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Chaos syrien : un conflit relancé aux portes du Liban

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La Syrie, morcelée par plus d’une décennie de guerre civile, replonge dans une instabilité alarmante avec la reprise des combats dans le nord du pays entre l’armée syrienne, fidèle au régime déchu de Bachar el-Assad, et divers groupes rebelles. Cette escalade, qui intervient après une période de calme relatif depuis le cessez-le-feu de mars 2020, ravive les tensions dans une région déjà fragilisée par des rivalités géopolitiques complexes. L’administration Trump, revenue au pouvoir en janvier 2025, intensifie son soutien aux Forces démocratiques syriennes (FDS), dominées par les Kurdes, provoquant l’ire de la Turquie, alliée de l’OTAN mais farouchement opposée à cette milice. Pendant ce temps, le Liban, voisin exsangue, redoute une nouvelle vague de réfugiés alors que la violence s’approche de sa frontière. L’Iran et la Russie, piliers du régime syrien pendant des années, renforcent leur présence militaire pour contrer l’avancée rebelle, risquant une confrontation directe avec Israël, qui surveille de près cette montée des tensions. Voici une analyse détaillée de cette crise et de ses répercussions régionales.

Une reprise des combats dans un nord syrien fragmenté

La guerre civile syrienne, qui a coûté la vie à environ 500 000 personnes depuis 2011 selon l’Observatoire syrien des droits de l’homme (OSDH), semblait entrée dans une phase de stagnation après l’accord de cessez-le-feu d’Idlib en mars 2020, négocié par la Russie et la Turquie. Cependant, la chute soudaine de Bachar el-Assad le 8 décembre 2024, orchestrée par une offensive éclair de Hayat Tahrir al-Cham (HTS) depuis Idlib, a bouleversé cet équilibre précaire. Les combats ont repris dans le nord-ouest dès fin novembre 2024, lorsque HTS et des factions rebelles pro-turques, comme l’Armée nationale syrienne (ANS), ont saisi Alep, Hama, Homs, et finalement Damas en moins de deux semaines.

Mais la victoire rebelle n’a pas mis fin au conflit. En février 2025, des affrontements ont éclaté dans le nord entre des poches de l’armée syrienne loyaliste, retranchées autour de bases stratégiques comme Hmeimim et Tartous sous protection russe, et des groupes rebelles islamistes et pro-turcs cherchant à consolider leur contrôle. Le 15 janvier 2025, l’OSDH rapportait que des unités pro-Assad, soutenues par des milices iraniennes comme Badr et Nujabaa, avaient lancé des contre-attaques au sud d’Alep, tuant 26 combattants rebelles. Ces combats, les premiers d’ampleur depuis la chute d’Assad, ont été accompagnés de bombardements russes et syriens intensifs sur Idlib et Alep, faisant 20 civils morts près de Homs le 6 décembre 2024, selon l’OSDH.

Cette instabilité est aggravée par la fragmentation du nord syrien. HTS, dirigé par Abou Mohammed al-Joulani (devenu Ahmed al-Charaa), contrôle désormais le centre du pays, mais des tensions émergent avec les forces kurdes des FDS dans le nord-est et les zones pro-turques autour de Manbij et Tall Rifaat. Le 6 décembre 2024, Mazloum Abdi, commandant des FDS, déclarait vouloir une « désescalade avec HTS » par le dialogue, mais les affrontements avec l’ANS pro-turque à Manbij ont fait 218 morts en une semaine, selon l’OSDH, avant une trêve médiate par les États-Unis le 18 février 2025.

Soutien renforcé de Trump aux Kurdes : une provocation pour la Turquie

L’administration Trump, réinvestie le 20 janvier 2025, a rapidement réaffirmé son soutien aux FDS, considérées comme un rempart contre Daech et un levier stratégique dans le nord-est syrien riche en pétrole. Ce choix prolonge une politique initiée en 2014 sous Obama, lorsque les États-Unis ont armé les Kurdes pour combattre l’État islamique. En 2024, la base américaine d’Al-Tanf, près de la frontière irakienne, restait un point d’appui clé, avec des frappes contre des cibles iraniennes et des groupes djihadistes résiduels, selon des déclarations du Pentagone en décembre 2024.

Le 17 février 2025, des posts sur X indiquaient que des convois militaires américains avaient renforcé leur présence à Ras al-Ayn, une zone sous tension avec la Turquie, signalant une intensification du soutien logistique aux FDS. Cette décision, bien que visant à stabiliser le nord-est face à la menace d’une résurgence de Daech – crainte exprimée par Antony Blinken le 2 décembre 2024 – a provoqué une réaction furieuse d’Ankara. La Turquie considère les YPG, colonne vertébrale des FDS, comme une extension du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK), qu’elle classe comme organisation terroriste. Le ministre turc des Affaires étrangères, Hakan Fidan, avertissait le 1er décembre 2024 : « Nous ne permettrons jamais à la structure terroriste en Syrie de se transformer en État », une menace visant explicitement les Kurdes.

Ce soutien américain aggrave des tensions déjà vives avec la Turquie, membre de l’OTAN. En 2019, l’opération turque « Source de Paix » avait chassé les FDS de vastes zones frontalières, avec l’ANS en première ligne, après un retrait partiel des troupes américaines sous Trump. En 2024, la chute d’Assad a offert à Ankara une nouvelle opportunité : dès le 8 décembre, des factions pro-turques ont repris Tall Rifaat aux Kurdes, et des bombardements turcs sur Manbij ont suivi, tuant 22 combattants FDS le 7 décembre, selon l’OSDH. Ce bras de fer risque de dégénérer en conflit ouvert entre alliés de l’OTAN, la Turquie menaçant de nouvelles incursions si les États-Unis maintiennent leur appui aux Kurdes, comme le soulignait un communiqué présidentiel turc le 5 décembre 2024.

Le Liban face à la crainte d’une nouvelle vague de réfugiés

Le Liban, qui héberge déjà 1,5 million de réfugiés syriens – soit près d’un quart de sa population – observe cette reprise des combats avec une anxiété croissante. La frontière syro-libanaise, poreuse et théâtre de violences sporadiques, est redevenue un point chaud. Le 6 décembre 2024, la prise de Qousseir, près de la frontière, par HTS, a déclenché un exode de milliers de familles alaouites vers le Liban, selon l’OSDH, qui estimait à 370 000 le nombre de déplacés internes en Syrie en une semaine à cette date. David Carden, coordinateur humanitaire de l’ONU, confirmait le 6 décembre que « la plupart étaient des femmes et des enfants », fuyant les bombardements russes et syriens.

Cette vague ravive le spectre de 2011-2015, lorsque des millions de Syriens ont fui vers le Liban, saturant un pays déjà en crise économique depuis 2019. En 2023, le Haut-Commissariat des Réfugiés (HCR) rapportait que 805 000 réfugiés syriens enregistrés vivaient dans des conditions précaires au Liban, avec 90 % sous le seuil de pauvreté. Le 14 janvier 2025, un article notait que l’élection de Joseph Aoun comme président libanais le 9 janvier ouvrait la voie à un dialogue avec la nouvelle Syrie, mais les combats récents compromettent cette perspective. « Entre soulagement et appréhension, le Liban se préoccupe des répercussions sur son sol », écrivait un analyste le même jour, soulignant la crainte d’un afflux ingérable.

Le 30 novembre 2024, le gouvernement libanais, alors sous Najib Mikati, avait exprimé son soutien à Assad contre les « takfiris » (rebelles extrémistes), mais cette position est remise en question par la montée des tensions internes. Les alaouites syriens, persécutés par HTS dans les zones côtières, affluent vers le nord du Liban, où leur communauté est historiquement présente, tandis que des familles sunnites fuient vers Beyrouth. En 2024, le Programme alimentaire mondial (PAM) lançait un appel de 250 millions de dollars pour six mois d’aide alimentaire, un besoin qui risque de s’accroître si les combats continuent.

Iran et Russie : un renforcement militaire qui défie Israël

L’Iran et la Russie, principaux soutiens du régime Assad pendant la guerre civile, réagissent à cette reprise des combats par un renforcement militaire significatif. Après la chute d’Assad, la Russie a maintenu ses bases de Hmeimim et Tartous, où des troupes syriennes loyalistes se sont repliées. Le 29 novembre 2024, Moscou appelait Damas à « mettre de l’ordre au plus vite » à Alep, et des bombardements conjoints russo-syriens ont suivi, visant HTS et ses alliés. Le 9 décembre, le Kremlin annonçait un soutien « inconditionnel » à Assad, exilé à Moscou, et des contacts militaires étroits avec les forces restantes, selon Dmitri Peskov.

L’Iran, affaibli par les frappes israéliennes d’octobre 2024 et la guerre au Liban contre le Hezbollah, a dépêché des centaines de miliciens irakiens pro-iraniens en Syrie dès le 2 décembre 2024, selon Reuters. Ces unités, issues des brigades Badr et Nujabaa, ont franchi la frontière par petits groupes pour éviter les frappes israéliennes, visant à sécuriser les lignes de front nord. Le 8 décembre, Abbas Araghchi, chef de la diplomatie iranienne, réitérait un soutien « ferme » à Assad, malgré son aveu de surprise face à la rapidité de l’offensive rebelle.

Ce renforcement inquiète Israël, qui voit dans la présence iranienne une menace directe. Depuis décembre 2024, Tsahal a multiplié les frappes sur des positions iraniennes et ex-régime autour de Damas et du Golan, occupé depuis 1967. Le 8 décembre, Netanyahu, depuis le mont Hermon, déclarait que la chute d’Assad était une « conséquence directe des coups portés à l’Iran et au Hezbollah », annonçant des bombardements sur des sites militaires syriens abandonnés. Le 15 janvier 2025, l’OSDH rapportait des frappes israéliennes près de Lattaquié, visant des dépôts d’armes iraniennes, tuant 12 miliciens. Cette escalade pourrait dégénérer en confrontation ouverte, HTS ayant des revendications historiques sur le Golan, comme le notait Manon-Nour Tannous le 9 décembre 2024.

Conséquences régionales : une mosaïque de tensions

La reprise des affrontements en Syrie menace de déstabiliser davantage une région déjà volatile. La Turquie, sortie renforcée de la chute d’Assad, avance ses pions via l’ANS pour neutraliser les Kurdes et rapatrier ses 3,6 millions de réfugiés syriens, selon Erdoğan le 5 décembre 2024. Mais cette ambition heurte les États-Unis et risque de fracturer davantage le nord syrien, où les Kurdes, soutenus par Washington, refusent de céder leur autonomie, comme réclamé le 26 février 2025 sur X.

Le Liban, au bord de l’effondrement, pourrait sombrer sous le poids d’un nouvel afflux de réfugiés, tandis que l’Iran et la Russie, en renforçant leur présence, défient Israël mais aussi les ambitions turques et occidentales. Le 15 janvier 2025, un article soulignait que HTS, malgré des signes d’ouverture vers les Kurdes, reste sous pression pour asseoir un pouvoir sunnite, soutenu par la Turquie et les pays du Golfe, affaiblissant l’axe chiite iranien. Cette mosaïque d’intérêts contradictoires – Russie et Iran contre Turquie et États-Unis, Israël en vigie – fait craindre une escalade incontrôlable, avec des répercussions humanitaires et géopolitiques majeures.

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