Depuis 2020, l’Afrique de l’Ouest a connu une recrudescence de coups d’État militaires, avec des renversements de gouvernements au Mali, en Guinée, au Burkina Faso et plus récemment au Niger. Ces événements mettent en lumière les fragilités politiques et institutionnelles de la région, mais également les influences étrangères qui exacerbent les tensions locales.
Un terreau de crises internes
Les coups d’État en Afrique de l’Ouest trouvent leurs origines dans des crises internes profondes. Dans de nombreux pays, la corruption, la mauvaise gouvernance et l’incapacité des gouvernements à répondre aux besoins de la population alimentent un mécontentement généralisé.
Au Mali et au Burkina Faso, la montée des groupes jihadistes a accentué l’instabilité. Les populations locales, confrontées à l’insécurité chronique, reprochent aux autorités civiles leur incapacité à protéger les citoyens, ouvrant la voie à des interventions militaires perçues comme des solutions salvatrices.
L’exclusion politique des opposants et l’érosion des libertés démocratiques contribuent également à ces crises. En Guinée, par exemple, le président Alpha Condé avait modifié la Constitution pour briguer un troisième mandat, suscitant une colère populaire qui a facilité le coup d’État de 2021.
Le rôle des puissances étrangères
Les influences étrangères jouent un rôle majeur dans l’instabilité de la région. La présence militaire française, notamment à travers l’opération Barkhane, a été vivement critiquée au Mali et au Burkina Faso. Les gouvernements militaires qui ont pris le pouvoir dans ces pays se sont tournés vers de nouveaux partenaires, comme la Russie, symbolisée par le groupe paramilitaire Wagner.
Cette reconfiguration des alliances reflète une méfiance croissante à l’égard des anciennes puissances coloniales, accusées de poursuivre des agendas néocoloniaux. Dans le même temps, la rivalité entre puissances étrangères – notamment la Chine, la Russie et les États-Unis – exacerbe les tensions régionales, chaque acteur cherchant à renforcer son influence économique et stratégique.
Les conséquences économiques et sociales
Les coups d’État ont des répercussions économiques et sociales importantes pour les pays concernés. Les sanctions imposées par la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) à des régimes militaires, comme au Mali et au Niger, isolent davantage ces pays et aggravent la situation économique.
Les échanges commerciaux, cruciaux pour les économies locales, sont perturbés par ces sanctions. Par exemple, le blocus imposé par la CEDEAO au Mali a entraîné une hausse des prix des denrées alimentaires et une pénurie de biens essentiels.
Sur le plan social, ces crises renforcent les inégalités et augmentent le chômage, notamment parmi les jeunes, qui constituent une part importante de la population.
Réactions internationales et régionales
Face à cette vague de coups d’État, les réactions internationales et régionales sont variées. La CEDEAO a renforcé ses mécanismes de pression, allant jusqu’à envisager une intervention militaire au Niger pour rétablir le gouvernement civil. Cependant, ces initiatives sont souvent perçues comme partiales, car elles ne traitent pas les causes profondes des crises.
L’Union africaine, de son côté, a appelé à un retour rapide à l’ordre constitutionnel, mais peine à coordonner une réponse unifiée en raison des divergences entre ses membres. Les puissances occidentales, comme la France et les États-Unis, continuent de condamner ces coups d’État, tout en cherchant à maintenir leur présence stratégique dans la région.
Le dilemme des populations locales
Les populations locales se retrouvent souvent prises entre des régimes militaires promettant des réformes et une communauté internationale exigeant un retour à la démocratie. Les attentes envers les militaires au pouvoir sont élevées, mais les résultats concrets restent souvent limités.
Au Mali, par exemple, la junte a promis une transition vers un régime civil, mais les délais sont régulièrement repoussés. Cette situation alimente la frustration des citoyens, qui aspirent à une stabilité durable.
Des perspectives incertaines
L’avenir de l’Afrique de l’Ouest reste incertain. Les coups d’État révèlent des tensions profondes entre des aspirations démocratiques et des réalités locales complexes. Si des réformes institutionnelles et économiques ne sont pas mises en œuvre, le risque de nouveaux coups d’État demeure élevé.
Les analystes estiment que seule une approche intégrée, combinant soutien au développement, renforcement des institutions et dialogue régional, pourra stabiliser durablement la région.