah en France, consomme progressivement et sûrement la relation franco-libanaise.

L’alliance privilégiée de la France avec les Maronites a été maléfique pour la France, en ce que “la Patrie des droits de l’homme” apparaît, volens nolens, comme la caution des milices factieuses, et par voie de conséquence, solidaire de leurs passifs; maléfique pour le Liban en ce qu’elle a figé, du fait du système confessionnel, l’évolution du système politique entraînant sa nécrose; Maléfique enfin pour les Maronites eux mêmes en ce que cette communauté a été constamment captive de sa frange la plus irrédentiste et criminogène constituée par le parti phalangiste, agrégé autour du Clan Gemayel (Pierre, Amine, Bachir, Sami et Nadim) et son excroissance pathogène les Forces Libanaises dirigées par leur ancien lieutenant, Samir Geagea, le plus toxique des politiciens libanais.

Pour mémoire, La France n’a jamais songé à appliquer la Loi de 1905 sur la séparation de l’Eglise et de l’État, dite loi sur la laïcité, à ses départements et territoires d’outre-mer (DOM-TOM). En Algérie, son plus grand département musulman de l’époque coloniale, elle a maintenu le Code de l’Indigénat et en Afrique Occidentale la gestion de l’Islam s’est faite en collaboration avec les chefferies traditionnelles et les confréries (Mourides, Tidjanes etc..)

La France, une terre des paradoxes: Pour la vérité historique, il n’est pas indifférent de noter que la France, pays de la laïcité, a instauré la mention de la religion sur les cartes d’identité des pays sous son mandat en Syrie et au Liban, et institué le «confessionnalisme politique» au Liban, c’est à dire la répartition des pouvoirs et des charges publiques en fonction de l’appartenance religieuse de l’impétrant. La France, “tendre mère des libanais” s’est révélée une “marâtre”, le clan Gemayel, pathétique avec son discours de capitulation “la force du Liban réside dans sa faiblesse”, et le “double G duo”, le tandem Gemayel-Geagea, pathologique.

Épilogue: L’Occident fossoyeur des chrétiens arabes

Chrétiens du Liban, de Syrie et d’ailleurs doivent se pénétrer d’une réalité première, à savoir que l’Occident, particulièrement la France, protectrice des chrétiens d’Orient, a été leur fossoyeur. Le génocide arménien a été récompensé par le bonus du District d’Alexandrette amputé à la Syrie pour être offert à la Turquie, l’ennemi de la France durant la 1 ère guerre mondiale. La création d’Israël a entrainé l’exode des chrétiens palestiniens, l’agression anti nassérienne de Suez, menée avec le concours de la France, en 1956, a provoqué l’exode des chrétiens d’Egypte, l’invasion américaine de l’Irak, l’exode des chrétiens d’Irak; et la bataille de Syrie, l’exode des chrétiens de Syrie, alors que la guerre civile libanaise, a provoqué un exode massif des chrétiens libanais, dans une tentative occidentale de fixer sur place les Palestiniens et de faire du Liban leur patrie de rechange, alors que la Softwar de l‘OTAN contre le Liban a réduit la présence chrétienne au Liban à sa portion congrue.

La France, ici comme ailleurs, comme d’ailleurs l’Occident dans son ensemble, paient au prix fort leur tardive adaptation aux nouvelles réalités géopolitiques. Et dans son cas particulier, la France, visiblement, vit sur une autre planète. Entrave majeure à la construction d’une identité nationale, le confessionnalisme apparaît désormais, cent ans après la proclamation de l’Etat du “Grand Liban” comme une stigmate indélébile sur le front de la France, faisant du Liban un pays en sursis. Un siècle après la proclamation de l’ ”Etat du Grand Liban”, qui devait assurer une rente de situation éternelle à la France du fait de la prosternation permanente du leadership maronite à son égard, le réduit maronite tangue dangereusement, alors que la France assiste, impuissante, à la désagrégation de son pré carré africain (Mali, Guinée, Burkina Faso, Niger).

Au vu de ce bilan calamiteux, la sagesse commande à la France, au delà aux États-Unis, de lâcher leur proie afin de préserver leur présence future au Liban dont le salut passe nécessairement par un rééquilibrage de ses relations internationales par une “ouverture à l’EST” en vue de contrebalancer les effets corrosifs de la politique occidentale à son égard afin, qu’ à la manière du roseau de la fable, cette mosaïque humaine ”plie mais ne rompt pas”, grâce à sa force dissuasive incarnée par la formation paramilitaire chiite, le Hezbollah libanais, prodigieux symbole de la résurrection militaire arabe et gage de l’indépendance du Liban.

Sur la relation France-Syrie, cf ce lien: https://www.madaniya.info/2022/05/02/la-france-vis-a-vis-de-la-syrie-un-rare-cas-de-psychiatrie-exacerbe/

La Syzygie est parfaite, paradoxalement en défaveur du leadership maronite. Pour la première fois depuis la proclamation de l’indépendance du Liban, en 1943, il y a 81 ans, les trois postes clés du pouvoir libanais– la présidence de la République, le commandement en chef de l’armée et le gouverneur de la Banque centrale–, qui leur est attribué par la France par la calamiteuse confessionnelle du pouvoir au seul pays arabe dirigé par un chrétien, sont vacants. Le mandat du Général Joseph Aoun, à la tête de l’armée libanaise, a été prolongé d’un an à la suite de fortes pressions combinées des États-Unis, de l’Arabie saoudite et du Vatican, Washington menaçant même le Liban de cesser de financer l’armée si la prolongation du mandat du commandant en chef n’était pas entérinée.

Le patriarche maronite Béchara el Rahi, roue dentée de la diplomatie atlantiste.

Mutique face à la volonté des Occidentaux d’implanter aussi bien les réfugiés syriens que palestiniens au Liban, –de l’ordre de 2 millions de personnes, la totalité de confession musulmane, au détriment de l’équilibre confessionnel au Liban–, de contraindre le Liban à les assimiler sur son sol en vue d’en modifier la composition confessionnelle de sa démographie au profit des sunnites pour en faire une patrie de substitution à tous “les laissés pour compte” de la normalisation israélo-arabe, le patriarche maronite Béchara El Rahi, en une roue dentée de la diplomatie atlantiste, a été également étonnement mutique lors de la dernière confrontation israélo-palestinienne, déclenchée par le “déluge d’Al Aqsa”, y compris lors de la destruction d’une église chrétienne de Gaza par l’aviation israélienne.

Prémonitoire, M. Walid Joumblatt, le chef féodal du Parti Socialiste Progressiste, réputé pour sa lucidité intermittente, tancera en octobre le leadership maronite les mettant en garde contre la persistance de leur guerre picrocholine assurant, au terme d’un an de vacance de pouvoir présidentiel, que faute d’une entente des dirigeants de cette communauté sur le choix d’un président de la République, les décideurs internationaux pourraient décider de retirer cette charge aux Maronites.

L’histoire retiendra que le leadership maronite aura été le fossoyeur des Chrétiens lors de la guerre du Liban (1970-1990) et le fossoyeur du foyer chrétien du Liban lors de la software de l’Otan contre leur propre pays.

Beyrouth, immarcescible : 

Beyrouth revendique, en effet, le privilège unique au Monde d’avoir symbolisé, à deux reprises dans l’histoire contemporaine, la résistance arabe à l’hégémonie israélo-américaine. La première fois, en 1982, lors du siège de la capitale libanaise par le général Ariel Sharon, du temps où le sunnisme s’identifiait au combat nationaliste, depuis le fief du sunnisme libanais à Beyrouth Ouest. La deuxième fois, en 2006, depuis Beyrouth Sud, cette fois, (Ad Dahyah al Jounoubiyah, littéralement la banlieue sud de la capitale), le fief chiite de la capitale, du temps du coma du général Ariel Sharon, où le chiisme libanais suppléant la vassalisation du sunnisme arabe à l’axe israélo américain prenait sa relève en vue de pérenniser le combat nationaliste arabe.

C’est Beyrouth, jadis symbole de la douceur de vivre, qui livrera face à un immobilisme arabe quasi-général un combat solitaire contre les assaillants israéliens, en 1982, pour que cette ville qui fut pendant un quart de siècle le vivier du nationalisme militant échappe au déshonneur de la capitulation. C’est Beyrouth, encore une fois, qui lavera l’honneur arabe, en 2006, sous l’égide du moine soldat de l’Islam moderne Hassan Nasrallah, infligeant un camouflet aux Israéliens, rééditant son exploit 24 ans après, en dépit de la complicité d’une large fraction des pays arabes. 

Au-delà de ces tragiques événements, un fait demeure, toutefois, lourd de conséquences pour l’avenir : Pour la première fois dans l’Histoire, l’unique président chrétien du Monde arabe aura été ostracisé du fait de la France, traditionnelle protectrice des Chrétiens arabes et la vacance de pouvoir qui s’est ensuivi, a constitué un dangereux précédent lourd de conséquences. Ce bilan est à mettre, au premier chef, au passif de Jacques Chirac, sans qu’il ait été possible d’établir avec certitude si l’initiative du président français de l’époque était commandée par un grand dessein de la France ou commanditée par un devoir de gratitude à l’égard de son bienfaiteur. 

Un devoir d’un commandité à l’égard de son hôte obligeamment hospitalier, au-delà de son assassinat, maintenant, au-dessus du Liban, une « épée de Damoclès », matérialisée par le Tribunal Spécial sur le Liban, dont le verdict pré déterminé fait planer des risques non seulement sur le Liban, mais sur la famille de son propre bienfaiteur, en ce qu’il confie à son héritier la responsabilité de la mise à mort, symbolique, de l’unique formation politico-militaire arabe victorieuse d’Israël. Une mission suicidaire, s’il en est, par sa perversité. Quoiqu’il en soit, une brèche constitutionnelle s’est ouverte, qui devrait conduire les nostalgiques du Liban d’antan à se résoudre à l’évidence. Le Liban ne sera plus ce que son géniteur -la France- a voulu qu’il soit : un foyer chrétien, principalement Maronite, en Orient au bénéfice exclusif de la politique occidentale. 

Conscience critique de toute une génération politique, soupape de sécurité des gouvernements arabes pendant un demi siècle, pacifiée, normalisée, reconstruite par Rafic Hariri, à nouveau détruite par Israël, Beyrouth, immarcescible, demeure le pôle de référence inoxydable de la combativité libanaise et arabe, exerçant désormais une fonction traumatique à l’égard des Israéliens, au grand désespoir des Occidentaux, de leurs alliés arabes et du Clan Hariri au Liban. Sic Transit Gloria Mundi… Ainsi passent les gloires de ce monde.

Pour aller plus loin sur la relation entre la France et les Maronites, cf ce lien; https://www.renenaba.com/france-liban-a-propos-des-maronites/

Sur la recension du livre «Le grand déclassement» de Georges Malbrunot et Christian Chesnot, cf ce lien pour le locuteur arabophone, le journal Al Akhbar en date du 13 janvier 2022.

ONG et la Soft War au Liban – Al Akhbar Lundi 10 Janvier 2022

ReneNaba
René Naba | Journaliste, Ecrivain, En partenariat avec https;//www.Madaniya.info Français d’origine libanaise, jouissant d’une double culture franco arabe, natif d’Afrique, juriste de formation et journaliste de profession ayant opéré pendant 40 ans au Moyen Orient, en Afrique du Nord et en Europe, l’auteur dont l’expérience internationale s’articule sur trois continents (Afrique Europe Asie) a été la première personne d’origine arabe à exercer, bien avant la diversité, des responsabilités journalistiques sur le Monde arabo-musulman au sein d’une grande entreprise de presse française de dimension mondiale.

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