Réactions politiques à la levée des sanctions : repositionnements rapides
Dans son édition du 14 mai 2025, Ad Diyar rapporte que la décision des États-Unis de lever les sanctions sur la Syrie a provoqué une série de réactions officielles libanaises. Le président de la République Joseph Aoun a salué cette mesure, la qualifiant d’« occasion de stabilité et de reconstruction régionale susceptible de créer un cadre plus propice au retour des déplacés syriens » (Ad Diyar, 14 mai 2025). Cette déclaration intervient alors que plusieurs acteurs libanais multiplient les appels à une normalisation progressive avec Damas.
Le journal ajoute que cette levée a été rendue possible par un alignement diplomatique entre Riyad, Washington et Ankara, avec pour objectif de redéployer les flux d’aides humanitaires en direction des zones syriennes sécurisées. Le Liban, en tant que pays d’accueil de plus d’un million de réfugiés syriens selon les estimations internes, se retrouve à nouveau en première ligne de la recomposition régionale.
Al Liwa’ souligne que le Premier ministre Nawaf Salam, bien qu’absent du sommet de Riyad, a donné des instructions pour que la question des réfugiés syriens figure en tête de l’agenda gouvernemental dans les semaines à venir (Al Liwa’, 14 mai 2025). Le journal indique que le Conseil des ministres a convoqué une session spéciale sur ce sujet, avec la participation des ministères de l’Intérieur, des Affaires sociales et de la Défense.
Une gestion administrative sous pression
La même édition d’Al Liwa’ révèle que les services de la Sûreté générale ont reçu un mandat renforcé pour actualiser les données concernant les Syriens présents sur le territoire. Le ministère de l’Intérieur a ordonné un recensement rapide des zones à forte densité de réfugiés, notamment dans la Békaa, le Nord et la banlieue sud de Beyrouth. L’objectif serait de disposer d’un fichier consolidé pour coordonner les mesures de retour, en coopération avec les autorités syriennes.
Dans Al Bina’, un article revient sur les délibérations en cours autour du plan de retour progressif. Le journal rapporte que les discussions sont alimentées par une frange du pouvoir favorable à la coordination directe avec Damas, sans passer par les agences internationales. Le journal cite une source proche du ministère des Affaires sociales affirmant que « le Liban ne peut plus attendre une solution globale et multilatérale alors que la crise perdure depuis plus d’une décennie » (Al Bina’, 14 mai 2025).
Ad Diyar indique que cette position est soutenue par plusieurs députés du Nord, qui évoquent « une pression insupportable sur les infrastructures locales et les taux de criminalité croissants dans certaines zones ». Toutefois, le journal rappelle que le Premier ministre a insisté sur la nécessité d’un cadre humanitaire et sécurisé pour tout retour, soulignant que « le Liban ne procédera pas à des expulsions forcées contraires aux conventions internationales ».
Le poids économique et sécuritaire de la crise
Al Akhbar consacre un dossier à l’impact économique de la présence syrienne au Liban, en particulier sur le marché du travail informel et les services publics. Selon le journal, les responsables municipaux de Zahlé, Bar Elias et Qabb Elias ont alerté les autorités centrales sur la saturation des réseaux d’eau, d’électricité et de collecte des déchets, exacerbée par l’absence de plan de financement stable pour les municipalités accueillant les réfugiés (Al Akhbar, 14 mai 2025).
Le quotidien indique que les aides internationales se sont réduites au cours des trois dernières années, et que l’inflation a accentué les tensions entre résidents libanais et déplacés syriens. Dans certains cas, des fermes, des entrepôts et même des écoles désaffectées ont été reconverties en abris précaires, souvent sans encadrement médical ni hygiène minimale.
Annahar évoque également des incidents récents dans la région du Akkar, où des affrontements ont opposé des jeunes libanais à des travailleurs syriens saisonniers accusés d’avoir bénéficié de faveurs administratives pour obtenir des documents de résidence. Le journal souligne que ces épisodes sont récupérés politiquement par des partis locaux, ce qui aggrave les tensions communautaires et fragilise les structures d’accueil déjà précaires (Annahar, 14 mai 2025).
Une fracture entre le discours politique et la réalité locale
Al Joumhouriyat s’interroge sur l’écart croissant entre les déclarations politiques appelant à un retour massif et la réalité opérationnelle sur le terrain. Le journal rapporte que les préfets de plusieurs mohafazats ont signalé l’absence de coordination entre les administrations concernées, et que les services sociaux ne disposent pas des ressources nécessaires pour préparer les réfugiés au retour volontaire (Al Joumhouriyat, 14 mai 2025).
Le ministère des Affaires sociales aurait soumis un projet de loi prévoyant la mise en place de centres d’orientation au retour, mais ce texte n’a pas encore été discuté en commission parlementaire. Les obstacles logistiques s’ajoutent à une perception sociale instable, avec des mouvements de protestation parfois spontanés dans des quartiers périphériques comme Nabaa, Arsal, ou Aïn el-Héloué.
Al Sharq souligne que le discours du gouvernement se veut prudent, mais qu’il est contredit par des pratiques locales de plus en plus marquées : contrôles ciblés, restrictions de mobilité, appels à l’évacuation de bâtiments occupés sans autorisation légale. Le journal rappelle que ces mesures, bien qu’initiées par des municipalités ou des gouvernorats, engagent la responsabilité de l’État libanais au regard des conventions internationales signées (Al Sharq, 14 mai 2025).
Tensions sociales et sécurité : une situation explosive
La présence prolongée des réfugiés syriens au Liban a engendré des tensions sociales croissantes, exacerbées par la crise économique et les perceptions d’injustice dans la répartition des aides. Des incidents violents ont été rapportés, notamment dans la région du Akkar, où des affrontements ont opposé des résidents locaux à des réfugiés syriens, alimentant un climat de méfiance et de ressentiment.
Les autorités locales, confrontées à des ressources limitées, peinent à gérer la situation. Des mesures telles que des couvre-feux ciblés et des restrictions de mouvement ont été mises en place dans certaines zones, suscitant des critiques de la part des organisations de défense des droits de l’homme. Ces tensions menacent la cohésion sociale et mettent en lumière la nécessité d’une approche plus équilibrée et inclusive pour gérer la présence des réfugiés.