Ces « bonnes » histoires

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Beaucoup de libanais ont pu découvrir hier la fameuse vidéo amateur diffusée par une chaine de télévision locale, montrant un homme battant une femme de ménage de nationalité éthiopienne en public, à proximité immédiate de l’ambassade de ce pays. Beaucoup de Libanais ont été choqués face à ses images montrant une réalité crue, celle d’un pays ou l’indifférence règne face à la médiocrité des conditions socio-économiques. Certains n’ont pas pu s’empêcher de s’interroger, de demander quelles sont les raisons par exemple qui ont poussé les services de sécurité de l’ambassade d’Ethiopie à ne pas agir. Mais il s’agit là d’une fausse raison.

Outre le fait que ses services n’ont aucune juridiction à agir en dehors du périmètre de leur ambassade, cette question fait diversion sur la réelle inaction des services de sécurité libanais ou encore des simples quidams passant à proximité, voir même de ce cinéaste amateur qui aurait dû intervenir au lieu de jubiler en faisant « ce buzz » sur les réseaux sociaux. Il y a là, le problème de fond puisqu’il y a non assistance à personne en danger.

Cette histoire ne fait que rappeler de bien malheureux récits malheureusement vrais, d’une étudiante française de couleur, tabassée gratuitement en plein jour place Sassine, sans qu’interviennent les forces de sécurité libanaise, il a même fallu l’intervention de l’ambassade de France pour que les gendarmes acceptent de la voir porter plainte, ou encore de la femme de l’ambassadeur britannique, d’origine indienne, qui souhaitait nager dans une piscine d’une station balnéaire et qui en a été éjecté manu-militari. Combien de ses filles « se suicident », certaines parfois volontairement, en raison des conditions déplorables dans lesquelles elles sont placées, d’autres « involontairement », disons voir, poussées d’un balcon par leur employeur.

Peut-on également porter l’opprobre sur la population libanaise en son entier quand les autorités des pays dont elles sont originaires n’agissent souvent pas, trop contents de la manne financière que constitue cette main d’oeuvre, alors que pourtant combien de ses pays ont un ratio PIB/Habitant plus élevé que le Liban même. Ces pays fournissant cette main d’oeuvre peu chère ne s’assurent souvent ni de la fragilité  psychologique de la future employée, souvent livrée à elle-même, tout comme les autorités libanaises ne s’assurent pas de la probité des futurs employeurs avec la constitution d’une liste noire de personnes à éviter. Le mal est là aussi partagé.

Certains pays ont cependant interdit à leur ressortissants de venir travailler au Liban, cette décision a fait « les beaux jours » des discussions des salons de beauté et autres lieux publics, ou les dadames racontaient leur désespoir – et souvent également le désespoir de leur mari contraint à entendre les railleries de leur épouse voir à avoir une scène de ménage parce que leur épouses sont obligées faire le ménage justement. Le mal de la société libanaise est de faire appel à une main-oeuvre étrangère dont elle n’a souvent pas les moyens intellectuels – combien de ses petites mains sont d’ailleurs souvent beaucoup plus diplômées que la dadame de la maison -. Imaginez-vous, plus de manucure ou de pédicure mais le ramonage du bidet, cela change des sobhiehs quotidiennes à planter un couteau dans le dos des autres copines. D’autres prétendent encore, à juste titre cela dit, que ses filles avaient de la chance de venir au Liban au lieu d’aller dans certains pays du Golfe. On ne peut que s’interroger malheureusement aujourd’hui sur la réalité de cette chance quand arrive une telle scène.

Plus encore, ce fait malheureusement divers ne fait qu’illustrer le profond sentiment d’un racisme ordinaire de la société libanaise. Comment peut-on en vouloir à ses passants qui ne sont pas intervenus quand les libanais sont racistes déjà envers eux-même par nature avec leurs petites questions, « comment t-appelles tu? » et ‘d’ou viens-tu? », tout cela pour déterminer l’appartenance confessionnelle. Peut-on alors leur en vouloir d’héberger le personnel de maison dans des cagibis souvent, alors qu’eux même sont parqués dans des ghettos communautaires plus ou beaucoup moins luxueux sans s’en rendre compte par eux-même?

L’opprobre n’est donc pas à rejeter sur les employeurs eux-même mais sur la société en entier, en raison d’un manque d’éducation, d’un manque de savoir-vivre, un manque d’intégrité et d’un manque d’Humanité.

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