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Liban: Baisse des importations et crise économique

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Le Liban fait face à une conjoncture économique et logistique de plus en plus préoccupante, marquée par une dépendance chronique aux importations, un ralentissement des chaînes d’approvisionnement et des défis structurels aggravés par des facteurs externes et internes. Ad Diyar et Al Quds mettent en lumière une baisse des importations, des risques pour la sécurité alimentaire et les impacts de la liste grise du GAFI, tandis que l’insolvabilité des banques complique l’accès aux lettres de crédit et renforce la dépendance aux agences exclusives.

Une chute des importations et des coûts logistiques en hausse

Ad Diyar rapporte une diminution de 12 % des importations au premier trimestre 2025 par rapport à 2024, une tendance attribuée aux perturbations logistiques mondiales. Les tensions en mer Rouge, alimentées par les attaques des Houthis, et les incertitudes dans le détroit d’Ormuz ont fait bondir les coûts du fret maritime. Ces hausses affectent particulièrement les produits pharmaceutiques, les denrées alimentaires et les pièces détachées, essentiels à la survie d’une population déjà fragilisée par des années de crise économique. Le Liban, qui importe environ 80 % de ses besoins, voit ainsi sa capacité à maintenir un approvisionnement stable compromise.

Le port de Beyrouth, pivot du commerce extérieur, opère à 72 % de sa capacité, mais les retards dans le dédouanement, dus à une bureaucratie inefficace et à des ressources limitées, aggravent la situation. Le syndicat des importateurs alerte sur des risques de pénuries temporaires de médicaments, un secteur où la dépendance aux importations est quasi totale. Cette lenteur logistique met en péril l’accès à des biens vitaux, accentuant la vulnérabilité des ménages libanais.

Sécurité alimentaire : une dépendance au blé ukrainien menacée

La sécurité alimentaire, pilier de la stabilité sociale, est particulièrement menacée. Al Quds souligne que 85 % du blé libanais provient d’Ukraine et de Russie, deux pays en guerre depuis 2022. La destruction des ports ukrainiens, comme Odessa, et les perturbations des exportations russes via la mer Noire rendent les livraisons incertaines. Le blé, ingrédient clé du pain quotidien, est un enjeu vital dans un pays où la malnutrition guette une population appauvrie par la dévaluation de la livre et l’inflation galopante.

Face à ce risque, le Liban explore des alternatives comme l’Australie ou le Canada, mais ces options impliquent des coûts plus élevés et des délais prolongés, difficiles à assumer pour un Trésor public exsangue. Cette dépendance au blé étranger, combinée à une production agricole locale limitée, expose le pays à une crise alimentaire potentielle, surtout si les perturbations persistent.

Liste grise du GAFI : un frein supplémentaire

La récente inclusion du Liban sur la liste grise du Groupe d’action financière (GAFI), confirmée en octobre 2024, ajoute une couche de complexité. Cette désignation, due à des lacunes dans la lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme, a des répercussions directes sur le commerce. Les banques internationales, soumises à une surveillance accrue, hésitent à traiter avec leurs homologues libanaises, ce qui complique l’émission de lettres de crédit – des garanties essentielles pour les importateurs.

Le GAFI a accordé au Liban jusqu’en 2026 pour corriger ces failles, mais l’instabilité politique et la guerre Hezbollah-Israël de 2024 ont freiné les réformes. Cette liste grise décourage les investissements étrangers et augmente les coûts de transaction, les banques correspondantes imposant des frais plus élevés pour couvrir les risques perçus. Pour les importateurs, cela signifie des marges réduites et des délais supplémentaires, accentuant la pression sur les prix des biens de première nécessité.

Dépendance aux agences exclusives : un modèle sous tension

Le système des agences exclusives, qui domine le commerce libanais, amplifie ces difficultés. De nombreuses entreprises dépendent d’importateurs détenant des monopoles sur des produits spécifiques, une pratique héritée de décennies de clientélisme. Cette structure limite la concurrence et maintient des prix élevés, rendant le marché peu résilient aux chocs externes. Avec la hausse des coûts logistiques et les restrictions bancaires, ces agences peinent à sécuriser leurs approvisionnements, ce qui pourrait entraîner des ruptures de stock et une inflation accrue.

Lettres de crédit : l’insolvabilité bancaire paralyse le commerce

L’insolvabilité des banques libanaises, héritage de la crise financière de 2019, constitue un obstacle majeur. Les lettres de crédit, nécessaires pour garantir les paiements aux fournisseurs étrangers, sont devenues quasi inaccessibles. Les banques, dépourvues de liquidités en devises étrangères et sous la pression de la liste grise du GAFI, ne peuvent plus jouer leur rôle d’intermédiaires. Les importateurs doivent souvent recourir à des circuits informels ou à des financements extérieurs coûteux, augmentant les risques et les coûts.

Cette situation est exacerbée par la perte de confiance des banques internationales dans le système financier libanais. Même les établissements encore opérationnels, comme ceux soutenus par la Banque du Liban (BDL), font face à des exigences de conformité renforcées, rendant chaque transaction plus longue et onéreuse. Les petites et moyennes entreprises, piliers du commerce local, sont les plus touchées, souvent incapables de surmonter ces barrières.

Une économie au bord du précipice

La combinaison de ces facteurs – chute des importations, dépendance alimentaire, liste grise du GAFI, monopoles des agences exclusives et crise bancaire – place le Liban dans une position critique. La sécurité alimentaire est menacée par l’incertitude des approvisionnements en blé, tandis que l’accès aux médicaments et autres produits essentiels vacille sous les contraintes logistiques et financières. Le gouvernement de Nawaf Salam, confronté à une paralysie politique et à des ressources limitées, tarde à proposer des solutions viables.

Sans une réforme urgente des douanes, un soutien international accru et une diversification des sources d’importation, le Liban risque de basculer dans une crise humanitaire plus profonde. La dépendance chronique aux importations, jadis un moteur de son économie, est aujourd’hui son talon d’Achille.

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Newsdesk Libnanews
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