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La Syrie, nouveau théâtre d’influence turque : tensions et enjeux stratégiques

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La Turquie renforce sa présence militaire à Tiyas

La Turquie a récemment marqué un tournant dans son implication en Syrie en déployant des systèmes de défense aérienne Hisar sur la base militaire de Tiyas, plus connue sous le nom de T4, située dans l’ouest du pays. Cette initiative représente une avancée significative dans la stratégie d’Ankara, qui consolide ainsi sa présence dans une région stratégique du désert syrien. La base T4, nichée entre des étendues arides et des axes vitaux, offre une position idéale pour surveiller et intervenir dans un environnement marqué par l’instabilité. Les systèmes Hisar, conçus pour neutraliser des menaces aériennes à moyenne portée comme des missiles ou des avions, visent à protéger les intérêts turcs face aux incursions fréquentes de l’aviation israélienne dans cette zone. En parallèle, ce déploiement s’inscrit dans une campagne plus large visant à traquer les poches de combattants de l’État islamique qui persistent dans les vastes territoires désertiques, lançant des attaques sporadiques contre les forces locales et leurs alliés.

Israël face à une menace aérienne inédite

Ce renforcement turc n’a pas échappé à l’attention d’Israël, qui y voit une perturbation majeure de ses opérations militaires en Syrie. Des responsables israéliens ont exprimé leur inquiétude, qualifiant la présence des systèmes Hisar à T4 de « risque stratégique direct » pour leur sécurité. Depuis des années, l’armée de l’air israélienne mène des frappes ciblées dans le pays, visant des infrastructures liées à l’Iran, au Hezbollah ou à d’autres factions considérées comme des adversaires. Ces raids, souvent exécutés sans rencontrer de résistance significative, pourraient désormais se heurter à une barrière défensive turque, limitant la capacité de Tsahal à opérer librement. La base Tiyas, qui a déjà servi de point d’appui à des forces iraniennes par le passé, devient un enjeu central dans ce bras de fer émergent. Les stratèges israéliens craignent que cette nouvelle donne ne les oblige à repenser leurs approches tactiques, voire à envisager des actions préventives pour préserver leur suprématie aérienne dans la région.

Une cohabitation difficile entre Ankara et Damas

L’installation de ces défenses aériennes turques à T4 met également à rude épreuve les relations entre Ankara et le gouvernement syrien, dirigé par le président Ahmad al-Shara. Ce dernier, récemment porté au pouvoir après l’effondrement du régime de Bachar el-Assad, se trouve confronté à une présence étrangère croissante qui fragilise son autorité sur le territoire national. La base T4, située loin des zones traditionnellement sous influence turque dans le nord-ouest, symbolise une extension audacieuse de l’emprise d’Ankara vers des régions plus centrales. Cette avancée est perçue à Damas comme une atteinte directe à la souveraineté syrienne, ravivant des différends de longue date sur la gestion des territoires contestés. La Turquie, qui a longtemps soutenu des groupes rebelles dans des bastions comme Idlib, semble désormais déterminée à projeter sa puissance militaire plus au sud, une ambition qui complique les efforts d’al-Shara pour unifier un pays encore convalescent après des années de guerre civile.

Ahmad al-Shara, un président sous pression israélienne

Au-delà des tensions avec la Turquie, Ahmad al-Shara doit aussi faire face à des accusations venues d’Israël, qui le placent dans une position délicate. Des responsables israéliens affirment que le nouveau président syrien aurait autorisé la libération de membres du Hamas et du Jihad islamique, précédemment détenus dans les prisons du régime Assad. Cette allégation, si elle se vérifiait, suggérerait une réorientation de la politique syrienne envers les factions palestiniennes, potentiellement en faveur d’une coopération accrue avec ces groupes. Israël y voit un signe d’hostilité claire, renforçant son mécontentement envers le leadership d’al-Shara. Cependant, des voix palestiniennes ont rapidement contredit ces déclarations, assurant qu’aucun prisonnier de ce profil n’a été relâché sous la nouvelle administration. Cette polémique, encore non résolue, ajoute une couche de complexité à la situation, plaçant al-Shara sous le feu croisé des critiques israéliennes et des attentes de son propre peuple.

Une campagne antiterroriste au service d’ambitions plus larges

La Turquie justifie son initiative à T4 par la nécessité de contrer la menace persistante de l’État islamique (EI), dont les cellules disséminées dans le désert syrien continuent de poser des défis sécuritaires. Les systèmes Hisar, selon des sources de sécurité turques, sont destinés à offrir une protection aux unités engagées dans des opérations terrestres contre ces combattants djihadistes. Des actions récentes dans la région de Homs, à proximité de T4, auraient permis d’éliminer plusieurs membres de l’EI, bien que les détails de ces affrontements demeurent flous. Cette lutte contre le terrorisme constitue un argument de poids pour Ankara, qui cherche à légitimer son empreinte militaire auprès de la communauté internationale. Pourtant, de nombreux observateurs estiment que cet objectif masque une stratégie plus ambitieuse : établir une zone d’influence durable, reliant les positions turques du nord à des points stratégiques comme Tiyas, et ainsi peser davantage dans l’avenir politique et militaire de la Syrie.

Un ciel syrien sous haute tension

L’introduction des systèmes Hisar à T4 pourrait transformer l’espace aérien syrien en une arène de confrontation potentielle. Jusqu’à récemment, Israël bénéficiait d’une liberté quasi totale pour mener ses frappes, profitant de l’absence de défenses aériennes sophistiquées dans la plupart des zones ciblées. Avec cette nouvelle capacité turque, capable de détecter et d’abattre des menaces à moyenne altitude, la donne évolue sensiblement. Les analystes militaires soulignent que, bien que les Hisar ne rivalisent pas avec des technologies comme les S-400 russes, ils pourraient suffire à perturber les plans israéliens, obligeant Tsahal à ajuster ses méthodes ou à envisager des frappes préventives contre la base elle-même. Une telle escalade mettrait la Turquie et Israël sur une trajectoire de collision, dans un contexte où leurs relations sont déjà marquées par des désaccords profonds sur des questions comme la Palestine ou les ressources énergétiques en Méditerranée. Pour l’instant, aucune réponse militaire israélienne n’a été observée, mais la vigilance reste de mise.

Les dilemmes d’Ahmad al-Shara face à la Turquie

Pour Ahmad al-Shara, l’installation turque à T4 pose un problème immédiat et épineux. Le président syrien doit trouver un moyen de contrer cette présence sans déclencher un affrontement direct avec Ankara, dont les forces militaires surpassent de loin une armée syrienne épuisée par des décennies de conflit. Des manifestations spontanées ont éclaté dans plusieurs villes, notamment à Homs, où des habitants ont exprimé leur colère face à ce qu’ils considèrent comme une intrusion étrangère. Ces protestations reflètent un sentiment nationaliste croissant, mais al-Shara dispose de peu de ressources pour transformer cette indignation en action concrète. Une possibilité serait de solliciter l’appui de la Russie, partenaire historique de Damas, qui maintient des bases militaires dans le pays. Cependant, Moscou entretient également des liens pragmatiques avec la Turquie, ce qui limite les options d’al-Shara et le place dans une position de dépendance vis-à-vis des grandes puissances.

La Syrie au carrefour des ambitions régionales

La Syrie se retrouve une fois de plus au cœur d’un jeu d’influence où les objectifs turcs croisent le fer avec les priorités israéliennes et les fragilités du nouveau régime syrien. L’installation des systèmes Hisar à T4 élève Ankara au rang d’acteur incontournable dans le conflit, au risque d’enflammer les rivalités dans une région déjà volatile. Israël, confronté à une restriction potentielle de son espace d’action, pourrait opter pour une réponse militaire rapide, tandis qu’al-Shara, coincé entre la pression turque et les attentes internes, lutte pour asseoir son autorité. La lutte contre l’État islamique, bien qu’essentielle, semble reléguée à un rôle secondaire face à ces enjeux géopolitiques, laissant la Syrie vulnérable aux ambitions des puissances qui s’y affrontent.

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