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Netanyahou et la guerre de “renaissance” : tournant stratégique ou fuite en avant ?

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Le 21 avril 2025, Benyamin Netanyahou, Premier ministre israélien, a prononcé un discours qualifié d’historique depuis le QG de Tsahal à Tel Aviv. Dans des propos rapportés par Al Quds (22/04/2025), il déclare : « Ce n’est pas une guerre de réaction, c’est une guerre de renaissance. Nous allons démanteler le Hamas, ramener nos otages, et changer le visage du Moyen-Orient. » Cette formule, immédiatement reprise dans les médias israéliens et internationaux, cristallise une nouvelle orientation stratégique du gouvernement Netanyahou, déterminé à poursuivre les opérations à Gaza malgré les pressions internationales.

Dans le contexte des bombardements qui ont fait, selon les chiffres fournis par Al Quds, plus de 27 morts civils en une seule journée à Gaza, le choix du mot “renaissance” interpelle. Il implique un projet de refondation, une dimension messianique et transformationnelle qui dépasse le simple cadre militaire. La presse arabe interprète cette rhétorique comme une tentative de légitimer un changement de paradigme géopolitique au profit d’Israël. Al Sharq Al Awsat (22/04/2025) souligne que cette posture pourrait signifier une volonté d’annexion de certains territoires, voire un remodelage des structures de gouvernance dans Gaza même, sous contrôle israélien.

Les éléments de langage utilisés dans le discours évoquent aussi un glissement vers une lecture idéologique du conflit. Netanyahou parle de “résurrection nationale”, de “retour à la lumière”, en des termes souvent associés à la reconstruction post-traumatique. Selon plusieurs analystes interrogés par Al Quds, cette rhétorique pourrait indiquer que le gouvernement israélien ne se contente pas d’objectifs sécuritaires, mais vise une refonte du rapport d’Israël à ses frontières, à sa sécurité et à sa légitimité régionale.

L’objectif affiché est la destruction totale du Hamas, organisation qualifiée de terroriste par Israël, mais également la récupération des otages capturés le 7 octobre 2023. Depuis, aucun cessez-le-feu durable n’a pu être instauré. La reprise des combats est appuyée par une coalition gouvernementale renforcée à droite, où les ministres Itamar Ben Gvir et Bezalel Smotrich exigent un contrôle complet et durable de la bande de Gaza. Selon Al Sharq Al Awsat, le cabinet restreint israélien a voté à l’unanimité l’intensification des frappes sur Rafah et Khan Younès.

Les opérations militaires actuelles sont marquées par une intensification des bombardements, l’usage de drones armés, de frappes ciblées sur des immeubles résidentiels supposés abriter des responsables du Hamas, et la destruction de tunnels. Al Quds rapporte que des quartiers entiers de Rafah ont été rasés en trois jours, avec des pertes humaines qui dépassent les 300 victimes civiles depuis le début de la semaine. L’utilisation d’armes à fragmentation, bien que non confirmée officiellement, est évoquée par des témoins cités par l’ONG Médecins pour Gaza.

Sur le plan diplomatique, la déclaration de Netanyahou a refroidi les discussions en cours avec l’Égypte et le Qatar. Al Sharq Al Awsat note que les négociateurs égyptiens ont suspendu leurs rencontres avec la délégation israélienne au Caire, jugeant “inadmissible” la poursuite des bombardements en parallèle des discussions. Le Qatar, tout en maintenant ses efforts de médiation, exprime sa frustration face à ce qu’il qualifie de “mépris pour la diplomatie” de la part du gouvernement israélien.

L’administration américaine, quant à elle, se retrouve dans une position ambiguë. Donald Trump a salué le discours de Netanyahou en déclarant dans une allocution reprise par Al Sharq Al Awsat : « Israël a le droit de renaître face au terrorisme ». Cependant, le département d’État n’a pas confirmé ce soutien de manière officielle. Les médias israéliens notent une différence de ton entre la Maison Blanche et le Pentagone, ce dernier étant préoccupé par l’éventualité d’un élargissement du conflit au Liban Sud ou à la Syrie.

La communauté internationale est globalement divisée. La France, à travers le porte-parole du Quai d’Orsay, a critiqué le “caractère démesuré” des représailles israéliennes, tandis que l’Allemagne exprime une “inquiétude croissante” sur les pertes civiles, mais sans remettre en cause le droit d’Israël à se défendre. L’ONU, dans un communiqué lu à Genève, appelle à “la retenue absolue” et rappelle que “la légitime défense ne peut justifier la punition collective d’un peuple”.

L’usage du concept de “renaissance” dans un cadre guerrier est largement débattu dans les milieux intellectuels israéliens. Al Sharq Al Awsat cite une tribune publiée dans Haaretz par l’historien Shlomo Ben-Ami, ancien ministre travailliste, qui écrit : “Quand une démocratie commence à penser sa guerre comme une régénération spirituelle, elle franchit un seuil inquiétant. La renaissance, dans l’histoire juive, n’a jamais signifié la domination par la force, mais le retour à une paix juste.” Cette tribune a été reprise par plusieurs leaders de l’opposition, notamment Yair Lapid, qui a dénoncé une “tentative de messianisme militaire”.

Dans les territoires palestiniens, les propos de Netanyahou ont été reçus avec colère et amertume. Le Hamas accuse le Premier ministre israélien d’utiliser “le langage de la purification ethnique” pour masquer une opération de nettoyage de masse. Le Jihad islamique publie un communiqué appelant les factions à l’unité pour “faire échec à cette mascarade de renaissance”. Al Quds cite un responsable de l’Autorité palestinienne selon lequel “les mots de Netanyahou ne visent pas seulement le Hamas, mais l’idée même d’un État palestinien viable”.

La déclaration est également analysée à travers le prisme du calendrier politique israélien. Accusé de corruption dans plusieurs affaires, et confronté à une usure du pouvoir, Netanyahou pourrait chercher dans la guerre un levier pour ressouder son électorat et marginaliser l’opposition. Les journaux de Tel Aviv font état de tensions entre l’armée et le gouvernement, certains généraux estimant que l’objectif de destruction totale du Hamas est irréaliste à court terme. Un ancien chef du Mossad, cité anonymement par Al Sharq Al Awsat, parle d’un “délire d’ampleur régionale”.

Au Liban, les propos de Netanyahou suscitent une vive réaction. Nabih Berri, président de la Chambre, affirme dans une déclaration publiée par Al Sharq Al Awsat (22/04/2025) que “Netanyahou cherche à étendre sa guerre au Liban par une rhétorique provocatrice et colonialiste”. Le Hezbollah, tout en maintenant un profil militaire bas, réagit en diffusant une vidéo d’archives du pape François dénonçant les “agressions contre Gaza”. Ce choix symbolique illustre une volonté de s’inscrire dans une narration morale face à ce qui est présenté comme un “projet de domination”.

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Newsdesk Libnanews
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