mercredi, mars 26, 2025

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Le Liban face à un choix économique crucial: un accord avec le FMI ou de nouvelles restrictions bancaires

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Alors que le pays traverse l’une des pires crises économiques de son histoire, le gouvernement de Nawaf Salam tente de négocier un nouvel accord avec le Fonds monétaire international (FMI) afin de débloquer une aide financière cruciale pour stabiliser l’économie. Toutefois, ces discussions suscitent des inquiétudes croissantes parmi la population, car elles impliquent des réformes économiques profondes, notamment des restrictions sur les retraits bancaires et des ajustements fiscaux drastiques.

Depuis l’effondrement du système financier libanais en 2019, les épargnants ont perdu l’accès à leurs comptes bancaires, et les restrictions informelles mises en place par les banques ont plongé une grande partie de la population dans une précarité sans précédent. Selon Nahar (18/02/2025), le nouvel accord en discussion pourrait institutionnaliser ces restrictions, rendant permanentes certaines mesures limitant l’accès aux fonds déposés dans les banques libanaises.

Ce projet, bien que soutenu par les instances internationales, est largement rejeté par la société civile et une partie de la classe politique, qui y voient une légalisation du vol des dépôts bancaires. Face à ces tensions, le gouvernement se retrouve dans une impasse délicate, devant jongler entre les exigences du FMI et la pression d’une population épuisée par des années d’instabilité économique.

Décryptage de la revue de presse

les liens entre les banques, les médias et la manipulation du FMI

Une manipulation orchestrée par les banques et leurs alliés politiques

Derrière le débat sur les restrictions bancaires et l’accord avec le FMI, un enjeu plus profond se joue en coulisses : la responsabilité des banques libanaises et de leurs alliés politiques dans l’effondrement du système financier. Depuis le début de la crise en 2019les banques ont imposé des limitations informelles sur les retraits, tout en continuant à protéger les grandes fortunes et les élites économiques qui avaient déjà déplacé des milliards de dollars à l’étrangeravant l’effondrement du système.

Aujourd’hui, alors que ces restrictions doivent être légalisées dans le cadre de l’accord avec le FMIles élites financières sont pour la première fois concernées par ces limitations. Une légalisation signifie que les grands déposants, y compris les hommes d’affaires, les politiciens et les banquiers, devront aussi subir les mesures qu’ils avaient jusqu’ici réussi à contourner. C’est pourquoi les banques et leurs relais médiatiques tentent de faire porter au FMI l’entière responsabilité des restrictions, alors même que celles-ci existent de fait depuis plus de quatre ans sous l’impulsion du secteur bancaire lui-même.

Selon Al Akhbar (18/02/2025), plusieurs médias proches du secteur bancaire ont récemment multiplié les éditoriaux dénonçant le FMI comme étant le principal responsable de la confiscation des dépôts. Or, en réalité, c’est le blocage orchestré par les banques et leurs alliés politiques qui a conduit le Liban à cette situationDès 2019, les banques avaient déjà limité l’accès aux dépôts, refusant toute solution de restructuration qui aurait impliqué leurs propres pertes. Aujourd’hui, en accusant le FMI de vouloir institutionnaliser les restrictions, elles tentent de détourner l’attention de leur propre responsabilité dans l’effondrement du système financier.

Ce jeu d’influence entre banques, médias et pouvoir politique explique pourquoi les négociations économiques sont aussi opaques et conflictuelles. Tant que les véritables responsables ne seront pas tenus pour comptables de leurs décisions, toute réforme sera perçue comme une injustice imposée aux citoyens ordinaires, tandis que les élites continueront à protéger leurs intérêts au détriment du pays tout entier.

Des négociations sous haute tension avec le FMI

Les discussions entre le gouvernement libanais et le Fonds monétaire international (FMI) sont au cœur des débats économiques du moment. L’objectif de Nawaf Salam est d’obtenir une ligne de crédit d’au moins 3 milliards de dollars, conditionnée à la mise en place de réformes économiques et financières structurelles. Cependant, les exigences du FMI sont strictes et impopulaires, ce qui complique leur adoption par un gouvernement fragilisé et un Parlement divisé.

Selon Al Joumhouriyat (18/02/2025), le FMI insiste particulièrement sur la restructuration du secteur bancaire, une réforme jugée indispensable pour relancer la confiance des investisseurs et stabiliser le marché financier libanais. Parmi les mesures discutées figurent :

  • Légalisation des restrictions bancaires : Le FMI propose de rendre officielles et encadrées par la loi les limitations sur les retraits en devises étrangères, en instaurant un plafond mensuel de 200 à 400 dollars par déposant.
  • Recapitalisation des banques : L’institution demande aux actionnaires des banques libanaises de couvrir une partie des pertes avant que l’État ne vienne en aide au secteur bancaire.
  • Réduction du déficit public : Cela passe par l’augmentation de certaines taxes, notamment une hausse de la TVA et une réduction des subventions sur certains produits essentiels.

Ces réformes suscitent une forte opposition politique et socialeLe Hezbollah et le mouvement Amal, qui détiennent un poids important au Parlement, s’opposent à toute mesure qui affecterait les classes populaires, notamment la levée des subventions sur des produits de base. Nabih Berri, président du Parlement, a récemment déclaré que « le peuple libanais ne peut être tenu responsable des erreurs de la classe dirigeante et des banques », signalant ainsi son opposition à une partie des mesures exigées par le FMI.

Les restrictions bancaires : une légalisation des pertes des déposants ?

L’une des mesures les plus controversées dans les négociations avec le FMI concerne la légalisation des restrictions bancaires, déjà en vigueur de manière informelle depuis 2019. Jusqu’à présent, les banques libanaises imposaient arbitrairement des plafonds de retrait et des conversions forcées des dépôts en dollars en livres libanaises à des taux inférieurs au marché, une pratique qui a entraîné une érosion massive des économies des Libanais.

Selon Al Akhbar (18/02/2025), le projet actuellement discuté vise à officialiser ces restrictions pour une période de transition de trois à cinq ans, avec des retraits limités entre 200 et 400 dollars par mois selon le montant des dépôts et les catégories de comptes. Une telle mesure viserait à éviter un effondrement total du système bancaire en empêchant une ruée massive des épargnants vers leurs comptes, ce qui provoquerait une crise de liquidité incontrôlable.

Cependant, cette approche est perçue par une large partie de la population comme une confiscation légale des fonds des déposants. De nombreux experts et économistes dénoncent ce qu’ils appellent « une tentative de faire payer aux épargnants les erreurs du secteur bancaire et de l’État »Le président de l’Association des déposants libanais, Hassan Moukalled, a qualifié ces mesures de « hold-up bancaire légalisé », affirmant que « le peuple libanais ne peut pas être sacrifié sur l’autel des banques et des institutions financières internationales ».

Les manifestations contre cette institutionnalisation des pertes bancaires se sont multipliées ces dernières semaines. Selon Nahar (18/02/2025), des rassemblements ont eu lieu devant la Banque du Liban à Beyrouth, ainsi que dans plusieurs grandes villes comme Tripoli et Saïda. Certains manifestants réclament une restitution complète des dépôts, tandis que d’autres exigent une transparence totale sur la gestion des pertes bancaires et les responsabilités des institutions financières.

Malgré cette opposition grandissante, le gouvernement libanais peine à proposer une alternative viable. Nawaf Salam est confronté à un dilemme politique et économique majeur : sans accord avec le FMI, le Liban risque de se retrouver sans aide financière internationale, ce qui pourrait aggraver encore davantage la crise. Mais en acceptant ces mesures impopulaires, son gouvernement s’expose à une contestation sociale majeure qui pourrait fragiliser son autorité et provoquer une nouvelle instabilité.

Les divisions politiques autour du plan de redressement économique

Alors que le gouvernement de Nawaf Salam tente de finaliser un accord avec le FMI, la scène politique libanaise est plus que jamais divisée sur la manière de gérer la crise économiqueCertains partis soutiennent une réforme profonde du secteur bancaire, tandis que d’autres dénoncent une soumission aux exigences des institutions financières internationales au détriment de la population.

Selon Al Joumhouriyat (18/02/2025)les Forces libanaises (FL) et le Parti Kataëb sont favorables à une restructuration du secteur bancaire, estimant qu’il s’agit de la seule solution pour rétablir la confiance des investisseurs et relancer l’économieSamir Geagea, chef des FL, a récemment déclaré que « le Liban n’a pas d’autre choix que d’accepter les réformes exigées par le FMI, même si elles sont difficiles », arguant que « toute alternative nous condamnerait à un effondrement total ».

À l’inverse, le Hezbollah et le mouvement Amal rejettent catégoriquement certaines mesures, notamment celles qui impacteraient directement les classes populairesMohammad Raad, chef du bloc parlementaire du Hezbollah, a affirmé que « les déposants libanais ne doivent pas payer le prix des erreurs des banques et de l’État », tout en appelant le gouvernement à trouver d’autres solutions, notamment en renforçant la coopération économique avec l’Iran, la Chine et la Russie.

De son côté, Nabih Berri, président du Parlement et chef du mouvement Amal, adopte une position plus nuancée. D’après Nida’ Al Watan (18/02/2025), il tente de jouer les médiateurs entre les différentes factions, cherchant à éviter une crise politique majeure qui pourrait paralyser encore davantage le paysIl plaide pour une restructuration progressive du secteur bancaire, avec des garanties pour les petits déposants, tout en repoussant certaines conditions du FMI jugées trop sévères.

Ce bras de fer politique retarde la mise en place des réformes, augmentant l’incertitude économique et laissant les citoyens sans visibilité sur l’avenir de leurs économiesLe Parlement doit prochainement débattre des grandes orientations économiques du gouvernement, mais les tensions internes risquent de prolonger l’impasse et d’aggraver la situation financière du pays.

Un climat social explosif : la colère des citoyens face aux banques et au gouvernement

Alors que les élites politiques débattent du futur accord avec le FMI, une fronde sociale grandissante menace d’exploser dans tout le pays. Les Libanais, déjà frappés par des années de crise économique, d’inflation galopante et d’une dévaluation dramatique de la livre libanaise, expriment un profond sentiment d’injustice face aux restrictions bancaires.

Depuis plusieurs semaines, les manifestations se multiplient à Beyrouth, Tripoli et Saïda, où des citoyens réclament la restitution de leurs dépôts bloqués et la fin des politiques d’austérité dictées par les institutions financières internationalesSelon Al Akhbar (18/02/2025), des rassemblements ont même dégénéré devant certaines banques, avec des tentatives d’intrusion et des accrochages avec les forces de l’ordre.

L’Association des déposants libanais, qui représente des milliers de citoyens lésés par la crise bancaire, a dénoncé dans un communiqué « une collusion entre l’État et les banques pour faire payer aux citoyens la faillite du système ». Son porte-parole, Hassan Moukalled, a averti que « toute tentative de légaliser les restrictions bancaires entraînera une réaction populaire incontrôlable », menaçant même d’une grève générale et d’un blocage des institutions publiques si un compromis acceptable n’est pas trouvé.

Les syndicats et les associations de travailleurs se mobilisent également. La Confédération générale des travailleurs libanais (CGTL) a appelé à une journée nationale de protestation contre la politique économique du gouvernement, dénonçant un accord avec le FMI qui risquerait de « faire peser le poids des réformes sur les classes populaires et la classe moyenne ».

Face à cette pression sociale croissante, le gouvernement Nawaf Salam se retrouve dans une position délicate. D’un côté, il doit finaliser un accord pour éviter une faillite totale du pays, mais de l’autre, il ne peut ignorer la colère populaire qui pourrait entraîner des troubles massifs et une déstabilisation du paysSelon Nahar (18/02/2025), des conseillers du Premier ministre auraient mis en garde contre une « situation incontrôlable » si les restrictions bancaires venaient à être entérinées sans compensation adéquate pour les épargnants.

Les banques, quant à elles, craignent une recrudescence des attaques contre leurs agences. Plusieurs établissements ont déjà renforcé leur sécurité et réduit leurs horaires d’ouverture pour éviter les confrontations avec des clients excédésL’Association des banques du Liban (ABL) a publié un communiqué appelant à « une solution équilibrée » qui protège à la fois les déposants et la stabilité financière du pays, mais pour l’instant, aucun consensus ne semble émerger.

Dans un pays où la confiance dans les institutions a été profondément ébranlée, les prochaines semaines seront décisivesSi le gouvernement ne parvient pas à calmer la contestation sociale tout en concluant un accord viable avec le FMI, le Liban pourrait basculer dans une nouvelle crise politique et économique majeure, aux conséquences imprévisibles.

Alors que les négociations avec le FMI entrent dans une phase critique, l’avenir économique du Liban demeure suspendu aux choix que prendra le gouvernement Nawaf SalamLe pays est à la croisée des chemins : soit il accepte les réformes exigées en échange d’une aide financière qui permettrait une stabilisation temporaire de l’économie, soit il refuse certaines conditions et risque une aggravation de la crise, sans soutien international.

D’après Al Sharq Al Awsat (18/02/2025)les bailleurs internationaux, notamment les États-Unis et la France, exercent une pression grandissante sur Beyrouth pour qu’il adopte rapidement un programme de réformes. Washington a récemment averti que « sans une restructuration bancaire et un accord avec le FMI, toute aide économique au Liban resterait bloquée ». De son côté, l’Union européenne suit la situation de près, notamment en ce qui concerne les implications sociales et humanitaires d’un éventuel effondrement économique.

Cependant, sur le terrain, les tensions politiques et sociales pourraient freiner toute avancée concrète. Le blocage au Parlement entre pro-réformes et partisans du statu quo, ainsi que la colère croissante des citoyens face aux restrictions bancaires, créent un climat d’incertitude majeur. Si aucune solution équilibrée n’émerge rapidement, le Liban risque non seulement une faillite complète, mais aussi une explosion sociale sans précédent.

Pour Nawaf Salam et son gouvernement, le défi est immenseParviendra-t-il à imposer un compromis entre les exigences du FMI et les attentes des Libanais ? Ou cédera-t-il sous la pression politique, prolongeant ainsi l’impasse économique du pays ? Les jours à venir seront déterminants, car chaque retard dans la prise de décision renforce l’instabilité et aggrave la situation financière.

Dans un Liban où les crises s’enchaînent depuis des années sans véritable issueles citoyens attendent désormais des actes concrets. Si les dirigeants échouent une fois de plus à répondre aux attentes populaires et aux impératifs économiques, le pays risque de sombrer encore plus profondément dans l’inconnu.

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