Le système judiciaire libanais est une nouvelle fois secoué par une affaire de corruption de grande ampleur impliquant l’ancien ministre des Finances, Youssef Khalil. Selon Al Akhbar (14 février 2025), Khalil aurait exercé des pressions sur le ministre de la Justice afin de suspendre une enquête visant des membres du conseil central de la Banque du Liban. Cette affaire met en lumière les tensions entre les instances judiciaires et les figures politiques influentes, et soulève des interrogations sur l’indépendance du pouvoir judiciaire.
Les accusations contre Youssef Khalil
D’après les documents examinés par Al Akhbar, Khalil aurait tenté, peu avant son départ du ministère, d’intervenir directement auprès du ministre de la Justice pour empêcher toute procédure contre des cadres dirigeants de la Banque du Liban. Cette intervention viserait notamment à protéger d’anciens collaborateurs, accusés de gestion frauduleuse des réserves monétaires et de détournement de fonds publics.
Des sources judiciaires citées par Ad Diyar (14 février 2025) rapportent que l’affaire concerne plusieurs transactions suspectes effectuées entre 2019 et 2022, période durant laquelle Khalil occupait des postes stratégiques au sein du ministère des Finances et de la Banque du Liban. Des virements de plusieurs centaines de millions de dollars auraient été réalisés à des taux préférentiels, bénéficiant à des entreprises liées à des responsables politiques influents.
Une justice sous pression
L’affaire a été portée devant les tribunaux, mais l’instruction semble entravée par des obstacles institutionnels et politiques. Al Liwa’ (14 février 2025) révèle que plusieurs magistrats en charge du dossier ont fait face à des tentatives d’intimidation, certains d’entre eux ayant même reçu des menaces voilées pour qu’ils abandonnent l’enquête.
De son côté, Al 3arabi Al Jadid (14 février 2025) souligne que cette affaire illustre l’incapacité du système judiciaire à lutter efficacement contre la corruption lorsque des figures de premier plan sont impliquées. Malgré la pression internationale, notamment du FMI qui conditionne son aide financière à des réformes institutionnelles, aucune mesure concrète n’a été prise pour garantir l’indépendance de la justice dans cette affaire.
Un enjeu économique et politique majeur
Cette affaire s’inscrit dans un contexte plus large de crise économique et de défiance envers les institutions. La Banque du Liban est au centre des critiques depuis l’effondrement financier du pays, et de nombreux Libanais accusent les dirigeants bancaires et politiques d’avoir précipité la faillite en favorisant des pratiques opaques et frauduleuses.
Par ailleurs, selon Nahar (14 février 2025), cette enquête est particulièrement sensible car elle touche aux plus hautes sphères du pouvoir. Une condamnation de Youssef Khalil ou de ses proches entraînerait des répercussions politiques considérables, risquant d’affecter les négociations en cours avec les bailleurs internationaux et de fragiliser encore davantage le gouvernement.
Quelles perspectives pour l’enquête ?
À ce jour, aucune inculpation officielle n’a été prononcée contre Youssef Khalil. Cependant, les pressions internes et externes pour faire avancer le dossier se multiplient. Selon Al Sharq (14 février 2025), certains juges envisagent de faire appel à des institutions judiciaires internationales pour garantir une enquête indépendante, une option qui pourrait accentuer les tensions entre le Liban et ses partenaires financiers.
L’issue de cette affaire sera déterminante pour l’avenir du système judiciaire libanais et sa capacité à traiter des dossiers impliquant des personnalités de premier plan. Mais en l’état actuel des choses, il semble peu probable que Youssef Khalil fasse face à des poursuites judiciaires effectives, tant les résistances politiques et institutionnelles restent fortes.