Autrefois quand on présentait un ou une amie à nos parents, une série de questions déferlaient: « benet min»? «  tu es la fille de qui? », « Que fait ton père dans la vie? », « vous venez de quelle région?», « Yi tu es de Mousaytbeh? Tes parents doivent sûrement connaitre les familles Matar, Boutros et Nobar»…

Et bien sûr, après les réponses à toutes ses questions, ma mère finissait toujours par trouver quelqu’un qui connaît quelqu’un, qui était en relation de près ou de loin avec les parents de mon amie. Tout le monde connaissait tout le monde, sans aucune recherche internet! On grandissait dans la même maison paternelle jusqu’au jour de notre mariage. Par la suite chacun fondait sa propre famille mais on habitait une maison, dans le même quartier, « pour la vie! »
Aujourd’hui, on est devenu des nomades….on porte notre maison sur le dos.
Autrefois, les voisins étaient considérés comme de « la famille » . 
Aujourd’hui on ne les connait pas ,on connait la marque de leur voiture.

Autrefois toutes les familles étaient liées…et n’en formaient qu’une seule, toutes solidaires les unes avec les autres…
Aujourd’hui les membres de la même famille sont distribués à travers le globe et la distance a « refroidi » certains liens….Il y a ceux qui « sont restés au pays » et ceux qui ont « tourné le dos au pays », pense t-on souvent!

Aujourd’hui, la famille est recomposée.
On s’en est créé une « spéciale pour nous» à l’étranger, pour être entouré et soutenu dans les moments difficiles de la vie!
Parce que «ceux qui ont quitté le pays », vivent aussi des défis et des épreuves, différents sûrement, mais souvent bien durs!

Autrefois, une épine était enlevée par les mains de toute la famille….aujourd’hui, on s’évertue à l’arracher seul, sinon, si on a de la chance, avec l’aide des amis…

Autrefois tout le monde aimait tout le monde…Aujourd’hui, le monde est devenu individualiste. Autrefois, on prenait le temps de vivre, aujourd’hui, on court, on court, on ne rattrape rien…et on passe à côté de la vie!

Mon fils rit encore « des questions traditionnelles Libanaises»: « Benet min », « Chou biyaamil Bayya» ….
Il pensait que seule sa grand mère posait ces questions, avant de réaliser que c’était dans les habitudes de toutes « les vieilles personnes au Liban ».

Dommage que personne n’a pensé enregistrer les noms des familles qui vivaient dans tel ou tel quartier… cela pourrait être un beau devoir de mémoire tant qu’il y a encore de « vieilles personnes qui peuvent en témoigner! 
L’histoire d’un pays commence par l’histoire d’un quartier, ensuite par l’histoire d’un autre…

Aujourd’hui, issue d’une même famille, mais séparés par la distance, les descendants d’une même lignée ne se connaissent plus.

Nicole Abdul-Massih
Nicole Abdul-Massih est originaire de Beyrouth et vit à Montréal. Écrivaine en herbe, profondément engagée avec Fondation LCF à soutenir les enfants à besoins spécifiques au Liban et à promouvoir la culture libanaise à Montréal

2 COMMENTAIRES

  1. Cet article sympathique ne nous dit pas où se trouve cette magnifique demeure libanaise, cet extraordinaire témoin de notre architecture traditionnelle. “Bayt Min”?

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