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Dossier: Plastique en Méditerranée, un océan étouffe sous les déchets

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La mer Méditerranée, écrin de biodiversité et carrefour historique, agonise sous une avalanche de plastique. Classée parmi les mers les plus polluées au monde, elle ploie sous des millions de tonnes de débris, menaçant sa faune unique et sabordant ses industries vitales : tourisme et pêche. En Méditerranée orientale, le Liban incarne ce drame, ses côtes transformées en dépotoirs géants. Des initiatives locales se battent courageusement, mais l’absence d’une politique régionale forte laisse le fléau s’épanouir. Entre chiffres alarmants, études criantes et espoirs fragiles, plongée dans une crise qui asphyxie cette mer emblématique.

Une mer noyée : la Méditerranée, piège à plastique

La Méditerranée est un vortex de pollution plastique. Avec seulement 1 % de la surface océanique mondiale, elle concentre 7 % des microplastiques globaux, selon un rapport 2021 de l’Union internationale pour la conservation de la nature (IUCN). Chaque année, environ 570 000 tonnes de plastique s’y déversent, soit 33 800 bouteilles par minute, d’après une estimation du WWF en 2018 (WWF). Une étude de 2023 dans Marine Pollution Bulletin par Suaria et al. (ScienceDirect) projette que ce volume pourrait atteindre 2 millions de tonnes d’ici 2050 si les tendances persistent. Semi-fermée, avec un échange limité via Gibraltar, la Méditerranée piège ces débris : 80 % s’accumulent sur ses fonds, selon une analyse de 2024 par le Programme des Nations unies pour l’environnement (UNEP).

En Méditerranée orientale, le Liban est un épicentre de cette crise. Ses 225 kilomètres de côtes déversent des milliers de tonnes de plastique每年, via des rivières comme le Litani et des décharges côtières débordantes. Une étude de 2023 par Jambeck et al., publiée dans Environmental Research Letters (IOP Science), estime que le Liban contribue à 10 % du plastique entrant dans cette région, soit environ 25 000 tonnes par an pour un pays de 6 millions d’habitants – un fardeau colossal comparé à ses voisins. Les chiffres parlent : avec une gestion des déchets à seulement 48 % de collecte efficace (Banque mondiale, 2023, World Bank), 15 % des 1,8 million de tonnes de déchets annuels finissent en mer, selon une étude de l’Université Américaine de Beyrouth (AUB) en 2024. « C’est une catastrophe écologique en accéléré », déplore un chercheur environnemental à Beyrouth.

Ces données soulignent une réalité alarmante : la densité de microplastiques atteint 1,25 million de fragments par kilomètre carré dans certaines zones, selon une étude de 2021 par Cózar et al. dans Frontiers in Marine Science (Frontiers). En Méditerranée orientale, près de la côte libanaise, ce chiffre grimpe à 2 millions, d’après une analyse de 2024 par l’Université de Chypre (ScienceDirect).

Biodiversité en péril : une faune asphyxiée

La Méditerranée abrite 7 à 10 % des espèces marines mondiales, selon Bianchi et Morri (2000, Hydrobiologia, Springer), mais cette richesse s’effondre sous le plastique. Une étude de 2024 par Deudero et Alomar dans Science of the Total Environment (ScienceDirect) recense 134 espèces affectées, dont 35 % d’oiseaux marins (goélands, puffins), 15 % de mammifères marins (phoques moines, dauphins) et 60 % de poissons commerciaux. En Méditerranée orientale, les tortues caouannes (Caretta caretta), emblématiques du Liban, sont en première ligne : une autopsie de 2023 par l’Université de Tyr a trouvé des plastiques dans 70 % des spécimens échoués, principalement des sacs et filets, confondus avec des méduses, selon Matiddi et al. (Marine Pollution Bulletin, ScienceDirect).

Les microplastiques aggravent le carnage. Dans le golfe d’Alexandrette, près de la frontière turco-libanaise, leur concentration atteint 2 millions de particules par kilomètre carré, selon une étude de 2024 par Gündoğdu et al. (Environmental Pollution). Ces particules pénètrent la chaîne alimentaire : une analyse de 2023 par Fossi et al. (Environmental Science & Technology, ACS Publications) détecte des microplastiques dans 18 % des thons rouges au large de Beyrouth, un taux en hausse de 5 % depuis 2020. Les toxines associées – phtalates, bisphénol A – s’accumulent chez les prédateurs, menaçant la santé humaine via la consommation. Les fonds marins souffrent aussi : 85 % des plastiques s’y déposent, étouffant coraux et posidonies, selon Galgani et al. (2021, Marine Pollution Bulletin, ScienceDirect). Au Liban, les herbiers de posidonie, essentiels à l’oxygénation, ont reculé de 30 % en 10 ans, d’après une étude de l’Université Saint-Joseph (USJ) en 2024.

Tourisme en chute libre : des plages devenues dépotoirs

Le tourisme, moteur économique de la Méditerranée orientale, chancelle sous la pollution plastique. Au Liban, les côtes, autrefois prisées pour leurs plages de Tyr et Batroun, sont devenues des dépotoirs visuels. Une étude de 2024 par l’ONG Greenpeace Méditerranée (Greenpeace) montre que 60 % des plages de Beyrouth sont jonchées de bouteilles, filets et sacs, avec une densité moyenne de 300 kg par kilomètre de littoral. Les arrivées touristiques ont plongé de 25 % depuis 2020, passant de 1,9 million à 1,4 million, coûtant 1,2 milliard de dollars à une économie déjà ravagée par une inflation de 200 %, selon la Banque mondiale (World Bank).

À Jbeil, site UNESCO, les déchets plastiques s’amoncellent près des ruines phéniciennes, décourageant les visiteurs. À Batroun, les réservations hôtelières ont chuté de 40 % en 2024, d’après une enquête locale de l’Université Libanaise. « Les touristes veulent du sable, pas des ordures », soupire un hôtelier. En Méditerranée orientale, Chypre et la Grèce subissent aussi : une étude de 2023 par Anastasopoulou et al. (Marine Pollution Bulletin, ScienceDirect) chiffre les pertes touristiques régionales à 200 millions d’euros annuels, un coup dur pour une industrie représentant 15 % du PIB méditerranéen (Plan Bleu, 2023, Plan Bleu).

Pêche en détresse : des filets pleins de plastique

La pêche, pilier traditionnel au Liban, est en crise. Les 7000 pêcheurs artisanaux voient leurs prises diminuer et leurs coûts exploser. En 2024, 20 % des captures au large de Tripoli étaient des plastiques, contre 5 % en 2015, selon une étude de l’USJ. Les « filets fantômes » – abandonnés ou perdus – piègent tortues et poissons : une analyse de 2023 par Good et al. (Conservation Biology, Wiley) estime que 100 000 tortues et 300 000 poissons meurent每年 dans la Méditerranée à cause de ces filets. Au Liban, les pertes annuelles atteignent 10 millions de dollars, entre poissons contaminés et matériel endommagé, selon l’Université de Balamand (2024).

En Méditerranée orientale, la pêche commerciale souffre aussi. Les thoniers chypriotes rapportent une baisse de 15 % des captures en 2024, liée à la pollution et à la perturbation des écosystèmes (FAO, 2024, FAO). À Beyrouth, les ventes de poisson ont chuté de 30 % depuis 2023, les consommateurs craignant les toxines. « On pêche du plastique au lieu de nourrir les gens », déplore un pêcheur de Saïda.

Initiatives locales : des gouttes dans l’océan

Au Liban, des initiatives locales tentent de contrer le désastre. En 2024, le Lebanese Environment Forum (LEF) et des ONG comme WWF Méditerranée ont lancé 21 projets, financés à hauteur de 5 millions d’euros par l’UE (WWF). À Tyr, des plongeurs ont collecté 10 tonnes de filets fantômes, tandis qu’à Tripoli, des campagnes sensibilisent 50 000 habitants. Une start-up, GreenCycle, recycle 1000 tonnes de plastique en matériaux de construction en 2024, selon son rapport annuel. À Batroun, le programme Fishing-for-Litter a récupéré 12 tonnes de débris avec 200 pêcheurs participants.

Mais ces efforts peinent face à l’ampleur : le Liban produit 1,8 million de tonnes de déchets annuels, dont 15 % finissent en mer (AUB, 2024), et le recyclage ne traite que 10 %, selon la Banque mondiale (World Bank). « On agit localement, mais sans vision globale, c’est vain », admet un coordinateur d’ONG.

Politiques régionales : un vide criant

La Convention de Barcelone, signée par 21 pays, vise à réduire la pollution depuis 1995, avec un Plan régional (2013) ciblant une baisse de 20 % du plastique d’ici 2024 (UNEP). Mais seuls 5 pays, comme l’Espagne et la France, ont agi, selon un rapport UNEP 2024. Au Liban, les Plans d’action nationaux (NAPs) 2015-2025 sont paralysés par un budget environnemental réduit de 80 % depuis 2019 (Banque mondiale, World Bank). En Méditerranée orientale, Chypre, la Turquie et Israël agissent en silos, sans coordination. Les rivières transfrontalières, comme l’Oronte, charrient 500 tonnes de plastique syrien au Liban每年, selon une étude de 2023 par Zeri et al. (Marine Pollution Bulletin, ScienceDirect). « On a besoin d’un front commun », insiste un spécialiste à Nicosie.

Liban : un cas désespéré ?

Le Liban illustre l’ampleur du désastre. Les décharges de Bourj Hammoud et Costa Brava rejettent 500 tonnes de plastique en mer每年 (AUB, 2024), et le Litani en charrie 2000 tonnes, selon une étude de 2023 par Khalaf et al. (Environmental Monitoring and Assessment, Springer). Avec 80 % des eaux usées non traitées (Banque mondiale, 2023), le pays est un maillon faible. Pourtant, MedClean, lancé en 2025 avec 3 millions d’euros de l’UE, vise à dépolluer 10 plages, ciblant 100 tonnes (UNEP). « On peut inverser la tendance, mais il faut agir vite », espère un écologiste à Beyrouth.

Une mer à l’agonie : vers un point de non-retour ?

La Méditerranée, et son flanc oriental, frôle le collapse. Biodiversité, tourisme, pêche : tout s’effrite sous le plastique. Les efforts locaux sont louables, mais sans une politique régionale unifiée – normes harmonisées, fonds mutualisés, sanctions – le désastre s’amplifie. Le sommet 2025 à Chypre sera décisif : un sursaut ou un constat d’impuissance ? Pour l’instant, la mer hurle dans un silence assourdissant.

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Newsdesk Libnanews
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