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Edito : Quand l’armée libanaise bombarde la Syrie, une première historique…

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Hier, le 17 mars 2025, l’armée libanaise a fait un truc qu’on n’aurait jamais cru voir de notre vivant : elle a bombardé la Syrie. Oui, vous avez bien lu. L’armée libanaise, cette institution qu’on associe plus souvent à des défilés en treillis impeccables qu’à des offensives dignes d’un blockbuster hollywoodien, a décidé de franchir la frontière – ou du moins de l’arroser un peu – pour la première fois de son histoire. Et franchement, dans le grand cirque du Proche-Orient, c’est à la fois un exploit et une blague qui mérite qu’on s’y attarde.

Remettons les choses dans leur contexte, parce que cette histoire n’est pas tombée du ciel comme une roquette mal calibrée. Depuis la chute éclair de Bachar al-Assad en décembre 2024, quand les rebelles islamistes de Hayat Tahrir al-Cham (HTC) ont déboulé dans Damas plus vite qu’un livreur Uber Eats un jour de pluie, la Syrie est devenue un terrain de jeu un peu chaotique. Exit le régime alaouite qui tenait le pays d’une main de fer, bonjour les nouveaux shérifs en treillis et barbe bien taillée. Sauf que, comme dans tout bon western, les voisins n’ont pas tous applaudi le changement de casting.

Au Liban, on a d’abord regardé ça de loin, avec ce mélange de méfiance et de curiosité qu’on réserve aux séries Netflix dont on n’est pas sûr du scénario. Mais voilà, la frontière libano-syrienne, cette ligne poreuse où passent depuis des décennies armes, drogue, réfugiés et mauvaises idées, a vite repris du service. Les islamistes de la nouvelle armée syrienne, tout frais au pouvoir, ont décidé de faire un peu de ménage côté contrebande – comprenez : couper les vivres aux milices locales, dont certaines bien copines avec le Hezbollah. Problème : ils ont aussi enlevé des membres de tribus libanaises, ces clans pas franchement connus pour leur patience légendaire. Résultat ? Les tribus ont répliqué à leur façon, avec des tirs de roquettes et une ambiance Far West qui n’a rien à envier aux vieux films de Clint Eastwood.

Et là, bim, l’armée libanaise entre en scène. Pour une fois, elle ne s’est pas contentée de regarder les miliciens se débrouiller entre eux ou de poster un communiqué laconique sur X. Non, elle a sorti l’artillerie – enfin, disons quelques obus bien placés – et a bombardé des positions en Syrie. Une première ! On imagine le général libanais, téléphone à la main, lançant un : « Alors, les gars, on tente un truc historique aujourd’hui ? » pendant que les officiers syriens, de l’autre côté, se demandaient si c’était une blague ou un vrai réveil musculaire du voisin. D’autant plus savoureux quand on se souvient qu’il y a encore peu, quand des soldats libanais – oui, même eux – se faisaient tuer sous des bombardements israéliens, l’armée libanaise n’avait pas levé le petit doigt pour répliquer. Pas un obus, pas un tweet rageur, rien. Et là, face à des Syriens visiblement moins intimidants qu’avant, elle se permet une petite virée punitive. Preuve, s’il en fallait, que les nouveaux maîtres de Damas ne font plus vraiment peur.

Bon, soyons honnêtes, ce n’est pas comme si le Liban avait soudain décidé de jouer les gros bras régionaux. Cette « offensive » fait suite à une série d’incidents frontaliers qui sentent le règlement de comptes plus que la grande stratégie militaire. Les islamistes syriens kidnappent, les tribus libanaises ripostent, et l’armée libanaise, prise entre deux feux, finit par dire : « Bon, là, ça suffit, on tire un coup pour calmer tout le monde. » C’est presque un sketch : imaginez une dispute de voisinage où, après des mois de cris et de poubelles renversées, quelqu’un finit par sortir un pistolet à eau… sauf que là, c’était un peu plus bruyant.

Et puis, il y a un petit parfum d’ironie historique là-dedans. Sous la présidence de Joseph Aoun – le chef d’état-major devenu président en 2024 dans un élan de consensus rare –, l’armée libanaise accomplit en quelque sorte un vieux « rêve » des années de guerre civile. À l’époque, des figures comme Amine Gemayel ou Michel Aoun (pas de lien de parenté avec Joseph, soyons clairs) clamaient que si Beyrouth était bombardée, Damas devrait l’être aussi, en représailles à l’ingérence syrienne au Liban. Sauf que l’armée libanaise n’en avait ni les moyens, ni l’équipement, ni la portée – avec leurs vieux canons, les obus auraient à peine franchi les 20 km maximum de leur portée, alors que Damas est à 80 km de la frontière ! À l’époque, ils n’auraient même pas passé la douane syrienne. Aujourd’hui, même si c’est à petite échelle et dans un contexte bien différent, voilà que Beyrouth rend la pareille, profitant de l’affaiblissement syrien et d’un chaos qui, pour une fois, joue en sa faveur.

Ce qui est drôle – ou tragique, selon l’humeur –, c’est que cette petite escapade militaire arrive dans un contexte où personne ne sait vraiment qui commande quoi. En Syrie, les islamistes de HTC promettent une « nouvelle ère » tout en jonglant avec les Kurdes, les Turcs, les frappes israéliennes et les restes de l’ancien régime. Au Liban, entre le Hezbollah qui digère mal la perte de son copain Bachar, les tribus qui jouent les justiciers et un État toujours aussi fragile, on dirait une partie de Risk où tout le monde a oublié les règles. Et au milieu, l’armée libanaise qui, pour une fois, fait autre chose que sécuriser les checkpoints de Beyrouth.

Alors, qu’est-ce qu’on en retient ? Que la frontière libano-syrienne reste une cocotte-minute prête à exploser au moindre malentendu. Que l’armée libanaise, en bombardant la Syrie, a peut-être juste voulu dire : « Hé, on existe encore, ne nous oubliez pas ! » Et que, dans cette région où l’histoire récente ressemble à un mélange de Game of Thrones et de comédie absurde, même les premières fois ont un goût de déjà-vu. Reste à voir si ce coup d’éclat marque le début d’une nouvelle audace libanaise ou juste un pétard mouillé dans la longue saga des incidents frontaliers. En attendant, on peut toujours en rire… jaune, évidemment.

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Newsdesk Libnanews
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