Comme d’habitude, on aime flatter nos égos. C’est donc de manière virale qu’on apprendra que le magazine spécialisé Travel and Leisure aurait choisi Beyrouth comme l’une des destinations de choix dans le Monde – plus précisément, la capitale figure au 12ème rang mondial – et la première ville arabe à figurer sur la fameuse liste, cette année du mois et cela juste d’un cran en-deça de la ville éternelle, à savoir Rome.

Beyrouth se trouve ainsi confrontée à la concurrence de Florence, Kyoto, Barcelone et on passera sur le reste. Le magazine en question justifie son choix par le rebond de la capitale libanaise à l’issue de la guerre civile qui s’est pourtant achevée en 1990. Pas de quoi pavoiser en fin de compte … 26 ans après. Travel and Leisure cite de même l’architecture exceptionnelle de Beyrouth, mélangeant modernisme et architecture ottomane. Un petit rappel tout de même s’impose. Architecture Ottomane? Les Libanais voudraient savoir où ces derniers en ont trouvé des masses puisque des 1600 immeubles historiques à l’issue de la même guerre civile, il n’en demeure plus que 200 de manière officieuse. De même et enfin, la publication note la présence de Musées d’Art Contemporain. Hmmmmm, ok donc publicité pour une célèbre enseigne de la capitale dont le propriétaire vient d’inaugurer cette année un musée privé peut-être.

C’est à ce moment-là qu’on comprend le choix de Beyrouth puisque les paramètres de l’enquête prennent en compte, outre, normalement les sites historiques, la culture, la cuisine mais également le shopping. Mesdames, venez-donc à Beyrouth, vos petits-amis, maris ou même Papa vous gâteront ?

Certes Beyrouth demeure belle, mais pour ceux qui y résident, Beyrouth est infernale. Venir en touriste ne permet pas d’apprécier correctement la réalité sociale et économique d’une ville devenue trop chère pour la plupart de ses habitants et malade par de nombreux manques. Aurait-on déjà oublié la crise des ordures? Que dire des embouteillages quotidiens? Que constater face aux réseaux sanitaires pour ne pas dire des égouts qui sont sous-dimensionnés par rapport aux tours qui poussent comme des champignons dans certains quartiers? N’évoquons même pas la pollution. Cocorico, le Liban figure également parmi les pays ou les maladies liées à la pollution, cancer et autre, ont un des taux les plus élevés au Monde, selon le Ministère de la Santé dans une récente étude.

Aujourd’hui les tendances du tourisme est à ce qu’on appelle l’immersion au sein de la population locale et non plus au tourisme de luxe. Le Liban avait fait le choix d’un tourisme de masse avec comme segment visé, les Pays Arabes. Si Travel and Leisure et ses personnes participant à cette enquête avaient choisi d’être immergés, le résultat, sans nul doute, aurait été tout autre.

Outre le fait que le placement du Pays des Cèdres dans un cadre régional difficile, en pleine confrontation que cela soit avec le conflit israélo-arabe et on commémore ce mois-ci le 10ème anniversaire de la guerre de 2006, ou encore le conflit plus récent en Syrie qui nous a apporté notre lot de peine avec l’arrestation quasi quotidienne par l’Armée Libanaise de terroristes de Daesh ou d’Al Nosra.

Peut-être alors que le constat est beaucoup plus cruel. Beyrouth est décidément une ville martyre à l’image de ces statuts de la place éponyme. Oui parmi les critères pris en compte, figure en bonne place le caractère amical de la population locale. Nous sommes donc tellement hospitalier qu’on n’arrive donc même pas dire non à toute la misère du Monde, quitte à finir par faire couler notre propre pays … et en fin de compte, c’est prendre les libanais pour des dilettants, c’est à dire des personnes qui ne suivent que les impulsions de leurs plaisirs, de leurs goûts, et qui ont arrêté de se battre pour rendre leur propre pays meilleur.

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