La nomination de Najib Mikati comme Premier ministre libanais, si elle se confirme, symboliserait une continuité politique qui ne répond pas aux attentes de changement exprimées par une large partie de la population. Dans un Liban plongé dans une crise économique et institutionnelle sans précédent, ce choix soulève des interrogations sur la capacité des élites traditionnelles à proposer des solutions adaptées.
Najib Mikati, une figure du système
Najib Mikati, figure bien connue de la scène politique libanaise, incarne le système qui a conduit le pays à son état actuel. Homme d’affaires influent et politicien chevronné, il bénéficie du soutien des blocs parlementaires dominants, notamment celui du Hezbollah et du mouvement Amal. Selon Ad Diyar (12 janvier 2025), son profil consensuel et son expérience font de lui un choix « pragmatique », mais ce pragmatisme est critiqué par les mouvements sociaux et une partie de l’opposition.
Pour de nombreux Libanais, sa nomination serait synonyme d’une incapacité du système à se renouveler. Les critiques dénoncent une élite politique plus préoccupée par la préservation de ses privilèges que par la mise en place des réformes indispensables. Cette continuité alimente la défiance envers les institutions et renforce le sentiment d’abandon des citoyens.
Les pressions internationales et régionales
Sur le plan extérieur, la nomination de Mikati est suivie de près par les partenaires internationaux du Liban. L’Arabie saoudite et la France, selon Al Sharq Al Awsat (12 janvier 2025), insistent sur la nécessité de réformes structurelles pour débloquer les aides financières. Cependant, le maintien de figures politiques traditionnelles comme Mikati pourrait refroidir ces attentes, en raison de son association avec les pratiques passées.
En parallèle, l’Iran, via son influence sur le Hezbollah, semble soutenir ce choix, y voyant un moyen de garantir la stabilité et de préserver ses intérêts stratégiques au Liban. Cette double pression reflète les tensions régionales qui continuent de peser sur la politique libanaise.
Un défi pour la présidence de Joseph Aoun
La confirmation de Mikati au poste de Premier ministre poserait également un défi direct à Joseph Aoun. Élu président avec la promesse de réformes et de changement, Aoun risque de perdre rapidement le soutien populaire si son mandat s’inscrit dans la continuité des échecs passés. La présidence, déjà limitée dans ses prérogatives par le système confessionnel, pourrait être perçue comme complice d’une élite politique déconnectée des réalités sociales et économiques.
Perspectives et conséquences
Si Mikati parvient à former un gouvernement, sa capacité à mener des réformes sera cruciale pour restaurer la confiance, tant auprès des Libanais que des partenaires internationaux. Cependant, les doutes sur sa volonté ou sa capacité à briser les pratiques traditionnelles persistent. Dans un scénario où aucun changement significatif n’est opéré, le pays risque de s’enfoncer davantage dans la crise, alimentant une colère populaire qui pourrait se traduire par de nouvelles vagues de manifestations.
