Alors que l’opération antiterroriste « Sinaï 2018 », lancée par Abdel Fattah al-Sissi il y a tout juste un an, a rempli la quasi-totalité de ses objectifs, plusieurs députés veulent permettre au président de se représenter en 2022. Une nécessité, selon eux, pour la stabilité du pays, voire de la région.

Le chef de l’État égyptien, Abdel Fattah al-Sissi, vient de faire un pas de plus vers un troisième mandat présidentiel. Début février, des députés ont en effet déposé au Parlement toute une série d’amendements constitutionnels, visant à lever les barrières qui empêchent actuellement le président de se porter candidat au scrutin de 2022. 

Les parlementaires souhaitent faire passer la durée maximale d’un mandat présidentiel de deux fois quatre ans à deux fois six ans. Ce qui autoriserait Abdel Fattah al-Sissi à se représenter après la prochaine échéance électorale. Une hérésie, pour les opposants au chef de l’État égyptien, qui n’hésitent pas à crier au scandale ; une nécessité, pour ceux qui le soutiennent, induite par « la réalité et la conjoncture du pays et de la région ».

« Le pays est sûr »

Depuis quelques années, l’Égypte a en effet maille à partir avec les terroristes retranchés dans la région désertique du Sinaï (à l’est du pays), dont une grande majorité a fait allégeance à Daesh. L’organisation n’hésite pas à frapper lieux touristiques, confessionnels et autres rassemblements populaires. 

Il y a tout juste un an, Abdel Fattah al-Sissi lançait en guise de réponse une vaste campagne antiterroriste, baptisée « Sinaï 2018 », dont « 90 % des objectifs ont été atteints », explique Nasr Salem, expert militaire et conseiller auprès de l’Académie militaire Nasser. L’opération « a permis d’atteindre les principaux objectifs, à savoir éradiquer les organisations terroristes et criminelles, nettoyer les zones où se trouvent les foyers terroristes, couper tous les moyens de communication entre ces éléments et renforcer le contrôle des zones stratégiques frontalières », selon lui.

Si la menace djihadiste pèse encore aujourd’hui sur l’Égypte – tout comme elle pèse, d’ailleurs, sur la France et bien d’autres pays du globe –, difficile de ne pas reconnaître que Le Caire a repris la main sur le dossier. La sécurité retrouvée n’a-t-elle pas permis aux touristes étrangers de revenir en nombre, l’an dernier, alors qu’ils boudaient le pays depuis plusieurs années ? 

En septembre dernier, Ahmed Youssef, le président de l’Office du tourisme égyptien, révélait ainsi qu’au premier trimestre 2018, le tourisme avait rapporté à l’État quelque 2,2 milliards de dollars. Soit presque deux fois les revenus de ce secteur sur l’année 2017. « Le pays est sûr », avait-il alors déclaré, reconnaissant toutefois qu’il valait mieux éviter certaines zones frontalières – avec la Libye et Israël –, où « des opérations militaires ont encore lieu ».

Stabilité sur le long terme

« L’Égypte présente ainsi, à travers cette stratégie globale antiterroriste menée avec professionnalisme, un modèle à suivre pour tous les pays du monde », affirmait, non sans une certaine fierté, l’expert militaire Nasr Salem, le 6 février dernier. Non sans une certaine fierté, mais non sans raison, également. Il y a quelques semaines, le président français, Emmanuel Macron, alors en déplacement au Caire, n’avait pas manqué de souligner le rôle primordial de l’Égypte dans la lutte antiterroriste. Un « pays de 100 millions d’habitants, absolument essentiel pour la sécurité et la stabilité du Moyen-Orient et de l’Europe », indiquait l’Élysée, quelques jours plus tôt, dans un communiqué.

La volonté des députés de permettre à Abdel Fattah al-Sissi de briguer un nouveau mandat s’inscrit dans cette logique de stabilité, ce dernier nourrissant visiblement un vrai projet de long terme pour son pays, qui se relève péniblement de la crise politique de 2011 et des années Moubarak. Redressement et diversification de l’économie, arrivée massive de capitaux étrangers, autosuffisance énergétique, désengorgement du Caire et, bien évidemment, lutte antiterroriste : les projets du chef de l’État égyptien pour remettre le pays sur de bons rails ne manquent pas.

Rachid Bedai, étudiant en géopolitique, spécialisation au sujet du Moyen Orient.

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