Une délégation du FMI attendue à Beyrouth le 28 mai pour relancer les négociations sur les réformes structurelles

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Le Liban face à une échéance diplomatique et économique cruciale

Le Fonds monétaire international (FMI) enverra une délégation à Beyrouth le 28 mai 2025. Cette visite, annoncée par le ministère des Finances, marque un moment charnière : relancer un processus de réforme qui stagne depuis plus d’un an. Le dernier cycle de discussions avec l’institution multilatérale remonte à décembre 2023. Depuis, les signaux positifs ont été rares et les engagements libanais à l’égard des exigences du FMI sont restés largement théoriques. Cette mission permettra de juger sur pièces de la capacité réelle de l’État libanais à s’engager.

Des conditions toujours non remplies

Ce que le FMI attend n’a pas changé : unification des taux de change, adoption d’un cadre de résolution bancaire, restructuration de la dette, mise en œuvre d’un contrôle des capitaux et approbation d’un budget crédible. Aucun de ces éléments n’a été validé de manière institutionnelle. Le cadre légal de résolution bancaire est encore à l’état de projet, les taux de change multiples perdurent, et l’exécutif gouverne sans budget formel pour l’exercice 2025. Le FMI ne reviendra pas avec des intentions nouvelles, mais avec un thermomètre pour mesurer l’immobilisme.

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Un État fragmenté, sans président ni calendrier

Le Liban est sans président depuis novembre 2022. Le gouvernement Mikati est en intérim prolongé, incapable d’engager l’État sur des lois clés. Le Parlement, quant à lui, est divisé, dominé par des logiques clientélistes et confessionnelles. Le résultat est une quasi-impossibilité de produire de la législation économique. Dans ce contexte, toute discussion avec le FMI relève davantage de la diplomatie que de la gouvernance. Il sera difficile pour les envoyés du Fonds d’obtenir des garanties politiques, et encore plus de traduire des intentions en lois.

Une économie sous respiration artificielle

Pendant ce temps, l’économie libanaise survit sur un rythme ralenti. Le taux de change parallèle reste stable à 89 500 LL/USD, non pas grâce à des fondamentaux solides, mais à des interventions ponctuelles de la Banque du Liban. Les réserves en devises ont progressé de 1 milliard USD depuis janvier, mais les besoins du pays dépassent largement ce montant. Le système bancaire reste paralysé, la distribution du crédit est quasi inexistante, et la confiance est à son plus bas niveau. Sans soutien extérieur, le Liban fonctionne sur une dollarisation informelle, des transferts de la diaspora et des importations compressées.

Un FMI prudent, mais pressé par ses partenaires

Le FMI n’avance jamais seul. Derrière cette mission, il y a aussi la pression de partenaires régionaux et européens. La France, l’Allemagne, la Banque mondiale et l’Union européenne lient désormais tout financement à un accord formel entre le Liban et le Fonds. Même les aides humanitaires sont réexaminées sous l’angle de la gouvernance. Les pays du Golfe, historiquement financeurs discrets, sont désormais absents. Leur retour est conditionné à une refondation institutionnelle. Dans ce contexte, le FMI joue un rôle de filtre : sans feu vert de sa part, aucun canal de financement bilatéral ou multilatéral ne s’ouvrira.

Un espoir, mais peu de levier

L’arrivée du FMI ravive une lueur d’espoir chez certains acteurs économiques locaux. Mais l’enthousiasme est tempéré par le manque de volonté politique. En 2022, le Liban avait déjà signé un accord préliminaire avec le Fonds. Depuis, rien n’a été mis en œuvre. Le risque est donc que cette nouvelle mission se transforme en simple mise à jour de diagnostic, sans réelle avancée. À moins d’un sursaut institutionnel de dernière minute, la probabilité d’un accord réel reste faible. Et plus le temps passe, plus la capacité du Liban à négocier des conditions soutenables s’amenuise.