Avec la chute du régime d’Assad, le Liban espère jouer un rôle dans la reconstruction de la Syrie, misant sur sa proximité géographique et son expertise historique dans le commerce et les infrastructures. Cependant, la crise économique profonde que traverse le pays et les tensions régionales compliquent ces ambitions. Alors que les acteurs internationaux rivalisent pour s’imposer dans ce processus, Beyrouth pourrait bénéficier d’alliances modérées et d’une coordination renforcée avec les pays du Golfe et d’autres partenaires stratégiques.
Une relation économique historique
Le Liban et la Syrie ont toujours partagé des relations économiques étroites, avec des échanges significatifs dans les secteurs de l’agriculture, des infrastructures et de l’énergie. Avant le début de la guerre civile syrienne, le Liban était un point de transit clé pour les exportations syriennes, notamment via le port de Beyrouth. Avec la chute d’Assad, ces liens pourraient être rétablis, permettant au Liban de jouer un rôle dans la reconstruction de la Syrie, évaluée à plusieurs milliards de dollars.
Les entreprises libanaises, notamment celles spécialisées dans la construction, la logistique et les services, pourraient trouver dans ce processus une opportunité de redynamiser leur activité, alors même que l’économie locale est en crise.
Une économie affaiblie face à de grands défis
Le Liban traverse une crise économique sans précédent, marquée par un effondrement monétaire, une inflation galopante et une paralysie bancaire. Cette situation limite fortement la capacité des entreprises libanaises à financer des projets ou à s’engager dans des partenariats régionaux.
Les tensions politiques internes, ajoutées à des infrastructures affaiblies, compliquent également les ambitions économiques du Liban. La reconstruction syrienne nécessitera des acteurs stables et solvables, ce qui pourrait marginaliser certaines entreprises libanaises fragilisées par la crise actuelle.
De nouvelles alliances possibles
Dans ce contexte, des alliances avec des partenaires internationaux et régionaux deviennent cruciales pour le Liban. Les pays du Golfe, notamment l’Arabie saoudite et les Émirats arabes unis, pourraient jouer un rôle clé en finançant des projets de reconstruction en Syrie. Ces investissements pourraient offrir au Liban des opportunités de collaboration, en particulier si les entreprises libanaises parviennent à démontrer leur expertise dans des secteurs comme l’agriculture ou les énergies renouvelables.
Les Accords d’Abraham, qui ont renforcé la coopération entre Israël et plusieurs pays arabes modérés, pourraient également ouvrir des perspectives de partenariat pour des entreprises libanaises cherchant à contourner les obstacles traditionnels du commerce régional.
L’effacement progressif de certaines influences
Le rôle d’acteurs naguère influents, comme le Hezbollah, semble aujourd’hui moins central dans les ambitions libanaises. La chute d’Assad, principal allié du Hezbollah en Syrie, a diminué l’influence de l’organisation dans le pays voisin. En outre, la crise économique et les pressions internationales rendent plus difficile pour le Hezbollah de maintenir son emprise sur les routes commerciales entre le Liban et la Syrie.
Les entrepreneurs libanais pourraient ainsi trouver davantage de marge de manœuvre pour négocier directement avec les nouveaux acteurs politiques et économiques en Syrie, sans dépendre de structures associées à des groupes militaires ou paramilitaires.
Obstacles et opportunités
La reconstruction syrienne reste un défi complexe, notamment en raison des rivalités entre grandes puissances. Des acteurs comme la Russie et la Turquie, qui ont joué un rôle militaire clé dans la guerre civile syrienne, cherchent désormais à s’imposer dans le domaine économique. Cela réduit l’espace disponible pour les petites économies régionales comme le Liban.
Les sanctions internationales imposées à la Syrie compliquent également les relations commerciales légales entre les entreprises libanaises et leurs partenaires syriens. Ces restrictions, combinées à l’instabilité politique en Syrie, pourraient retarder le processus de reconstruction et limiter les bénéfices économiques pour le Liban.
Cependant, la proximité géographique du Liban, sa main-d’œuvre qualifiée et son expertise historique dans les services logistiques et financiers pourraient constituer des atouts. Si le pays parvient à stabiliser ses institutions et à diversifier ses alliances, il pourrait jouer un rôle plus actif dans la reconstruction syrienne, notamment dans les zones contrôlées par des factions modérées.
Perspectives
Pour le Liban, la reconstruction de la Syrie représente à la fois un défi et une opportunité. Si le pays parvient à surmonter ses crises internes et à établir des partenariats stratégiques, il pourrait se positionner comme un acteur clé dans ce processus. Une stabilisation politique et économique au Liban est essentielle pour attirer les investissements internationaux et crédibiliser les entreprises locales.
En parallèle, des initiatives de coopération avec des partenaires modérés, comme les pays du Golfe, pourraient permettre au Liban de contourner certains des obstacles liés aux sanctions et de diversifier ses opportunités économiques. Enfin, l’effacement progressif de certaines influences régionales, combiné à l’émergence de nouvelles dynamiques en Syrie, pourrait offrir au Liban un rôle pivot dans la réintégration économique de son voisin.
