Une politique de coexistence

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“Croyants de deux religions- musulmans et chrétiens-, nous nous sommes retrouvés, non comme des “sédentaires” satisfaits de ce qu’ils possèdent, mais comme appartenant à la race des “nomades” , vivant sous une “tente”, des itinérants guidés par l’Esprit de Dieu. Nous nous sommes reconnus tout spontanément, non pas comme possédant la vérité divine, mais comme possédés par cette vérité, qui guide, entraîne, libère, chacun dans sa ligne propre, plus attaché à sa propre foi”. 1

Notre vaillante armée veille remarquablement. Elle opère bien au delà de ses moyens militaires sur le territoire alors que le déséquilibre interne se traduit par un gouffre de méfiance qui se creuse davantage entre les “responsables politiques”. Eux cherchent à faire pivoter la face de la fonction utile par la célébration d’un événement majeur : L’anniversaire de la réconciliation à la montagne en présence de toutes les composantes du pays.

A l’occasion de ce prestigieux événement, le passé de la maigre réconciliation repositionne un atout non conflictuel au présent. Les officiels vont se presser à l’église malgré toutes les mésententes sous jacentes et transparentes afin que prévaut la façade de “l’anniversaire des 15 ans de la réconciliation entre ses habitants druzes et chrétiens lors d’une messe célébrée à Moukhtara”. Monseigneur Raï et Mr Joumblat “reconduisent le pacte historique de réconciliation dans la Montagne.” 2

Cependant, l’unité des chrétiens du Liban et les efforts d’ententes et de réconciliations ont surtout besoin de se reconstruire par la confiance mutuelle entre les gens. Des pages emplies de craintes et de peurs cumulées doivent certes être définitivement tournées, mais avec les convictions profondes des uns et des autres qu’un véritable changement est possible et que certains préconçus et comportements sont à corriger.

La dynamique de vie entre les chrétiens et les druzes ne peut se réduire au vouloir opportun des personnalités. Pour rompre la douloureuse histoire des méfiances réciproques, les personnages d’un temps glorieux doivent reconnaître et tolérer que leurs prérogatives traditionnelles se doivent d’associer tout citoyen au projet pragmatique de la cohabitation intercommunautaire.

Le but légitime de tout responsable hiérarchique est de comprendre les choix des gens, de soutenir les projets utiles dans les municipalités et de renforcer l’élaboration de la meilleure coexistence et de la défense d’un unique privilège. Celui d’appartenir et de convenir à un Etat de droit pour chacun. Ainsi, tout libanais est censé exercer librement son droit de vivre au Liban d’après le respect des lois, sans autre tutelle.
Le changement essentiel se situe bien au delà des stagnations voulues, des mouvements intérieurs inespérés et des regards vers les “décideurs” au Moyen Orient. L’acte national se joue sur une toute autre scène. Celle des rôles à accomplir dans la transparence jusqu’au bout et sans artifices. Le libanais a urgemment besoin de se convertir au devoir d’accomplir des tâches, bien au delà de toutes les allures, civile et religieuse.

Le travail de la coexistence comprend principalement ..” l’équité et la diversité, les programmes touchant directement la population, ….la recherche sur les enjeux liés à la coexistence, de même que l’élaboration de politiques tenant compte de la coexistence au plan local, national, régional ou international.”3 Sans cela, nous sombrons chaque jour dans l’autosatisfaction de “faire” quelque chose sans rien accomplir!

(1) Père Augustin Dupré Latour, le Cardinal Jean-Louis Toran, Je croix en l’homme, 2016.
(2) Zeina Antonios, Orient le jour le 8/8/16.
(3) Jessica Berns, l’Université Brandeis, Approches Complémentaires du Travail de Coexistence, 2007.

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