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La visite de Joseph Aoun en Arabie saoudite : enjeux diplomatiques et économiques

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Un déplacement stratégique au cœur de la péninsule arabique

Le président libanais Joseph Aoun s’est rendu en Arabie saoudite cette semaine dans le cadre d’une visite officielle visant à renforcer les liens diplomatiques et économiques entre Beyrouth et Riyad. Cette visite intervient dans un contexte régional complexe, marqué par des tensions géopolitiques croissantes au Moyen-Orient et une situation économique difficile au Liban. Pour Joseph Aoun, ce déplacement constitue une opportunité majeure de repositionner le Liban sur l’échiquier diplomatique régional tout en cherchant un soutien économique crucial pour relancer l’économie libanaise en crise.

Durant cette visite, le président libanais a rencontré le roi Salmane ben Abdelaziz Al Saoud ainsi que le prince héritier Mohammed ben Salmane (MBS). Les discussions ont porté sur plusieurs dossiers clés, notamment la coopération économique, le soutien aux réformes structurelles au Liban, ainsi que la stabilité sécuritaire au sud du pays. Le choix de l’Arabie saoudite pour cette visite officielle n’est pas anodin : le royaume est historiquement un allié majeur du Liban et joue un rôle central au sein du Conseil de coopération du Golfe (CCG), une organisation dont le soutien financier pourrait s’avérer déterminant pour le redressement libanais.

Des enjeux économiques cruciaux pour le Liban

Sur le plan économique, le Liban espère convaincre l’Arabie saoudite de relancer ses investissements au pays du Cèdre. Avant la crise économique de 2019, Riyad était l’un des principaux partenaires commerciaux de Beyrouth, avec des investissements significatifs dans le secteur bancaire, immobilier et touristique. Cependant, les relations économiques s’étaient dégradées à la suite des tensions politiques liées à l’influence du Hezbollah au Liban, une organisation que l’Arabie saoudite considère comme un bras armé de l’Iran.

Lors de sa visite, Joseph Aoun a mis en avant les réformes engagées par son gouvernement pour améliorer la transparence financière et lutter contre la corruption, des critères essentiels pour regagner la confiance des investisseurs saoudiens. Il a également proposé la création de zones économiques spéciales au Liban, où les entreprises saoudiennes bénéficieraient de facilités fiscales et administratives. Cette initiative vise à attirer des investissements directs étrangers tout en stimulant l’emploi local et en renforçant la compétitivité de l’économie libanaise.

Analyse des relations libano-saoudiennes : vers un nouveau partenariat stratégique ?

Un historique de relations fluctuantes

Les relations entre le Liban et l’Arabie saoudite ont toujours oscillé entre partenariat stratégique et tensions politiques. Historiquement, Riyad a joué un rôle clé dans la reconstruction du Liban après la guerre civile de 1975-1990, en injectant des milliards de dollars dans l’économie libanaise et en soutenant les accords de Taëf qui ont mis fin au conflit. L’Arabie saoudite a également longtemps été un allié fidèle de la communauté sunnite libanaise, notamment à travers son soutien au Courant du Futur de l’ancien Premier ministre Saad Hariri.

Cependant, ces dernières années, les relations entre Beyrouth et Riyad se sont considérablement refroidies. En cause, l’influence grandissante du Hezbollah sur la scène politique libanaise, organisation chiite soutenue par l’Iran, rival régional de l’Arabie saoudite. En 2017, la crise avait atteint son paroxysme avec la démission forcée de Saad Hariri depuis Riyad, un épisode qui avait provoqué un tollé diplomatique international. Depuis lors, l’Arabie saoudite avait considérablement réduit son soutien financier et diplomatique au Liban, laissant le pays dans une situation de plus en plus précaire.

Une volonté de rapprochement sous l’impulsion de Joseph Aoun

Avec l’arrivée de Joseph Aoun à la présidence, une nouvelle dynamique semble s’installer. Ancien commandant en chef de l’armée libanaise, Aoun bénéficie d’une réputation de neutralité politique et de professionnalisme qui pourrait aider à apaiser les réticences saoudiennes. Son profil « technocratique » tranche avec celui de ses prédécesseurs souvent associés à des factions politiques clivantes. En misant sur une diplomatie pragmatique, Joseph Aoun espère convaincre Riyad que le Liban peut retrouver une forme de stabilité politique et économique, loin des influences iraniennes.

Le président libanais a multiplié les gestes symboliques pour séduire l’Arabie saoudite. Lors de sa visite à Riyad, il a notamment proposé de renforcer la coopération sécuritaire entre les deux pays, notamment dans la lutte contre le trafic de drogue et la contrebande à la frontière syrienne. En échange, le Liban espère obtenir un soutien financier direct sous forme d’investissements dans les infrastructures et de relance des échanges commerciaux.

Vers un nouveau partenariat stratégique ?

Si les discussions entre Joseph Aoun et Mohammed ben Salmane se concrétisent, cela pourrait marquer le début d’un nouveau partenariat stratégique entre Beyrouth et Riyad. L’Arabie saoudite pourrait redevenir un partenaire économique privilégié du Liban, contribuant à la stabilisation de son économie en crise. En outre, un rapprochement avec Riyad pourrait renforcer la position du Liban sur la scène régionale, en lui permettant de jouer un rôle de médiateur dans les tensions entre l’Iran et les pays du Golfe.

Pour Riyad, soutenir le Liban pourrait également être une stratégie gagnante. En aidant à stabiliser le pays, l’Arabie saoudite pourrait réduire l’influence iranienne au Levant tout en montrant à la communauté internationale qu’elle est capable de jouer un rôle constructif dans la région. De plus, avec la Vision 2030, Mohammed ben Salmane cherche à diversifier l’économie saoudienne en investissant à l’étranger, et le Liban, avec son potentiel économique et touristique, pourrait représenter une opportunité intéressante.

Les défis à surmonter pour concrétiser ce partenariat

Cependant, plusieurs obstacles pourraient entraver la mise en place de ce partenariat stratégique. Tout d’abord, l’influence persistante du Hezbollah sur la politique libanaise demeure un point de friction majeur. L’Arabie saoudite pourrait exiger des garanties sur la limitation de l’influence de l’organisation chiite avant de réengager des fonds significatifs au Liban. De plus, la situation économique libanaise reste extrêmement fragile, et il faudra des réformes profondes pour convaincre les investisseurs saoudiens que leur argent sera utilisé de manière transparente et productive.

En outre, la dynamique régionale complexe, notamment les relations entre Riyad et Téhéran, pourrait également influencer la trajectoire de ce rapprochement. Si les négociations entre l’Arabie saoudite et l’Iran, actuellement facilitées par la Chine, devaient aboutir à une détente durable, cela pourrait ouvrir la voie à une coopération plus large au Liban. À l’inverse, une escalade des tensions régionales risquerait de fragiliser les avancées diplomatiques obtenues lors de la visite de Joseph Aoun en Arabie saoudite.

Un tournant décisif pour les relations libano-saoudiennes ?

La visite du président libanais Joseph Aoun en Arabie saoudite pourrait marquer un tournant stratégique pour le Liban. En quête de soutien économique et politique, Beyrouth semble miser sur un rapprochement avec Riyad pour sortir de l’impasse économique et renforcer sa stabilité intérieure. De son côté, l’Arabie saoudite pourrait trouver un intérêt stratégique à renforcer son influence au Liban, en contrebalançant celle de l’Iran et en contribuant à la stabilité d’un pays clé pour la sécurité régionale.

Toutefois, la concrétisation de ce partenariat dépendra de plusieurs facteurs cruciaux : la capacité du Liban à mettre en œuvre des réformes économiques profondes, la gestion de l’influence du Hezbollah sur la scène politique libanaise, et l’évolution des relations entre l’Arabie saoudite et l’Iran. Dans ce contexte, Joseph Aoun devra faire preuve de finesse diplomatique et de pragmatisme pour maximiser les bénéfices de ce rapprochement sans compromettre l’équilibre fragile du Liban.

Si les discussions aboutissent, cela pourrait non seulement relancer l’économie libanaise mais aussi offrir au Liban une position plus forte sur l’échiquier diplomatique régional. Pour l’Arabie saoudite, il s’agirait d’une occasion de démontrer son rôle de leader dans la région et de renforcer son image de faiseur de paix au Moyen-Orient.

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Newsdesk Libnanews
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