Depuis plusieurs semaines, Israël intensifie ses manœuvres militaires dans les régions frontalières du sud de la Syrie et du Liban. Le plan israélien semble viser à contourner le front sud libanais, jugé trop coûteux en termes d’invasion directe, pour se concentrer sur une percée via le Golan syrien, la vallée de la Bekaa et potentiellement jusqu’à Beyrouth. Cette stratégie fait écho à celle d’Ariel Sharon en 1973, qui cherchait déjà à couper les lignes d’approvisionnement du Hezbollah en passant par la Syrie pour atteindre le Liban.
D’après certains rapports, des forces israéliennes, comprenant des tanks Merkava et des bulldozers, ont pénétré sur le territoire syrien, menant des travaux de fortification le long de la frontière, notamment la construction d’une route militaire désignée sous le nom de « Sufa 53 » et l’aménagement de tranchées profondes destinées à sécuriser la zone. Cette route pourrait s’étendre jusqu’à 70 kilomètres vers la frontière jordanienne, dépassant la ligne de cessez-le-feu établie par l’accord de 1974 entre Israël et la Syrie, ce qui constituerait une violation flagrante de cet accord.
Ces mouvements israéliens sont perçus comme une tentative de créer une « ceinture de sécurité » le long de la frontière, dans le contexte d’une escalade des tensions régionales, notamment contre les forces du Hezbollah présentes au sud du Liban et dans certaines parties de la Syrie. Les autorités syriennes, par la voix du gouverneur de Quneitra, ont cependant démenti ces incursions, affirmant qu’il n’y avait aucune violation israélienne dans la région et que ces informations relevaient de la désinformation dans un contexte de « guerre médiatique »
Un plan de contournement via le Golan
Les récents développements dans la région de Quneitra, au sud de la Syrie, montrent une intensification des travaux militaires israéliens. Des tranchées profondes de sept à dix mètres sont creusées le long de la frontière pour créer une barrière de sécurité et empêcher toute infiltration par des forces armées liées au Hezbollah. Ces travaux sont accompagnés d’une campagne de déminage, visant à éliminer les champs de mines posés dans le secteur. Selon plusieurs sources, dont The Syrian Observer et des rapports locaux, Israël aurait aussi intensifié ses frappes aériennes dans cette région, ciblant des infrastructures militaires du Hezbollah dans la vallée de la Bekaa.
En parallèle, des réunions auraient eu lieu entre des responsables israéliens et des groupes d’opposants syriens pour envisager une relance de la guerre civile en Syrie. L’objectif serait de déstabiliser davantage le régime de Bachar al-Assad et de créer une nouvelle dynamique qui affaiblirait la présence de forces pro-iraniennes en Syrie.
Israël utilise ainsi le Golan pour préparer une opération terrestre visant à traverser la Syrie en direction de la vallée de la Bekaa. En établissant des positions dans des zones stratégiques comme Beit Jin, situé non loin de la frontière libano-syrienne, Israël espère couper les routes d’approvisionnement du Hezbollah depuis la Syrie vers le Liban.
Stratégie élargie à la vallée de la Bekaa
La vallée de la Bekaa est une région stratégique pour le Hezbollah, car elle abrite de nombreuses infrastructures militaires et logistiques essentielles à ses opérations. Israël a intensifié ses frappes dans cette région, notamment en ciblant un important dépôt d’armes dans l’est de la Bekaa, causant des explosions massives. Ce dépôt contenait vraisemblablement des armes fournies par l’Iran, comme l’ont rapporté The Jerusalem Post et Israel Hayom.
L’objectif d’Israël est d’affaiblir les capacités militaires du Hezbollah en perturbant ses lignes d’approvisionnement, tout en évitant une confrontation directe sur le terrain dans le sud du Liban, où le Hezbollah est fortement implanté. Le plan consiste à utiliser la vallée de la Bekaa comme un terrain d’opérations, permettant ainsi d’isoler le Hezbollah de ses soutiens syriens et iraniens.
Les implications pour le Liban et la Syrie
La stratégie israélienne visant à contourner le sud du Liban en passant par la Syrie pourrait changer radicalement les dynamiques de la région. En envahissant potentiellement la Bekaa, Israël cherche à perturber les routes logistiques du Hezbollah sans entrer directement dans les villages lourdement fortifiés du sud libanais, ce qui pourrait entraîner des pertes humaines importantes.
Ce plan israélien a aussi des répercussions géopolitiques majeures, car il implique une incursion dans des zones sous influence russe, notamment autour de Quneitra, où la Russie maintient une présence militaire. Le retrait partiel des troupes russes de certains points stratégiques de cette région pourrait signaler un accord tacite entre Israël et la Russie, permettant à Tel-Aviv d’opérer plus librement sans provoquer de confrontation directe avec Moscou, selon The Times of Israel et FDD’s Long War Journal.
Un plan en pleine expansion
Il est clair que cette stratégie n’est pas qu’une simple opération défensive. Israël tente de redéfinir les lignes de front, tout en maximisant sa sécurité. Le Premier ministre israélien, Benjamin Netanyahu, semble décidé à remodeler la carte du Moyen-Orient pour assurer la sécurité d’Israël à tout prix, quitte à déplacer les frontières de facto et à redessiner les contours géopolitiques de la région. En contournant le front sud et en prenant d’assaut la Bekaa, Israël espère affaiblir considérablement le Hezbollah tout en évitant une guerre longue et coûteuse dans le sud du Liban, tout en amenant le conflit en Syrie.
Vers une escalade imminente ?
Les prochaines semaines seront déterminantes pour comprendre l’ampleur des ambitions israéliennes. Si Israël parvient à établir une présence militaire stable dans la vallée de la Bekaa, cela affaiblira non seulement le Hezbollah mais perturbera également l’équilibre stratégique de la région. Toutefois, cette stratégie comporte des risques élevés d’escalade avec le Hezbollah et ses alliés syriens et iraniens. La situation reste fragile, et bien que la présence russe soit réduite, elle demeure un facteur clé qui pourrait influencer le cours des événements.